Les Somaliens sont devenus indésirables au Kenya après la tragédie de Garissa. Le gouvernement kényan dit avoir donné trois mois à l'Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR) pour rapatrier les centaines de milliers de réfugiés somaliens du camp de Dadaab. «Nous avons demandé au HCR de déménager les réfugiés (somaliens) sous trois mois, faute de quoi nous le ferons nous-mêmes», a déclaré samedi, lors d'une visite en province, le vice-président kényan, William Ruto, cité dans un communiqué. M. Ruto a lié son exigence à l'attaque qui a fait 148 morts, dont 142 étudiants, à l'université de Garissa le 2 avril, revendiquée par les terroristes somaliens shebab. «Nous devons sécuriser le pays, quel qu'en soit le coût», a-t-il lancé. «Le Kenya va changer après Garissa, comme les Etats-Unis ont changé après le 11 septembre», a ajouté le responsable kényan, sans autre détail. Des responsables kényans avaient déjà demandé la fermeture de Dadaab et le rapatriement de ses pensionnaires après l'attaque par les shebab du centre commercial Westgate de Nairobi en septembre 2013 (au moins 67 morts), affirmant que le site servait de «camp d'entraînement» aux terroristes. M. Ruto a aussi affirmé qu'avait été commencée la construction d'un mur longeant les 700 km de frontière avec la Somalie, censé empêcher l'infiltration des shebab en territoire kényan, où ils ont multiplié les attaques meurtrières depuis l'entrée de l'armée kényane en Somalie pour les combattre, fin 2011. Quid de la position du HCR ? Un porte-parole de l'agence onusienne à Nairobi, Emmanuel Nyabera, a assuré qu'il n'avait «reçu aucune (...) demande formelle du gouvernement kényan à ce sujet», et souligné que «le Kenya a l'obligation légale de protéger les réfugiés et cela inclut de ne pas les rapatrier de force dans leur pays d'origine». Selon le HCR, le Kenya accueille quelque 450 000 réfugiés somaliens, pour l'essentiel hébergés dans le tentaculaire complexe de camps de Dadaab, le plus vaste au monde, ouvert en 1991 dans l'est du Kenya. Human Rights Watch a, de son côté, estimé hier que contraindre les réfugiés somaliens au retour serait «illégal». «Au lieu de faire des réfugiés des boucs émissaires, le Kenya — légalement obligé de les protéger jusqu'à ce qu'ils puissent rentrer chez eux en toute sécurité —devrait identifier et poursuivre les responsables du massacre de Garissa», a estimé Leslie Lefkow, vice-directrice Afrique de Human Rights Watch.