La mort de Michael Brown, en août dernier, n'a fait que raviver le débat sur l'attitude des forces de l'ordre et les relations raciales aux Etats-Unis, douze ans après l'affaire Rodney King et les émeutes qui avaient embrasé Los Angeles. La ville américaine de Ferguson a connu une nuit d'émeutes et de violences après l'annonce, lundi soir, de l'abandon des poursuites à l'encontre d'un policier blanc qui avait tué en août dernier un jeune Noir désarmé. Dès l'annonce du verdict, prononcé par un jury populaire, les violences ont éclaté dans la petite ville du Missouri, tandis que, de Seattle à New York, en passant par Chicago et Los Angeles, des milliers d'Américains descendaient dans les rues pour dénoncer «le racisme qui tue». A Ferguson, où la mort de Michael Brown, abattu à 18 ans de six balles par un policier, avait déjà déclenché de graves émeutes raciales il y a trois mois, les échauffourées ont opposé les manifestants aux forces de l'ordre, d'abord devant le commissariat de police, avant de s'étendre à toute la ville. «Pas de justice, pas de paix», scandaient les manifestants en colère. Débordés, les policiers locaux ont reçu des renforts de la Garde nationale et du FBI. Ciblés par des tirs, ils ont riposté à coups de gaz lacrymogènes, matraques et grenades aveuglantes, pendant que dans certaines rues se déroulaient de véritables batailles rangées au cœur de cette banlieue de Saint-Louis, sillonnée par des véhicules blindés. Excédés et révulsés par le verdict, les manifestants sont restés sourds aux appels au calme lancés un peu plus tôt par le président Obama et la famille Brown. Dans son message, Barack Obama avait pourtant pris soin de mettre en garde contre la tentation de «dissimuler les problèmes» liés au racisme aux Etats-Unis. «Dans trop de régions du pays, il existe une profonde défiance entre les forces de l'ordre et les communautés de couleur», a-t-il souligné. La famille du jeune Michael Brown s'est, quant à elle, dite «profondément déçue que le tueur de (leur) enfant ne soit pas confronté aux conséquences de ses actions». Après trois mois de délibérations, le procureur du comté de Saint-Louis a annoncé, en effet, lundi soir, que l'agent de police, Darren Wilson, ne serait pas inculpé, le jury ayant considéré qu'il avait agi en état de légitime défense après une «altercation». «Il n'y a pas de doute que l'agent Wilson a causé la mort de Michael Brown», a déclaré à la presse le procureur Robert McCulloch, parlant de «décès tragique». «Les douze jurés, neuf Blancs et trois Noirs, qui ont mené une instruction complète et profonde, ont, a-t-il ajouté toutefois, déterminé qu'il n'y a pas de raisons suffisantes pour intenter des poursuites contre l'officier Wilson». «Le devoir d'un grand jury est de séparer les faits de la fiction», a-t-il insisté, rappelant que les jurés avaient entendu une soixantaine de témoins 70 heures durant, examiné des centaines de photos et d'éléments à charge et écouté trois médecins légistes. Pour donner la possibilité à l'opinion publique de se faire sa propre idée du dossier, le procureur Robert McCulloch a annoncé que la quasi-totalité des éléments examinés par les jurés seront publiés. Comme pour le message du président Obama, l'annonce de Robert McCulloch n'a eu aucun effet. Entre la justice américaine et la communauté noire, la confiance n'existe plus. La fracture raciale qui touche les Afro-Américains est même très ancienne. L'administration n'a rien fait pour la combler. La mort de Michael Brown, en août dernier, n'a ainsi fait que raviver le débat sur l'attitude des forces de l'ordre et les relations raciales aux Etats-Unis, douze ans après l'affaire Rodney King et les émeutes qui avaient embrasé Los Angeles, après l'acquittement de quatre policiers blancs filmés en train de passer à tabac un automobiliste noir.