Pour comprendre la crise financière actuelle, conséquence de la chute du prix du pétrole, Abderrahmane Hadj-Nacer, ancien gouverneur de la Banque centrale d'Algérie, auteur et docteur en sciences économiques, est remonté jusqu'aux années 1980, pour indiquer que «le problème dans ce pays, c'est que quand les technocrates ressentent une crise, le système politique ne suit pas. Il y a une incapacité anticipative et de réaction par rapport à ces anticipations des technocrates qui de plus, n'acceptent pas l'idée qu'il y ait là une crise fondamentale», a-t-il dit lors d'une conférence-débat organisée hier à Tizi Ouzou par l'Institut international de management (Insim), en collaboration avec la librairie Frantz Fanon. «Nous sommes à la veille de grands changements dans le monde et même chez nous», avertit le conférencier qui estime que «l'économie est un mode de réflexion presque honteux chez nous. Je considère que l'Algérie est un catalogue de décisions qui n'auraient jamais dues être prises. C'est comme si c'était un catalogue d'antiéconomie. J'imagine un jour qu'on pourra enseigner dans le monde comment échouer», a-t-il regretté, avant d'expliquer que le FMI est une «institution non pas technique, mais de rapports de force qui correspondent à un rapport international», et d'ajouter que le FMI est un instrument de contrôle entre les mains des Etats-Unis d'Amérique et que ce pays peut faire ce qu'il veut, soutient-il, avant de préciser qu'il n'accuse pas ce pays d'être «impérialiste» mais que plutôt le problème est algérien. «C'est l'administration française – qui est colonisateur de l'Algérie – qui décide du sort du pays, quand bien même, ajoute le conférencier, l'Algérie fait partie des 22 pays du comité intérimaire du FMI, cependant, est-elle pour autant en dehors des nations en soumission», s'est interrogé M. Hadj-Nacer. Le conférencier rappelle ensuite que le Trésor français, qui est «tuteur de l'Algérie», intervient pour dire que «tout va bien» avant de préconiser au pays de s'endetter d'avantage auprès du FMI. «L'Administration française s'est opposée à notre programme de rééchelonnement de la dette de 89-90, mais pas à l'équipe gouvernementale», se rappelle-t-il et d'ajouter qu'à ce moment-là, le programme s'adaptait au système en place. «La situation actuelle de l'Algérie n'a rien à voir avec celle des années 1980» car, explique le conférencier, «les institutions fonctionnaient. Des projections se faisaient chaque 5 ans et il y avait de la réflexion», à travers notamment l'Institution de stratégie globale, dont les décisions se tiennent avec toutes les autres institutions, où «il y avait un équilibre entre les sphères de décisions : politiques, économiques, militaires, etc.», soutient l'orateur et de regretter qu'aujourd'hui «on a cassé le mode de fonctionnement institutionnel» vue le manque de légitimité du pouvoir en place.