Le très sérieux journal parisien Le Monde, quotidien de référence, titre sur cinq colonnes à la une : «Les jupes longues des musulmanes, nouvelle fracture à l'école». La pleine page consacrée à «l'événement» est titrée en gras : «Crispation à l'école sur les jupes longues». L'affaire est-elle si grave ? Quels sont donc les faits ? Une jeune collégienne, prénommé Sarah, a été empêchée de pénétrer dans son établissement scolaire, à Charleville-Mézières (Ardennes, frontière belge), deux jours : les 16 et 25 avril. L'objet de la sanction disciplinaire serait la longueur de sa jupe noire, «dont le caractère religieux est manifeste». Selon le journal L'Ardennais, la principale de l'école a fait un mot aux parents pour leur demander de «faire rectifier la tenue vestimentaire de la jeune fille si vous souhaitez qu'elle poursuive sa scolarité au collège». Aussitôt, tous les médias, écrits ou télévisés, les réseaux sociaux (avec un hashtag très fréquenté sur twitter sous le nom "# je portemajupecommejeveux" se sont emparés avec délice et moquerie de ce non-sujet pour en faire le dernier feuilleton du mois d'avril, un feuilleton d'autant plus dérisoire que l'actualité était terrible avec notamment les milliers de morts suite au tremblement de terre au Népal. Chacun se moque d'une mesure étonnante qui n'a rien à voir avec la loi sur la laïcité à l'école qui interdit tout signe religieux, la fille concernée retirant son voile islamique en rentrant au collège. Des gens savants vont jusqu'à faire l'analyse de la règlementation qu'ils dissèquent doctement, sans voir que, selon l'académie de Reims, l'élève n'a pas été exclue pour manifestation ostensible d'une appartenance religieuse et que la jupe n'a pas été l'élément dominant de la sanction envers la jeune fille. Dans un communiqué l'administration parle ainsi d'«actions revendicatrices et concertées d'élèves, qui font suite à d'autres incidents plus visibles liés, par exemple au port du voile, le cadre laïque de l'enseignement doit être fermement rappelé et garanti». Citée par francetvinfo, l'académie précise que, quelques jours plus tôt, «quatre ou cinq élèves» se sont présentées voilées, vêtues d'une jupe similaire et qu'elles ont tenté de pénétrer dans le collège, d'où la réaction autoritaire de la direction de l'établissement, en vertu de la loi de 2004 et selon les principes de la charte de la laïcité affichée dans toutes les écoles de France. D'après l'académie, les adolescentes ont indiqué qu'elles portaient ce type de jupe et le voile qui l'accompagne, pour revendiquer leur appartenance religieuse, indique francetvinfo. On est donc loin d'une exclusion pour une question de jupe mais parce des jeunes musulmanes, par un acte militant, remettent en cause la loi sur l'interdiction du voile à l'école qu'elles vivent difficilement. La ministre de l'Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem, recadre ainsi le débat, précisant sur la radio RTL qu'«aucune élève ne peut être exclue en fonction de la longueur ou la couleur de sa jupe». Cependant, la ministre a précisé que «l'équipe pédagogique a fait preuve de discernement pour juger de l'attitude prosélyte non pas de la tenue mais du caractère de l'élève. Elle n'a pas été exclue, comme j'ai pu le lire, mais un dialogue a été ouvert avec la famille». Selon les associations musulmanes, ce type de problèmes a eu cours en plusieurs endroits, sans que les faits soient médiatisés.