Le gouvernement a tenu hier, sous la présidence du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, un conseil interministériel dédié à la préparation de l'ordre du jour du Conseil du gouvernement qui aura lieu mercredi prochain, comme nous l'avons mentionné dans nos précédentes éditions, en vue d'un cadrage budgétaire du plan quinquennal 2015-2019. Nous apprenons qu'avant de rencontrer le Premier ministre, les membres du gouvernement ont tenu, en début de semaine, des réunions de préparation pour tenter de ficeler, au niveau de leurs départements respectifs, une budgétisation beaucoup moins ambitieuse que prévue pour le lancement des projets inscrits dans les différents secteurs de l'économie nationale, dans le cadre du prochain plan quinquennal. La baisse des prix du pétrole et ses conséquences sur les recettes d'exportations du pays ont finalement eu raison de l'optimisme du gouvernement, qui tente de réajuster sa stratégie et de revoir à la baisse ses projections d'investissement et de financement des différentes infrastructures. Il s'agira notamment de mieux ficeler la dotation des projets tout en tentant de limiter les dégâts au niveau social, en préservant au maximum les projets ayant une forte résonance auprès de la population, comme c'est le cas pour le programme de logements que le président Bouteflika a demandé de garder intact. Dimanche, le ministre de l'Habitat, de l'Urbanisme et de la Ville, Abdelmadjid Tebboune, a d'ailleurs déclaré à partir de Constantine qu'«aucun mètre carré du programme d'habitat prévu dans le cadre du programme quinquennal 2015-2019 ne sera touché à cause des fluctuations actuelles des marchés pétroliers». Ceci dit, le ministre de l'Habitat tout autant que ses collègues du gouvernement tentent de tranquilliser l'opinion publique (autant qu'ils le peuvent) dans leurs déclarations, mais en réalité l'inquiétude s'est bel et bien installée au sein des cabinets des départements ministériels chargés de trouver, en quelques jours, le juste milieu entre la préservation des projets phares du programme du gouvernement pour les années à venir tout en éliminant toutes les dépenses jugées superflues. Le temps des vaches maigres Après des années fastes, le temps des vaches maigres qui s'annonce est difficilement gérable par une équipe gouvernementale habituée à mettre en œuvre des programmes largement alimentés par les recettes confortables du prix du pétrole. Une abondance qui a, par ailleurs, encouragé la gabegie et alimenté les réseaux de la corruption qui se sont nourris, par exemple, de projets grandioses tel celui de l'autoroute Est-Ouest, qui a englouti des sommes faramineuses et dont les différents tronçons ont été réévalués plusieurs fois, faute d'avoir fait l'objet de maturation en amont et de contrôle. Le gouvernement est ainsi obligé, à quelques jours de l'adoption solennelle du plan quinquennal, de faire des arbitrages et des choix avant de proposer une liste de coupes budgétaires indispensables au vu de la baisse abrupte des prix du pétrole qui risque de s'installer durablement sur une tendance baissière. Il est à rappeler que l'arbitrage final se fera lors du Conseil des ministres dédié à l'adoption du plan quinquennal 2015-2019, et qui doit se tenir avant la fin de l'année. Le gouverneur de la Banque d'Algérie est intervenu, hier, dans le débat sur les risques encourus par l'Algérie suite à la chute des cours du pétrole, qui se maintiennent à peine au-dessus de 60 dollars le baril, perdant 40% de leur valeur en quelques semaines. Mohamed Laksaci a ainsi d'ores et déjà mis en garde le gouvernement contre les conséquences de la persistance de la baisse des cours du pétrole sur la capacité financière de l'Algérie à résister aux chocs. Présentant hier un rapport sur les tendances financières et économiques du pays devant les membres de l'Assemblée populaire nationale (APN), le gouverneur de la banque d'Algérie a estimé que «les réserves de changes actuelles permettent à l'Algérie de faire face aux chocs sur la balance des paiements extérieurs à court terme, mais cette capacité à résister aux chocs se dissipera vite si les cours du pétrole restaient longtemps à des niveaux bas». Un avertissement qui s'ajoute à ceux d'autres personnalités averties de l'économie, au plan national et international, et qui résument la vulnérabilité du pays aux chocs externes. Le gouvernement est sommé de trouver la parade et d'ajuster le plus rapidement possible sa stratégie en vue de faire face à la situation critique qui s'annonce.