La production halieutique enregistre ces jours-ci un record à Béjaïa avec des prises exceptionnelles qui ont fait retomber les prix du poisson à des bas niveaux et mis, en revanche, les pêcheurs devant une surproduction pénalisante. C'est du moins ce qui a été constaté au cours de cette dernière semaine. En sus de celle au sardinier, la pêche au chalut, suspendue pour une période de 4 mois, comme chaque année et pour toute la flottille exerçant en deçà de 3000 nautiques de la zone côtière algérienne, vient d'effectuer une de ses meilleures reprises sur les côtes béjaouies avec des rentrées à gros coups de filets. Une générosité de la mer que les marins pêcheurs disent n'avoir jamais eu à constater dans ces proportions sans pouvoir pour autant en discerner les véritables causes qui ne seraient peut-être pas étrangères au biotope. Sur le marché local, l'offre a explosé jusqu'à imposer des stocks d'invendus au côté d'une baisse sensible (conjoncturelle ?) des prix autant du poisson blanc, comme le rouget, cédé à moins de 300 DA/kg, que le poisson bleu, comme la sardine écoulée, à moins de 30 DA/kg contre un prix qui atteignait parfois les 140 DA. On a vendu comme on a pu et même « livré gratuitement à l'auberge des vieux », nous dit le président de la chambre de la pêche, Baziz Abd El Hak. Les invendus sont d'autant plus importants que ce trop-plein de caisses intervient à l'approche du mois de Ramadhan où habituellement l'on ne se bouscule pas devant les poissonniers. Réjouissant pour les consommateurs, le scénario ne l'est pas pour les pêcheurs pris au dépourvu d'une surproduction qu'ils n'ont pas l'habitude de gérer. A Béjaïa, la tendance a toujours été à la sous-exploitation avec une production annuelle qui tourne autour de 60 % du stock pêchable (5000 t). En l'absence des chiffres de la direction de la pêche, la production de sardine en cette rentrée halieutique tend à doubler, comparée à celle de la même période de l'année dernière, à en croire des pêcheurs qui donnent un rapport légèrement inférieur pour le poisson blanc. Au niveau du port de pêche, la concurrence a imposé des « ventes à pertes ». « La caisse de près de 25 kg de sardine a été cédée à 100 DA », affirme Hafid Bélaïd, directeur de la chambre de la pêche, qui souligne que les pêcheurs ont vu là l'urgence de s'organiser pour réguler le marché. A ce prix de gros, il est vrai que la sardine aurait pu être aisément proposée à moins de 10 DA/kg. Cela n'a pas été fait, sinon cela aurait été une bonne affaire inespérée pour le consommateur qui a trop souvent été tiré dans l'autre extrême qui a fait de la sardine un produit de luxe, hors de portée des petites bourses. Soit deux extrêmes qui confirment l'élasticité des prix et entre lesquels il faudra trouver une moyenne pondérée. En attendant, la baisse des prix amorcée ces jours-ci pourrait se poursuivre durant le mois de carême ou du moins reprendre, si toutefois elle venait à être interrompue parce que s'avérant n'être qu'une conséquence, à courte durée, d'une après-période de frais exceptionnellement productive.