Abdelkrim Chelghoum, expert et consultant en parasismique, suggère la mise en place d'un «Monsieur risques», placé sous l'autorité directe du président de la République, pour se préparer à affronter les risques potentiels. L'Assemblée populaire de wilaya (APW) d'Alger a inscrit à l'ordre du jour de sa dernière session ordinaire, tenue la semaine dernière, le dossier relatif à la gestion des catastrophes naturelles. Des recommandations ont été formulées lors de la cette session, qui a vu l'intervention de représentants de la Protection civile et des services de sécurité. «La capitale est menacée par plusieurs phénomènes, tels que les inondations, les glissements de terrains, etc. Mais avec les nouvelles technologies, le danger devient plus prévisible. D'où la nécessité de s'y préparer. La wilaya a les moyens de faire face à ces dangers grâce à ses différents intervenants (Protection civile, services de sécurité, etc.), mais il reste à prendre en charge certains segments, comme par exemple la révision du plan de circulation. Le problème s'est posé à l'occasion de l'accident ferroviaire. Parmi les recommandations faites lors de la session de l'APW, figurent l'évaluation régulière des différents modules du plan Orsec, mais aussi la sensibilisation de la population, qui commence à la base, c'est-à-dire dans les écoles», précise M. Safi, président de la commission Urbanisme de l'APW. Les experts sont moins enthousiastes que les «administrateurs». Selon Abdelkrim Chelghoum, expert et consultant en parasismique, Alger fait face à 10 risques majeurs sur les 14 identifiés par l'ONU : séismes, inondations, attroupements, etc. Un rapport élaboré et présenté par l'expert au Sénat, en 2006, avait évoqué l'éventualité d'un tremblement de terre fictif de magnitude 7 sur l'échelle de Richter pour des besoins argumentaires qui frapperait la baie d'Alger (8 km de Aïn Benian) à minuit, et qui pourrait détruire 100 000 immeubles environ et ferait plus de 67 000 victimes et des dizaines de milliers de blessés. Les établissements de souveraineté (présidence, palais du gouvernement, commandement de la gendarmerie, de la Protection civile, etc.) ne seraient pas épargnés par la catastrophe. «Le rapport était très réaliste et n'a pas été apprécié par certains», relève l'expert, qui signale l'effort accompli pour la mise en place d'une loi qui révise le dispositif, (04-20 du 25 décembre 2004, relative à la prévention des risques majeurs et la gestion des catastrophes, dont l'efficacité n'est pas assurée à cause de l'absence de textes d'application. Quelle stratégie a été suivie pour gérer ces catastrophes ? «Un séisme de la même magnitude que celui de Boumerdès à Alger ferait autant de dégâts sinon plus dans la capitale. Pourtant, depuis cette catastrophe, rien n'a été fait pour renforcer, par exemple, le vieux bâti. Pire, la vulnérabilité s'est accentuée avec les décisions injustifiées des autorités prises pour la construction sur des zones non urbanisables. De grands ensembles d'habitation ont ainsi été construits sur les lits des oueds ces dernières années dans la capitale. Un autre exemple : la centrale électrique du Hamma dont on a réclamé la délocalisation est toujours à la même place», s'indigne le professeur. A chaque catastrophe, il y a un volet prévention qui est négligé par les responsables de la wilaya. «La stratégie à mettre en œuvre est très limitée. On le voit à Alger, dès qu'une pluie de 15mm s'abat sur la ville, c'est le chaos», poursuit-il. Ce dernier suggère la mise en place d'un «Monsieur risques» pour se préparer à affronter les risques à venir. «Je propose la mise en place d'un Monsieur risques qui sera sous l'autorité du président de la République. Il n'aura à rendre compte qu'à cette institution, même pas au wali. Ce «Monsieur» sera chargé de la coordination des différents intervenants. Il aura les moyens et veillera à l'application des mesures en cas de catastrophes. Il donnera aussi des avis sur la vulnérabilité des sites avant toute opération de construction d'un projet public, etc.», suggère M. Chalghoum.