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«Une occasion pour apprendre à vivre en communauté élargie»
Mourad Kezzar. Expert en tourisme
Publié dans El Watan le 26 - 08 - 2015


Propos recueillis par
Kamel Benelkadi
Les colonies de vacances sont-elles en vogue comme dans un temps passé ?
Si l'on disposait d'un historique du phénomène, la réponse aurait été simple et argumentée par les chiffres. Toutefois, afin de cerner l'évolution du phénomène des colonies de vacances en Algérie, nous ne pouvons que remarquer les éléments suivants : aux origines, contemporaines, des colonies de vacances en Algérie, nous avons les sociétés nationales et l'administration publique.
Dans le contexte antérieur à 1986, nous avions le plein emploi, un tissu économique géré essentiellement sous le modèle de la GSE et où, dans le discours officiel la satisfaction des besoins des salariés passait avant la rentabilité et l'efficience.
Ainsi, l'entreprise économique et le ministère étaient eux-mêmes à la fois investisseurs, gestionnaires et clients de l'activité touristique destinée aux employés et leurs familles, et de colonies de vacances, en particulier.
Une fois cet aperçu historique donné, la réponse à votre question coule d'elle-même : les colonies de vacances ne sont plus en vogue, car le modèle qui les a portées n'est plus en vigueur. Toutefois, elles existent toujours, de moins en moins à cause du contexte algérien mais aussi à la tendance mondiale et où le phénomène, selon les spécialistes, n'est plus en vogue.
Peut-on les considérer comme un tourisme domestique ?
Votre question renvoie à une autre, celle de savoir si la colonie de vacances est un type de tourisme ou non. A mon sens, la réponse est franchement non, car l'hébergement, ici, n'est pas assuré usuellement dans une structure marchande.
Mais de nouvelles vagues de colonies de vacances arrivent, où l'organisateur n'est plus le comité d'entreprise ou la commission paritaire des œuvres sociales, mais l'agence de voyages, ou encore l'école de droit privé ; le moment est peut-être venu de revoir la définition de la pratique.
Certaines agences de voyages tentent de temps à autre d'organiser des colonies de vacances en direction des enfants des particuliers ici en Algérie ou à l'étranger. Le séjour est financé par les particuliers
Certaines colonies sont des séjours linguistiques, sportifs, thématiques et c'est l'une des nouvelles tendances du tourisme international en direction des jeunes et moins jeunes.
Nous rappelons juste que les agences de voyages qui sous-traitent pour le secteur de la jeunesse et des sports et autres administrations en charge de la solidarité nationale ne présentent pas un produit d'essence touristique. Elles agissent en délégation de prestation, pas plus.
Ainsi, les colonies de vacances animent le paysage touristique sans être un élément du marché touristique domestique.
Mais, dans une Algérie où les concepts et les formes sont souvent sacrifiés sur l'autel de la non-gestion de la chose publique, les colonies de vacances furent à un moment donné au cœur de l'activité touristique nationale.
On a assisté par le passé et à plusieurs reprises à des saisons estivales inaugurées par le ministre de la Jeunesse et des sports et non par le ministre du Tourisme.
Profitent-elles réellement aux jeunes ?
Oui, les colonies sont d'un grand apport pour les jeunes qui ont l'occasion d'en bénéficier. Juste que l'activité doit être réglementée. Quand l'improvisation politique ne s'en mêle pas, je suis certain que le secteur de la jeunesse en Algérie dispose d'un encadrement bien rodé et qualifié.
Pour les jeunes des grandes villes et de l'intérieur du pays, c'est une occasion de rompre avec leur milieu, d'améliorer leurs fréquentations, sortir, apprendre à vivre en communauté élargie, voire d'apprendre les bonnes manières. Sans colonies de vacances, les enfants du Grand Sud ne connaîtront jamais la mer ou même la ville avant le service national.
Leur prise en charge par les pouvoirs publics semble de plus en plus aléatoire vu qu'elles concernent particulièrement les franges défavorisées de la population...
Effectivement, car comme nous l'avons rapporté plus haut, la colonie de vacances en Algérie s'est toujours inscrite dans la démarche de l'Etat-providence. Une action sociale de l'Etat.
Le recul des outils d'intervention de l'Etat-providence dans la sphère socio-économique s'est accompagné automatiquement d'un autre recul, celui des colonies de vacances et des coopératives de consommation. Toutefois, le métier d'agence de voyages spécialisée dans les colonies de vacances peut se développer en ciblant la clientèle aisée.


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