Telle une cicatrice béante, l'ouvrage fend le bord de mer enlaidissant l'immense seconde plage de Bouzedjar. Cette dernière, défigurée, est ainsi scindée en deux bouts de plage : le premier court et sablonneux alors que le second plus long est plutôt chétif parce que réduit à une mince bordure par une colline qui avance de toute sa masse. Ce saccage, c'est le résultat d'un développement à courte vue, un développement qui ne se soucie nullement du respect de l'environnement et du bien-être. Un développement qui piétine également les lois de la République, puisque le site altéré est protégé pour être une ZET, une zone qui a d'ailleurs fait l'objet d'une étude d'aménagement effectuée par un bureau d'études espagnol. Des travaux d'aménagement devaient même suivre pour un montant de deux milliards de dinars. En fait l'outrage que la plage a subi, elle le doit au port de pêche qui avait été injecté à son extrémité, Bouzedjar étant un village de pêcheurs dont la population vit presque exclusivement de la pêche, mais qui avait la curieuse particularité de n'avoir pas de port. Après la réalisation de celui-ci, il s'est avéré qu'il fallait préserver sa passe de l'ensablement inhérent à l'action de la houle. Ainsi, une autorisation de programme de 80 millions de dinars avait été dégagée pour la réalisation d'ouvrages de protection. A 300 m de la jetée secondaire, un épi devait être édifié puis un second à 500 m du premier. Leur fonction est de briser les courants marins qui charrient le sable. Ces épis consistent en l'enrochement de 16 150 t et l'enlèvement de 24 000 m3 de sable dont 12 000 devaient servir à l'engraissement de la plage de Madagh, une station balnéaire située à 15 km vers l'est. Au bout du compte, si Madagh, plage originellement sans sable, a gagné, Bouzedjar a perdu en charme. Heureusement qu'il n'y eut qu'un seul épi de réalisé. En effet, dans l'affaire, il a été oublié d'intégrer l'épi en élément du cadre touristique, en transformant sa surface en aire de promenade pour les vacanciers. Car une fois les gros travaux terminés, les responsables du projet oublièrent vite leurs belles promesses, des promesses qui n'auraient coûté que des broutilles à côté de ce qu'avait nécessité l'épi blessant la plage. Ainsi, auront été frustrés ceux qui rêvaient de plongeoirs aménagés sur les bords de l'épi, de marches pour se glisser en douceur dans l'eau, de quelques bancs pour les contemplatifs ou les pêcheurs à la ligne, voire d'un éclairage public.