Le Front des forces socialistes (FFS) a fini par rallier à son initiative de conférence nationale l'ex-parti unique. Le secrétaire général du FLN, Amar Saadani, a «enfin» donné son accord pour participer à la conférence prévue les 23 et 24 février prochain, mais non sans poser ses propres conditions. «Nous avons confirmé que notre participation sera réelle, mais s'agissant des institutions en place, de la présidence de la République aux assemblées locales, elles ne feront pas l'objet de discussion, c'est la ligne rouge», a conditionné Saadani. Le FFS n'y voit pas d'inconvénient et son premier secrétaire national, Mohamed Nebbou, juge «important» la présence du FLN à sa conférence. M. Saadani n'a pas manqué de préciser que sa participation a été confirmée après que le FFS ait accepté de ne pas mettre sur la table la question de la légitimité du pouvoir. Rejetée par la majeure partie de l'opposition – la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD) et le Pôle du changement – l'initiative du FFS trouve ainsi un écho favorable, essentiellement chez les partis qui évoluent dans le giron du pouvoir. Pour le moment, même les alliés traditionnels du vieux parti d'opposition ne se sont pas exprimés en faveur de la conférence nationale, se contentant de recevoir les émissaires du FFS. C'est le cas de Mouloud Hamrouche qui, lui aussi, milite pour la reconstruction d'un «nouveau consensus national» en vue d'un changement de la nature d'un régime «à bout de souffle». En lançant son initiative en solo, le FFS a pris le risque de s'isoler, alors qu'une autre initiative plus large a vu le jour. Sa prise de langue avec les partis du pouvoir en manque de crédibilité lui a valu une volée de bois vert. Des tirs groupés allant jusqu'à lui reprocher une «proximité» inédite avec le pouvoir.En ne donnant pas un contenu, un objectif et un agenda clairs – le FFS parle de feuille blanche – l'initiative du parti de Mohamed Nebbou s'expose à un échec avant même sa tenue. Le risque est-il calculé ? Le parti se défend en tout cas d'avoir abandonné le camp de l'opposition. «Le FFS appartient toujours au camp de l'opposition», répètent à l'envi ses différents dirigeants pour qui la priorité est de «retrouver la confiance, redonner de l'espoir dans la société» en vue d'un consensus national. Refusant de recevoir des leçons de la part des «nouveaux convertis à l'opposition».Mais force est de relever que les revendications centrales du plus vieux parti d'opposition, comme l'élection d'une constituante, ont disparu de son vocabulaire.Sa rhétorique de critique radicale a laissé place à un discours conciliant avec tous. Ainsi, la question s'impose de savoir si le FFS compte défendre toujours cette idée qui a fondé son existence même ? Le FFS qui a longtemps porté le combat démocratique en résistant à la normalisation autoritaire court le risque de voir son initiative galvaudée et servir l'agenda d'un pouvoir en fin de parcours et qui s'emploie vaille que vaille à reprendre pied.Changement tactique ou renoncement stratégique ? Les expériences passées montrent combien les décideurs excellent dans la récupération des initiatives politiques en les vidant de leur sens.Le FFS est le mieux placé pour le savoir et sait bien ce qu'il est advenu de l'idée de la réconciliation nationale, alors qu'il en fut le précurseur. En organisant sa conférence nationale sans préalable et surtout sans ordre du jour, l'initiative prend ce risque. En partant avec une feuille blanche, le Front des forces socialistes peut être doublé à sa droite par des partis du pouvoir qui s'annoncent majoritaires à «la conférence du consensus».