Sollicité en tant que scénariste formateur de jeunes férus du 7ème art lors du festival national du cinéma et de la littérature au féminin, président du FDATIC (fonds de développement de l'art, de la technique et de l'industrie cinématographique), Boukella Tahar a bien voulu répondre sans ambages à toutes les questions d'El Watan. Quelle est votre appréciation sur ce festival qui est à sa deuxième édition ? Je pense que c'est un festival qui en est tout à fait à ses débuts, qui possède néanmoins un potentiel pour se faire un chemin comme tous les festivals algériens avec sa spécificité thématique. Saïda est une ville relativement peu médiatisée mais elle possède un riche potentiel artistique comme Hadjadj Belkacem, Bahloul Abdelkrim pour le cinéma, Cheb Mami et tant d'autres. Vous avez assuré la formation de jeunes cinéphiles au niveau de l'atelier consacré au scenario. Un mot sur ces jeunes. Il y a un potentiel réel de jeunes qui existe à Saïda. Il y a une forte motivation pour apprendre et faire du cinéma plus tard aux normes internationales. Quel est le rôle du fonds de développement de l'art, de la technique et de l'industrie cinématographique ? C'est la structure centrale, une commission qui est chargée de sélectionner les scenarios en vue des différentes formes d'aide à la production ou à l'écriture, et à la réécriture, ça veut dire concrètement qu'elle centralise les projets qui sollicitent une subvention de l'Etat. Il y a très peu de salles de cinéma… Le manque de salles: c'est le goulot d'étranglement du cinéma algérien. Actuellement, le cinéma algérien peine à démarrer réellement, maintenu en état de réanimation artificielle à coups de subventions étatiques sans retour dans les caisses de l'Etat. Avant, les films distribués en Algérie permettaient des rentrées d'argent à travers la billetterie qui était contrôlée et cet argent allait dans les caisses de l'Etat, ce qui permettait de produire des films. Maintenant, la réalité est tout autre. On entend, par ci par là, rénovation de salles, restauration, c'est toujours louable comme entreprise mais il est évident que ce n'est pas la solution. Il faut se lancer dans la construction de complexes cinématographiques à l'image des pays européens : il faut investir dans les multiplex. Y a-t-il suffisamment de budgets pour aider les jeunes cinéastes? Il n'y a jamais eu des problèmes d'argent, jamais de quotas, l'argent est disponible. Par contre, il y a problème, l'Etat ne finance pas l'intégralité du coût d'un film, c'est une aide, une subvention à la production, le producteur est tenu de trouver un complément de financement. Quelles sont les mesures à prendre pour relancer le cinéma dans notre pays? Il faut de la formation, il faut de la distribution si on n'a pas où vendre les films, à quoi ça sert de faire des films, on ne peut pas financer éternellement des films à perte tout en sachant qu'ils ne vont rien apporter. C'est un véritable goulot d'étranglement, c'est un suicide. Il viendra un jour où l'Algérie manquera d'argent et ne pourra plus financer ces films. Il y a très peu de films qui sont distribués à l'étranger, il y a des films médiocres. Ce n'est pas du mépris mais du réalisme et peu de cinéastes ont percé. Est-ce qu'il existe des scénarios qui sont censurés en raison de leur contenu? Il n'y a pas de censure au sens où l'on entend couramment. Qu'il y ait de l'autocensure, c'est très probable. Beaucoup s'autocensurent pour faire plaisir à des gens alors qu'on leur demande pas autant. On nous envoie des scénarios qui visiblement ne sont pas sincères, ce sont des gens qui se disent voila ce qui peut les intéresser.