Est-ce la dernière ligne droite pour les pourparlers de paix interlibyens ? C'est ce que pense l'émissaire de l'ONU pour la Libye, Bernardino Leon. L'ancien diplomate espagnol n'a d'ailleurs pas hésité, lors de la reprise des négociations jeudi au Maroc, à qualifier le nouveau round de «moment de vérité», estimant «incontournable» la date du 20 septembre pour signer un accord politique (date de la tenue de l'Assemblée générale de l'ONU, ndlr). «Nous entamons un nouveau round de discussions et nous espérons que ce sera le dernier, le moment de vérité», a indiqué M. Leon à Skhirat, au Maroc. Bernardino Leon parviendra-t-il maintenant à convaincre les différents belligérants à signer sans plus attendre un accord de paix ? Rien n'est moins sûr. Il a d'ailleurs adopté une attitude très prudente lors de sa rencontre avec la presse. «Nous ne sommes ni optimistes ni pessimistes, mais avons l'espoir que les parties sont conscientes que le délai du 20 septembre est incontournable et qu'elles feront passer les intérêts de la Libye et du peuple libyen avant leurs propres intérêts», a-t-il ajouté. La prudence de M. Leon s'explique par le fait que mercredi il n'était déjà pas certain que cette réunion de la dernière chance se tienne. Et pour cause, le Congrès général national (CGN), le Parlement siégeant à Tripoli, voulait d'abord voir ses exigences satisfaites avant de venir au Maroc. Cette instance avait conditionné notamment sa participation à ces discussions par une «réponse positive» aux amendements qu'elle a proposés à l'accord en négociation. Parmi les conditions du CGN figurent, entre autres, le respect du jugement de la Cour suprême basée à Tripoli ayant invalidé l'existence même du Parlement de Tobrouk et l'exclusion des «putschistes», en référence sans détour au général Khalifa Haftar, le chef militaire des troupes loyalistes. Le CGN avait, ajoute-t-on, longuement critiqué mardi l'émissaire des Nations unies, Bernardino Leon, pour «avoir rencontré des militaires et des miliciens à son insu». «Ce genre d'agissements est une atteinte grave à la souveraineté de l'Etat et un obstacle au dialogue», a réagi le président du CGN, Nouri Abousahmein, portant également le titre de commandant en chef des forces armées, dans une lettre adressée à M. Leon. Khalifa El Ghwell, le chef du gouvernement de Tripoli, a adressé une lettre au secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, pour accuser, à son tour aussi, l'émissaire de vouloir «briser les rangs des Libyens». La question est de savoir maintenant si Bernardino Leon et le Parlement de Tobrouk accepteront d'accéder aux desiderata du CGN de Tripoli. Quoi qu'il en soit, Bernardino Leon a fait savoir qu'il espérait d'abord obtenir, avant aujourd'hui, un consensus sur les annexes de l'accord pour pouvoir ensuite entamer les discussions sur les noms des futurs membres du gouvernement d'union nationale. Soutenue par les pays de la région, l'ONU s'efforce depuis de longs mois d'arracher aux Parlements de Tripoli et de Tobrouk un accord de paix afin de donner un semblant de stabilité à la Libye et extraire Syrte des griffes de l'Etat islamique.