Djelfa est une wilaya qui accuse plus de trente ans de retard sur le plan socioéconomique », ne cessait de dire le désormais ex-wali de Djelfa. Cette phrase - magique - servait en fait à couvrir les incompétences et les défaillances d'un exécutif dont le chef, Mohamed Addou, n'aura été d'aucun secours à cette wilaya réputée hospitalière et dont les budgets colossaux alloués à travers les différents fonds auraient pu, s'ils avaient été gérés sur la base de données scientifiques, l'extraire de la misère qui n'a fait que s'accroître ces dernières années. Pendant tout le mandat de l'ex-wali (affecté à Alger), le « paquet » a été mis sur la construction : de gros marchés pour des édifices somptueux (siège de la wilaya, institut islamique, cités universitaires, bibliothèque, maison de la culture, tribunal, etc.). Ces réalisations ont « englouti » des centaines, voire des milliers de milliards, sans pour autant résorber un taux de chômage évalué à plus de 40% étant donné que les entreprises de réalisation retenues dans d'autres wilayas venaient avec armes et bagages : de l'ingénieur au simple ouvrier, en passant par les équipements. De la poudre aux yeux Les citoyens qui s'étaient félicité de ces chantiers ont vite déchanté : ce n'était que de la poudre aux yeux. D'abord la zone industrielle était considérée parmi la meilleure du pays et au niveau de laquelle toutes les entreprises ont mis la clé sous le paillasson sans que le moindre effort soit consenti pour leur redressement. L'explication avancée par le wali est : « Les gens de Djelfa sont des éleveurs et je ne peux ni leur inculquer la mentalité d'investisseurs ni aller moi-même leur chercher les investissements. » Une situation de blocage perdure depuis les dernières élections au niveau d'une vingtaine de communes. Manifestations de colère, sit-in, retrait de confiance, fermeture des APC... ont secoué plus de la moitié du territoire de la wilaya sans que des solutions soient trouvées. Et les populations continuent de payer le prix du silence des autorités compétentes qui traduisent la situation par le fait que le tribalisme est encore ancré dans la région et que, par conséquent, la politique de la sourde oreille sert à préserver la stabilité des APC. Le secteur de l'éducation croule sous les classements en dernière position à l'échelle nationale à cause des résultats des examens de fin d'année. La santé se meurt et les scandales qui ont éclaboussé le secteur dernièrement en disent long sur sa gestion. Ces deux secteurs, stratégiques, n'ont bénéficié d'aucune attention particulière de la part du premier responsable de la wilaya. Comme il n'a été accordé aucune importance aux secteurs de l'agriculture, du transport, des forêts et du tourisme. Deux jeunes se sont immolés par le feu et sont morts parce que leurs voix, qui dénonçaient la hogra et l'injustice, n'ont pas été entendues. Aucun citoyen et aucun représentant de la société civile ou notable de cette ville ne peuvent se vanter d'avoir bénéficié d'une audience auprès du wali. Le cas Ghoul Le chef de cabinet du wali, contesté, fait la pluie et jamais le beau temps. Le rôle de la cellule de communication, gérée directement par le chef de cabinet, semble consister à aligner les journalistes. Beaucoup de correspondants de presse ont été condamnés à des peines de prison avec sursis et à de fortes amendes, histoire de les mettre en garde sur ce qui peut leur arriver s'ils continuent de rapporter des vérités dérangeantes. Le cas de Hafnaoui Ghoul est édifiant : 9 mois de prison ferme pour avoir « diffamé » le wali et son exécutif. Après l'annonce du mouvement dans le corps des walis, celui de Djelfa a fêté, en grande pompe, sa promotion en tant que wali d'Alger, loin des cris de détresse des milliers de citoyens qui se sont soulevés pour dénoncer la misère et la hogra.