Mes chers compatriotes, J'entamerai ce propos en vous présentant mes meilleurs vœux à l'occasion du mois de Ramadhan, priant le Seigneur Tout-Puissant d'accepter votre jeûne et vos prières et de pardonner les péchés de tous les croyants. Notre pays s'apprête à célébrer le 53e anniversaire du recouvrement de son indépendance. Cet événement est particulièrement important en soi, mais il prend un relief plus grand cette année, dédiée à la commémoration du 60e anniversaire du déclenchement de la glorieuse Révolution de Novembre. En cette occasion, je voudrais partager avec vous une halte de recueillement et de réflexion sur les sacrifices indicibles de notre peuple pour la restauration de sa liberté et de sa souveraineté, ainsi que sur les défis que l'Algérie se doit encore de relever pour le plein accomplissement du message de Novembre. Mes chers compatriotes, De toutes les dates commémoratives dans notre histoire contemporaine, le 5 Juillet se distingue parce qu'il est l'aboutissement de la longue lutte de notre peuple contre l'invasion et la domination coloniales. La résistance et les soulèvements répétés de nos ancêtres ont coûté à notre pays des millions de martyrs, tombés pour l'honneur et pour la liberté, face à une colonisation qui s'est attelée, durant plus d'un siècle, à la spoliation de nos terres, à la déportation de nos résistants, et à la marginalisation de notre culture. En un mot, la colonisation a fait de notre peuple «les damnés de la terre» comme l'a exprimé un illustre frère, compagnon de notre Révolution, le regretté docteur Frantz Fanon. C'est ce refus incessant de la domination étrangère qui aura été cristallisé par la glorieuse Révolution de Novembre, dans un sursaut national, mobilisant notre peuple partout à travers le pays et au sein de l'émigration. C'est le combat de l'Emir Abdelkader, de cheikh Ahaddad, de cheikh Bouamama et de tant d'autres patriotes, qui a été repris par l'Armée de libération nationale, avec comme tribut, notamment, un million et demi de martyrs. En ce jour commémoratif du retour de l'Algérie dans le concert des nations indépendantes, nous nous recueillons avec ferveur, à la mémoire des glorieux chouhada de la Révolution de Novembre. Nous saluons aussi la mémoire des vaillants moudjahidine qui nous ont quittés durant ces années d'indépendance, et nous rendons hommage à ceux des compagnons de lutte encore en vie, auxquels je souhaite santé et bonheur. Mes chers compatriotes, L'indépendance a ouvert la voie à la reconstruction de l'Algérie, un chantier qui interpelle sans cesse notre peuple, mais particulièrement la jeunesse, dont le 5 Juillet est également la Fête nationale. De fait, au lendemain de l'indépendance, le pays était exsangue, face à des défis énormes dont nous rappellerons, pour l'exemple, des centaines de milliers de familles de martyrs à prendre en charge, des centaines de milliers de citoyens sans demeure ni revenu, et des millions d'enfants à scolariser. Face à tout cela, l'Algérie était démunie de tout, et il suffit de rappeler qu'elle ne comptait alors que quelques centaines d'enseignants et quelques dizaines de médecins. Rappeler cela c'est souligner tout l'effort investi par notre vaillant peuple pour reconstruire la patrie. La reconstruction nationale menée pendant des décennies a connu d'importants succès mais aussi son lot d'insuffisances, des insuffisances ayant abouti à une asphyxie financière qui a généré une régression économique et sociale comme conséquence de l'ajustement structurel imposé par les créanciers de l'Algérie. De plus, notre pays sera confronté à des dérives qui, dans leur paroxysme, ont débouché sur la tragédie nationale. Dans cette tragédie véritable, le peuple algérien a su faire face, d'abord en combattant l'hydre du terrorisme, étrangère à notre culture et à nos valeurs, et nous nous recueillons, avec émotion, à la mémoire des martyrs du devoir national. Dans ce même combat, notre grand peuple est allé plus en avant encore, à travers son adhésion massive à la concorde civile puis à la réconciliation nationale, qui ont préservé notre pays de déchirements terribles. Mes chers compatriotes, Dans la paix civile rétablie et l'unité nationale confortée, nous nous sommes attelés ensemble à relancer la construction nationale. A ce titre, l'Algérie s'est libérée du fardeau de la dette extérieure et a engagé trois programmes quinquennaux massifs de développement ainsi que des programmes complémentaires en faveur des wilayas du Sud et des Hauts-Plateaux. Ces efforts ont été couronnés par de multiples réalisations, dont nous citerons la livraison, en seize années, de millions de logements, la construction de milliers d'écoles, collèges et lycées, l'extension du réseau universitaire à toutes les wilayas, l'ouverture de centaines de nouveaux hôpitaux, polycliniques et centres de santé, ainsi que le raccordement de localités mêmes isolées à l'eau potable, à l'électricité et au gaz naturel. En parallèle, les investissements publics et la relance économique ont fait reculer le chômage de près de 30% en 1999 à près de 10% l'année dernière. Le renouveau national a englobé aussi la consolidation des libertés et de la démocratie. De fait, les libertés individuelles et collectives ont enregistré des avancées incontestables, grâce aux réformes introduites dans le domaine de la justice, et l'Algérie s'honore de n'avoir aucun prisonnier politique ou d'opinion, ni aucun journaliste détenu pour délit de presse. Les champs politique et associatif comptent chacun des dizaines d'acteurs, s'exprimant et agissant tous sans contrainte, alors que l'espace médiatique connaît une diversité exceptionnelle. Les droits de la femme et son rôle ne cessent de se conforter dans différents domaines, éducatifs, professionnels et politiques. Le renouveau concerne aussi notre potentiel de défense nationale qui poursuit sa professionnalisation et consolide ses capacités et ses moyens, à la hauteur des exigences de la préservation de l'intégrité du territoire et de la protection de milliers de kilomètres de frontières terrestres, dans un environnement sous-régional instable, par le fait de foyers de tension, du terrorisme international, et des narcotrafiquants. Je saisis cette occasion pour exprimer ma considération aux officiers, sous-officiers, et djounoud de l'Armée nationale populaire, digne héritière de l'Armée de libération nationale, ainsi qu'aux cadres et personnels des services de sécurité. Au nom de la nation, je m'incline aussi avec ferveur, à la mémoire des martyrs du devoir national, dans les rangs de nos forces armées et des services de sécurité, qui se sont sacrifiés pour défaire le terrorisme abject et protéger les citoyens et leurs biens, et je salue leurs compagnons qui poursuivent courageusement ce combat. Je tiens également à dire notre reconnaissance aux unités de l'Armée nationale populaire qui, au niveau de nos frontières terrestres, veillent avec vigilance et abnégation à préserver l'Algérie, notamment du terrorisme international, dont la menace grave est de plus en plus évidente dans notre sous-région. Mes chers compatriotes, Il est légitime pour chaque peuple de faire une halte sur son parcours afin de relever les progrès qu'il a accomplis. En ce qui nous concerne, une telle halte doit être d'abord une source d'inspiration et de motivation, pour continuer la marche vers le progrès et le bien-être, et pour combler des retards certains. L'évocation des sacrifices de notre peuple ainsi que des progrès qu'il a concrétisés est nécessaire pour barrer la voie au pessimisme que peut nourrir un sort individuel encore difficile, ou que peut susciter le nihilisme politicien. En effet, il importe de dire que l'Algérie n'est pas un champ de prédilection de la corruption. Certes, ce fléau s'est malheureusement infiltré dans notre pays mais il est aussi combattu sévèrement avec le glaive de la loi. Que ceux qui en douteraient, prennent connaissance du rapport élaboré sur notre pays dans ce domaine, par l'instance des Nations unies chargée du suivi de la mise en œuvre de la Convention internationale pour la prévention et la lutte contre la corruption. Il importe de dire aussi que l'Algérie n'est pas et ne sera pas un espace d'injustice ou d'exclusion sociale, ces tares contre lesquelles le pays mobilise tous ses moyens. La politique publique de développement s'étend à toutes les contrées du pays, et les transferts sociaux à partir du budget de l'Etat sont d'un niveau incomparable dans le monde entier. Ce sont là quelques réalités parmi d'autres qui doivent être soulignées et dites pour nourrir la fierté légitime de notre peuple, et pour atténuer le poids de l'attente chez ceux de nos compatriotes dont des besoins fondamentaux n'ont pas encore été satisfaits. Oui, le développement national progressera encore, année après année. Les programmes publics de développement en cours permettront de répondre aux besoins de nos compatriotes en logement, en santé, ou en formation. La mobilisation des capacités économiques publiques et privées, conjuguées avec l'apport du partenariat extérieur, apporteront aussi des réponses à la demande d'emploi, dans tous les secteurs, à travers tout le pays et notamment au profit des jeunes. La consolidation de l'Etat de droit se poursuivra, au fil des réformes qui seront d'ailleurs confortées dans tous les domaines, par la révision de la Constitution, dont le projet est en phase de finalisation ultime. Mes chers compatriotes, L'Algérie est aujourd'hui confrontée à un effondrement des cours des hydrocarbures. Cela affecte les revenus extérieurs de l'Etat et nécessitera une rationalisation accrue dans la gestion des finances publiques, pour traverser cette perturbation économique mondiale. Mais, outre quelques réserves de changes accumulées, l'Algérie dispose d'un potentiel économique important à valoriser davantage, et dispose aussi d'une jeunesse formée, capable de relever les défis contemporains des technologies et de la compétitivité. Nous libérerons encore plus ces atouts des pesanteurs bureaucratiques et nous les mettrons également à l'abri des fléaux parasitaires de la fraude, laquelle coûte tant au Trésor public, et constitue le pire ennemi de l'investissement économique honnête. Notre potentiel de développement devra également être mis en valeur, loin des entraves dogmatiques. Le monde est riche en exemples de pays avec lesquels nous avons partagé certains référents idéologiques, et qui s'affirment aujourd'hui en puissances, adeptes de l'économie de marché, grâce à la mobilisation de leurs capacités nationales, publiques et privées, ainsi qu'au recours au partenariat étranger. Dans le même temps, la poursuite du développement et la valorisation accrue de nos capacités nécessitent un climat national de stabilité, ainsi que la sérénité des esprits et des cœurs. Il y a quelques années seulement, l'Algérie, son peuple et sa démocratie ont très chèrement payé le prix des discours populistes, de la démagogie et du défi à la loi. Tirons donc les leçons de ces amères expériences pour nourrir notre pluralisme politique, associatif et syndical, de joutes nobles autour de programmes alternatifs. En effet, le peuple algérien a besoin de connaître les propositions alternatives prétendant améliorer son devenir, et il saura ensuite choisir souverainement lors des rendez-vous électoraux de la République. C'est-là le message que j'adresse, en ce jour de communion nationale, à la classe politique du pays, et au premier chef, aux acteurs de l'opposition à laquelle j'exprime ma considération. En effet, dans le respect de la déontologie démocratique, l'opposition est dans son rôle, tout comme sera dans son rôle la majorité qui a porté mon programme durant la campagne électorale et à laquelle il revient de le promouvoir aujourd'hui dans le cadre du débat démocratique, pour semer l'espoir et pour soutenir l'effort. Mes chers compatriotes, Vous avez été nombreux à m'interpeller pour que je poursuive la mission dont vous m'aviez déjà honoré trois fois. J'ai répondu à cet appel, acceptant ce sacrifice, malgré ma condition physique actuelle pour laquelle je remercie Dieu, pensant aussi au sacrifice suprême consenti par mes valeureux compagnons tombés au champ d'honneur, dans les rangs de l'Armée de libération nationale. En ce qui me concerne, je m'attellerai à accomplir ce devoir avec l'aide de Dieu, conformément au mandat que m'a confié la majorité de notre peuple. Dans le même temps, en ce jour commémoratif des combats de nos ancêtres, des résistances et des triomphes de notre peuple, je vous appelle tous, mes chers compatriotes, dans la différence de vos convictions politiques, mais aussi dans votre unité de destin national, à unir nos forces et nos énergies, pour construire davantage l'Algérie notre Patrie, et la porter ainsi, année après année, génération après génération, au niveau de vos ambitions et de vos espérances, au niveau de l'idéal pour lequel sont morts nos glorieux martyrs.