Négocier des augmentations de salaires au profit de travailleurs d'entreprises qui n'ont même pas les moyens d'assurer à l'heure actuelle le paiement régulier de leurs employés, voilà un exercice particulièrement périlleux pour près de 420 EPE financièrement mal loties. En situation de faillite consommée (actif net négatif) ou irrémédiablement déstructurées au double plan économique et financier, ces entreprises appartenant pour la plupart aux branches sinistrées du BTPH, du textile, de l'agroalimentaire et du tourisme attendent depuis de longues années le traitement approprié que leur réserve le code de commerce (liquidation) ou une éventuelle recapitalisation dans le cas où l'Etat propriétaire décide de les sauver. Le gouvernement n'a malheureusement pris ni l'une ni l'autre de ces mesures, se contentant d'obliger à chaque fois que les syndicats montent au créneau, les banques publiques à payer les arriérés de salaires aux dizaines de milliers de travailleurs concernés. Le plus grave est que ces salaires sont payés à des employés qui n'ont même pas les moyens de produire ; les entreprises qui les emploient n'ayant pas les moyens d'acquérir les matières premières nécessaires au fonctionnement des moyens de production. C'est par conséquent une véritable rente sans contrepartie productive qui est versée à cette catégorie de travailleurs. Le déficit déjà très fort de ces entreprises se creuse d'année en année et l'Etat propriétaire ne peut se dérober à la prise en charge de leurs ardoises qu'il se doit d'assumer un jour ou l'autre creusant d'autant la dette intérieure du pays. La question est de savoir pourquoi les autorités algériennes persistent dans cette attitude ruineuse consistant à organiser périodiquement des mascarades de négociations avec des syndicats de branches totalement sinistrées, dont la plupart des entreprises insolvables et surendettées n'ont absolument rien à donner. Les décisions d'augmentation de salaires imposables à toutes les entreprises des branches concernées sans exception enfonceront à coup sûr les plus fragiles d'entre elles dans d'irrémédiables difficultés. Les patrons des SGP qui ne veulent pas prendre la responsabilité d'augmenter les salaires des travailleurs des branches d'activité sinistrées savent, chiffres à l'appui, à quel danger sont exposées les entreprises concernées si des hausses de salaires venaient à leur être consenties. Ils sont pourtant bien conscients que le gouvernement, sous la pression de l'UGTA, les contraindra à concéder des augmentations quand bien même ils y seraient opposés. Une source proche d'une SGP nous apprend que des augmentations seront octroyées aux travailleurs des EPE du BTPH dans une fourchette de 5 à 10% du salaire de base avec prise d'effet à compter du 1er juillet 2006, nonobstant les effets induits par une hausse du SMIG qui devrait, selon cette même source, atteindre 12 000 DA. Des augmentations qui causeront du tort aux entreprises beaucoup trop fragiles à ses yeux pour assimiler de telles hausses de salaires. La solution idoine, poursuit-il, aurait dû consister à laisser les syndicats d'entreprises négocier directement avec les cadres dirigeants concernés des possibilités d'augmentation de salaires, bilans comptables à l'appui. Beaucoup d'entre eux se rendraient alors compte que l'urgence devrait consister à sauver leurs entreprises de la faillite plutôt qu'à en exacerber les déséquilibres.