L'éviction du débat national du spectre de la création d'un parti politique sur les restes de l'ex-AIS, suite aux mises en garde de niveau gouvernemental puis présidentiel, est accueillie avec soulagement au sein de l'opinion publique. La nouvelle OPA sur la République, ayant émané des résidus des maquis islamistes près d'un quart de siècle après la dissolution du FIS, avait consterné les milieux de la société civile ayant combattu et vaincu les hordes terroristes de la décennie noire. Cependant, après l'évacuation des lubies de Mezrag, le débat politique n'a pas pour autant gagné en décantation et en lisibilité. Quand c'est la prochaine réunion du comité central du FLN qui s'impose dans la chronique nationale, la déliquescence de la vie politique se rapproche dangereusement du syndrome de la sclérose. Une rentrée politique sous les auspices de Amar Saadani est une façon de clore le débat avant de l'entamer. Sa réaction après la restructuration des services de sécurité, notamment le DRS – une requête qui a servi de carburant politique pour le patron du FLN – ou la relance de l'idée d'un «front national» de soutien à un pouvoir en fin de règne ne peuvent constituer une amorce sérieuse du débat sur l'avenir du pays. Les péripéties internes de l'ex-parti unique, y compris la débauche d'énergie du groupe de frondeurs, obstruent les perspectives du pays plus qu'elles ne les entrouvrent. Il s'agit, en fait, de l'assassinat permanent du président Boudiaf qui, à son retour au pays en 1992 et en sa qualité de membre fondateur du FLN, déclarait qu'il était temps de remettre ce sigle au patrimoine historique collectif. Plus fort que le FLN, ce sont les voix du MALG qui reviennent cette semaine, à l'image de Daho Ould Kablia, en attendant, peut-être, la réapparition de son prédécesseur au ministère de l'Intérieur, le mémorable Zerhouni. Que nous apprendraient nos augustes octogénaires, pionniers des transmissions, à l'ère de la surveillance par satellite ? En plus d'enfoncer des portes ouvertes en rappelant les qualités de l'ex-patron du Département du renseignement – «loyauté, discrétion et attachement à la République» – lesquelles sont par ailleurs applicables à nombre de responsables militaires et subalternes, Ould Kablia dresse un sévère constat des mœurs politiques du pouvoir en place en soulignant le manque de démocratie et l'absence de transparence. Le commun des citoyens ne s'interroge pas si ces figures du passé ont aujourd'hui raison, mais reste perplexe devant la patience de ces personnalités qui attendent la retraite pour dénoncer les travers et les tares d'un système qui n'a pas changé de nature depuis l'été 1962. Nombre de mouvements démocratiques, dont celui du Printemps berbère, une décennie avant l'ouverture, dans le sang, au pluralisme politique, avaient besoin d'un soutien à l'intérieur du système. Leur lot était la prison du temps du parti unique, puis la répression et la surveillance policière après l'instauration du multipartisme. Aujourd'hui, c'est l'amnistie des terroristes qui pointe à l'horizon pour couronner les dix ans de «réconciliation nationale» et pas l'officialisation de tamazight qui consacrerait un combat de plusieurs décennies.