Le lendemain du drame, plusieurs manifestations spontanées ont été organisées par des citoyens pour dénoncer le crime abject et le climat d'insécurité qui règne dans la ville. La population de la ville de Magra, à 60 km à l'est de M'sila, est encore sous le choc du drame qui s'est déroulé samedi dernier. Une jeune femme a été froidement écrasée par une puissante voiture pour avoir refusé de céder aux avances de l'homme qui la harcelait dans la rue. Vers 8h, ce 7 novembre, Razika C., 39 ans, se rendait chez le dentiste pour se faire soigner une dent qui la faisait souffrir. Son frère Kamel, 38 ans, raconte : «Elle a demandé à venir avec moi pour se rendre chez le dentiste. Comme tous les fourgons de transport étaient bondés, nous avons été à pied. Un homme, celui qui allait l'agresser un peu plus tard, s'est arrêté et a offert de nous déposer à la station de bus, mais nous avons refusé et continué de marcher.» Ne trouvant pas de dentiste, car ne travaillant pas le samedi, Razika a décidé de se rendre à Berhoum, la ville la plus proche, toujours pour soigner sa dent. Son frère Kamel la quitte alors pour aller au marché. Selon les témoignages que nous avons recueillis, son agresseur est revenu à la charge, lui faisant d'autres avances. Devant le refus de la jeune femme, celui-ci devient agressif. Razika l'insulte et lui crache dessus. Il la frappe alors violemment au visage à coups de poing et la plaque contre le mur. Des passants s'interposent et tentent de raisonner l'agresseur qui fait mine de se calmer. Il monte dans sa voiture alors que Razika, étourdie, titubant et encore sous le choc, marche lentement le long de la route, probablement pour aller déposer plainte à la gendarmerie. Son agresseur fonce alors droit sur elle avec sa voiture de type Toyota Hilux. Le choc est tel que la malheureuse femme est projetée en l'air avant de retomber sur le capot et le pare-brise. Il descend de la voiture pour s'assurer de son état. «Ah, tu es encore vivante ?», aurait-il dit, selon des témoins oculaires. Il remonte dans sa voiture, enclenche la marche arrière et lui repasse dessus plusieurs fois sous le regard ahuri des passants et des automobilistes. La malheureuse Razika rendra l'âme sur place. Un fourgon J5 s'arrête pour l'évacuer aux urgences, où les médecins ne pourront que constater le décès. Son autre frère, Cherif Nassim, raconte : «Ma sœur a été tuée de sang-froid. C'est un homicide volontaire. Elle avait le visage et les yeux tuméfiés, les pieds gonflés et cassés, le dos cassé et la nuque éclatée.» Devant le domicile de la victime, la famille et les proches sont réunis sous une tente dressée dans la cour. La famille, très modeste, habite un petit immeuble dans une cité à la sortie de la ville de Magra, appelée El Haï Al Idari. Les citoyens continuent de défiler pour présenter leurs condoléances. Le choc et la consternation se lisent toujours sur les visages. Dimanche, lendemain du drame, plusieurs manifestations spontanées ont été organisées par des citoyens pour dénoncer le crime abject et le climat d'insécurité qui règne dans la ville. Les gens demandent également à ce que justice soit rendue. Ils exigent la loi du Talion. En fin d'après-midi, Razika, qui ne demandait qu'à vivre, a été enterrée au cimetière familial. Son agresseur, S. N., 33 ans, s'est rendu à la police peu de temps après avoir accompli son forfait. Les témoignages que nous avons recueillis sur place parlent d'un multirécidiviste qui a l'habitude de harceler les femmes. «Il est connu comme étant un ‘'haggar'' notoire, quelqu'un qui a l'habitude d'agresser les femmes», dit l'un des oncles de la victime. Les autorités de la ville se sont rendues au domicile de la victime pour présenter leurs condoléances à la famille et pour l'assurer que la justice suivra son cours normal. Des citoyens de la cité tiennent absolument à dénoncer le climat d'insécurité qui règne dans la ville. «Cela a poussé certains pères de famille à cloîtrer à la maison leurs filles pourtant brillantes. Plus d'une dizaine de filles ayant des moyennes au-dessus de 15 à l'école sont retenues à la maison. Allez donc voir ce qui se passe devant le lycée à chaque sortie des cours. C'est un rodéo, un défilé de voitures qui roulent à toute vitesse. En plus elles sont conduites par des gosses de riches inconscients», dit un voisin. D'autres agresseurs rôdent dans la ville.