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Point de vue : Pour des capitales culturelles qui enrichissent la personnalité algérienne
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Publié dans El Watan le 16 - 04 - 2015

La décision de Lounis Aït Mengeullet et de Idir de boycotter l'événement «Constantine capitale de la culture arabe» est lourde de sens. Elle interpelle aussi bien le gouvernement que la classe politique et la société civile. A cet effet, elle ne doit pas être sous-estimée ni traitée à la légère comme le font «quelques plumes» et forces de la discorde nationale, aussi bien au nom d'un arabisme funeste que d'un berbérisme chauvin.
Exprimant un profond malaise identitaire qui n'arrive pas à s'apaiser, formulant un mécontentement quant à la prise en charge de notre culture nationale dans sa dimension amazighe, Aït Menguellet et Idir posent le problème de la politique culturelle du pays dans sa relation avec les aspirations de la population et ses attentes.
Dépasser les désaccords
En ce moment politique sensible, la problématique installée par les deux symboles de la chanson amazighe, dont la notoriété dépasse largement les frontières, est d'une importance capitale. Pour cette raison, elle doit être pensée dans une perspective de dépassement des désaccords exprimés et non pas dans celle de leur aggravation. A juste titre d'ailleurs, il faut rappeler que la crise nationale est fondamentalement identitaire et culturelle et qu'elle le demeurera tant que le pouvoir hésite à doter le pays d'une politique culturelle algérienne, ouverte sur l'universalité.
Ouvrir le débat sur la question culturelle
L'événement qu'abritera Constantine à partir de ce mois d'avril et la position exprimée par Aït Menguellet et Idir offrent aux intellectuels et hommes politiques l'opportunité de débattre de la question culturelle dans la perspective de l'élaboration d'une politique consensuelle et inclusive. C'est dans cette perspective que chacun doit sortir de ses retranchements et s'ouvrir sur l'autre afin de définir un avenir de solidarité et de liberté. Quelle culture pour l'Algérie ? Quels sont les objectifs que doit viser la politique culturelle à adopter ? Comment peut-elle concilier l'Algérien avec ses fondamentaux et lui permettre de reprendre confiance en lui-même et en son pays ?
Nécessaires clarifications
Dans l'attente de l'entame de ce débat inévitable et afin de permettre d'en esquisser les contours, le ministère de la Culture doit clarifier la nature de ces capitales : sont-elles des capitales culturelles ou des capitales idéologiques ? Visent-elles à consolider le capital culturel du pays et l'enrichir ou sont-elles des moments de prestiges passagers sans effets féconds sur la matrice civilisationnelle nationale ?
Participent-elles d'un projet d'ensemble qui fait de l'organisation des «capitales culturelles» un outil de renforcement de toutes les dimensions de notre identité et qui nous permet une ouverture sereine sur le monde, ou visent-elles à assoir la domination d'une dimension sur les autres sans calculer les conséquences sur la cohésion nationale ? La refondation démocratique et pacifique de la nation exige une approche culturelle réaliste, généreuse et profondément humaine.
Pour une approche culturelle réaliste, généreuse et humaine
A cet effet, un travail de déconstruction/construction doit être entamé avec le soutien franc des institutions de la République. A l'avant-garde du projet, les élites doivent reprendre leur place et oser. Béjaïa capitale de la culture méditerranéenne ; Tamanrasset capitale de la culture africaine ; X ville capitale de la culture amazighe ! Tel est le projet que doit adopter l'Etat algérien pour renforcer le front interne et s'assurer des solidarités externes !
2020 sera l'année de la culture amazighe
Pour réussir une «capitale de la culture amazighe», le gouvernement doit se décider à admettre la nécessité d'un projet de promotion de tamazight à inclure dans le programme quinquennal 2015-2019 que votera prochainement l'Assemblée nationale. Ce projet de promotion doit être élaboré en concertation étroites avec les acteurs et spécialistes de la langue et de la culture amazighe, mais aussi, avec l'apport du mouvement associatif qui travaille dans ce domaine. Au bout du programme quinquennal 2015-2019, tamazight devra avoir son année de célébration et d'actions culturelles à la hauteur des ambitions du pays et du peuple algérien, mais aussi des peuples nord-africains.
L'Afrique aux Africains
C'est après l'adoption de cette stratégie que nous pourrons parler d'une vision culturelle qui mobilise toutes les énergies sans en exclure aucune. A ce moment-là, je suis certain que Aït Menguellet et Idir seront heureux d'être à Constantine et de rencontrer des amis irakiens, libanais et autres, auxquels ils raconteront l'histoire mythique de l'antique Cirta et de son Aguellid Massnssen qui, un jour, a tracé notre ligne de conduite historique : l'Afrique aux Africains, un mot d'ordre qui légitime, aujourd'hui, la politique étrangère de l'Etat algérien et guide les pas des enfants de ce pays sur lequel veille le sacrifice des martyrs.


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