L' hôpital Mustapha Bacha se lance le défi de la transplantation d'organes, notamment le rein, à partir de donneurs en mort encéphalique. C'est devant une administration déterminée à gagner le pari, avec bien sûr l'engagement et le savoir-faire de toute une équipe médicale, que le projet est actuellement en intense préparation. «Tout est là, il suffit juste de s'y mettre. Nous avons les compétences nécessaires, les équipements qu'il faut et les structures adéquates, et bien sûr l'autorisation du ministère de la Santé. La volonté y est aussi», se plaît à dire M. Bar, le directeur général de l'hôpital . Une première étape du travail est déjà entamée avec la création d'un comité de greffe rénale regroupant les principaux responsables impliqués dans cette activité. Il a pour mission de coordonner et développer l'activité de greffe rénale au niveau du CHU. Deux coordinations sont aussi mises sur pied pour mener à terme ce projet. «Nous avons dégagé cette année 30 milliards de centimes uniquement pour la greffe d'organes et de tissus», se félicite M. Bar, avant de signaler qu'un programme est déjà tracé, avec l'objectif de réaliser 150 greffes de rein par an (entre donneurs vivants apparentés et à partir de morts encéphaliques) et 80 greffes de la cornée. Un programme ambitieux qui mérite d'être encouragé par les autorités de la Santé. Le plan de travail consiste donc à mettre en place ces deux coordinations présidées par le Pr Benhalima Malika, chef de service d'immunologie, et le Pr Hadoum Farid, chef de service d'urologie néphrologie, qui sont déjà à pied d'œuvre pour mettre en place les mécanismes, les préalables et réunir toutes les conditions pour lancer cette activité tant attendue depuis plusieurs années. Il est d'abord essentiel, selon le Pr Benhalima, de mettre en place un plan d'action pour le redressement et le développement de la greffe rénale à partir de donneurs vivants apparentés, comme il est indispensable d'introduire de manière effective la greffe à partir de donneurs en mort encéphalique, qui prendra en charge 70 à 80% des patients pour faire face à l'augmentation du nombre d'insuffisants rénaux chroniques en phase terminale. «Il est nécessaire d'opter pour une démarche réfléchie et d'éviter toute précipitation qui peut nous écarter de l'objectif qu'on s'est tracé», a-t-elle insisté, et d'ajouter : «Le prélèvement d'un rein sur une personne décédée se déroulant dans un contexte d'urgence nécessiterait la mise en route, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, d'un processus devant conduire dans un délai le plus bref possible à la greffe pour le greffon proposé.» Les activités de prélèvement et de transplantation imposeraient donc une logistique performante, une compétence, une technicité et la coopération d'une équipe multidisciplinaire. Sans oublier la préparation des citoyens pour adhérer à ce nouveau traitement, et enfin la mise en place d'une entité nationale pour piloter l'ensemble du dispositif. La réunion de l'ensemble de ces conditions permettra d'envisager la réalisation de la greffe à partir du donneur décédé d'une manière continue et durable et avec le succès souhaité. Néanmoins, en interne, et afin d'éviter de perdre du temps, le CHU Mustapha se doit dès maintenant de se préparer pour le lancement de ce type de greffe. Se voulant pragmatique, le Pr Benhalima se refuse à se lancer dans l'aventure les yeux fermés, car pour elle une action d'une telle envergure exige des préalables et des prérequis, lesquels se résument à la révision de la réglementation pour mieux encadrer toutes les étapes du processus depuis le prélèvement jusqu'à la greffe, de manière à respecter la volonté du donneur et protéger le patient et les structures médicales ; l'établissement des normes standards pour la pratique de cette activité et la création d'une base de données nationale, entre autres la liste d'attente des receveurs est actuellement en cours au CHU. Une tâche à laquelle s'attelle justement le Pr Benhalima et son équipe, qui signalent qu'il y a un travail qui doit être effectué en amont. «Inscrire un patient sur la liste d'attente pour la transplantation rénale correspond à un travail très minutieux qui est primordial pour étudier tous les éléments afin de prévenir le rejet de la greffe et s'assurer des paramètres essentiels et éviter les complications. C'est un travail qui doit être effectué sur les dossiers immunologiques de chaque patient et la décision est donc collégiale à travers une équipe pluridisciplinaire», a-t-elle précisé, et de rappeler que le besoin en termes de transplantation est calculé en fonction de la liste d'attente et non pas de l'incidence. Le Pr Benhalima a également tenu à souligner : n'est pas préleveur et transplanteur qui veut. Elle estime que cette activité ne peut avoir lieu que dans un établissement qui dispose au préalable d'un personnel dédié au prélèvement qualifié, correctement formé, d'infrastructures, de locaux, de matériels et logistique suffisamment dimensionnés pour effectuer avec efficacité les prélèvements, les règles de bonnes pratiques et d'une organisation adaptée au prélèvement d'un ou plusieurs organes dans le respect des règles éthiques et de sécurité sanitaires des organes. Comme elle recommande la mise en place d'une coordination hospitalière qui sera chargée du bon déroulement de la procédure de prélèvement, du diagnostic de la mort encéphalique et la restitution du corps à la famille. Laquelle coordination sera sous l'autorité de la direction générale de l'hôpital.