Le solde du Fonds de régulation des recettes (FRR) devrait accuser un repli, pour la deuxième année consécutive, sous l'effet du recours massif à ses avoirs pour combler le déficit budgétaire. Face au spectre de la crise, le gouvernement s'emmêle les pinceaux. Lors de son passage à la commission des affaires économiques et financières du Conseil de la nation, le ministre des Finances, Mohamed Djellab, a laissé entendre que le calcul de la situation budgétaire actuelle contraint le gouvernement à changer son fusil d'épaule en matière de dépenses. L'Exécutif, qui avait mis la politique des subventions et l'investissement public au cœur de ses priorités sociales et économiques, est rattrapé par la fragilité de ses choix face aux chocs externes. Le ministre des Finances fait remarquer, en substance, qu'il n'est plus tenable de défendre des choix budgétivores et peu productifs. Sur le plan social, le grand argentier du pays recommande de rompre avec la médecine gratuite et forcer les «mauvais payeurs» des OPGI, du fisc, de Sonelgaz et de la Seaal à mettre la main à la poche. Il est question ainsi de redonner au service public son aspect économique et commercial. La nouvelle doctrine budgétaire du gouvernement, ajustée au gré des circonstances déprimantes, préconise de réorienter les subventions, «progressivement, aux couches défavorisées». «Viendra le jour où nous devrons rationaliser l'intervention sociale du gouvernement», tonne Mohamed Djellab. Son discours au Sénat annonce, du moins théoriquement, la fin du soutien à l'investissement public par le recours aux avoirs du Trésor. En décodé, «toutes les entreprises économiques publiques vont financer leurs investissements (lorsqu'ils sont importants) à travers le marché obligataire». Epouvanté par la raréfaction des ressources en ces temps de dégringolade des cours de pétrole sur les marchés, le gouvernement veut faire contribuer l'épargne bancaire et le marché financier au financement de l'économie. En clair, le gouvernement veut accorder un sursis au Trésor, trop affaibli par le déficit chronique de ces dernières années, si ce n'était le concours budgétaire du Fonds de régulation des recettes (FRR). De toute façon, le premier argentier du pays avait juste oublié de dire que le gouvernement n'a plus aucun choix face à une crise qui se révèle aussi ravageuse que celle de 2008. Une façon de prévenir aussi les populations et les habituer à de longues séances de thérapie de foule. D'autant plus que les indicateurs macroéconomiques du pays vont en s'affaiblissant. En décembre dernier, le Fonds monétaire international (FMI) avait mis en garde contre une chute des prix du brut qui entraînerait le premier déficit courant du pays depuis 15 ans. Ainsi, il est attendu que le déficit budgétaire se creuse à plus de 6% en raison de la diminution des recettes des hydrocarbures, d'une nette augmentation des dépenses en capital et du maintien d'un niveau élevé de dépenses courantes. Le solde du FRR devrait accuser un repli, pour la deuxième année consécutive, sous l'effet du recours massif à ses avoirs pour combler le déficit budgétaire. Les ressources du FRR se sont contractées à 4773,51 milliards de dinars à fin juin 2014 contre 5238,80 milliards de dinars à fin 2013. Une chute prolongée des cours du pétrole brut épongerait davantage d'épargne stockée dans cette caisse. Mais pas seulement. Les réserves de change connaîtraient une chute importante sous l'effet du recul des prix du pétrole. Elles se sont contractées à 184 milliards de dollars à fin 2014, marquant ainsi une baisse de 10 milliards de dollars en quelques mois seulement. Une plongée de longue durée des cours du brut entraînerait également une baisse importante du PIB (jusqu'à 30 milliards de dollars), un recul sensible des recettes de la fiscalité pétrolière et des revenus de la fiscalité ordinaire. C'est dans un contexte de déséquilibre économique et de crise que surgiront ensuite le retour de l'inflation et la hausse du chômage. Le dinar connaîtrait ses pires moments cette année, selon certaines prévisions qui parlent d'une action de la Banque d'Algérie visant l'atténuation des effets du choc pétrolier. Le risque de voir la dégringolade des prix du pétrole s'inscrire dans la durée n'est pas inévitable. Les cours ne réagissent même plus aux prévisions optimistes de l'OPEP et de l'AIE, encore moins aux pronostics des institutions de Bretton Woods.