Le ministre des Finances a tenu, mardi soir, à répondre aux accusations lancées par l'opposition tout lors des débats ayant émaillé l'examen puis l'adoption de la loi de finances 2016. Dans une interview accordée à la chaîne de télévision privée Echorouk News, Abderrahmane Benkhalfa a tenté d'expliquer et de justifier les mesures les plus contestées contenues dans la loi de finances 2016, en reprenant les grandes lignes d'un discours qui devient quelque peu répétitif et parfois même contradictoire. C'est ainsi que le ministre se targuera en premier lieu de la «libre expression» existant dans notre pays, ayant permis un débat contradictoire sur la loi de finances, mettant ainsi les incidents ayant émaillé le vote de la loi et l'action de l'opposition au sein du Parlement sur le compte de cette belle «démocratie existant dans notre pays». Abordant par la suite les articles de «la discorde», M. Benkhalfa tentera un exercice pédagogique pour expliquer les objectifs des articles 66 et 71 de la loi de finances 2016. Rappelons dans ce sens que l'article 66 relatif à l'ouverture du capital des entreprises publiques au privé national résidant avait été abrogé par la commission des finances et du budget de l'APN, avant d'être réintroduit par le truchement d'un amendement oral du gouvernement voté en dernière instance par la plénière. Vivement contesté, l'article en question renforce, selon le propos de M. Benkhalfa, «la protection des entreprises publiques économiques». Il ajoutera que la LF 2016 «renforce aussi bien la règle des 51/49% que la protection des entreprises publiques». Se faisant plus précis, le premier argentier du pays explique que par cette disposition, «personne ne peut entrer dans le capital d'une entreprise publique au-delà de 34%. Ce n'est qu'après 5 ans, lorsqu'il (le repreneur privé, ndlr) a rempli les conditions du cahier des charges, à savoir le maintien des effectifs, l'augmentation des recrutements, permettre à l'entreprise de gagner de l'argent, d'exporter, celui-ci peut reprendre les parts sociales restantes, mais d'abord après passage au Conseil des participations de l'Etat». Pour M. Benkhalfa, «plusieurs verrous sont instaurés par la loi : la minorité agissante de 34%, les 5 ans, le cahier des charges à remplir et le passage par le gouvernement. Nous sommes le seul pays qui a pris autant de mesures de protection». Le ministre, qui présente cette mesure comme étant «novatrice», n'explique pourtant pas pourquoi le gouvernement s'évertue à sortir de son ancrage juridique cette disposition existant dans le code des investissements depuis 2009 pour en faire une disposition financière. De même, il évitera de répondre aux accusations quant à la volonté du gouvernement d'opérer une nouvelle opération de privatisation au bénéfice d'une minorité d'investisseurs.Il réussira même à replacer le débat dans sa zone de confort. En effet, le premier argentier du pays insistera, tout au long de son intervention, sur la nécessité d'impliquer le secteur privé dans la création de valeur ajoutée. Il a, dans ce sens, expliqué que l'Algérie dispose de «2 à 3 ans d'épargne, mais qui ne l'épargnera pas» de la crise. D'où la nécessité de «traiter» la conjoncture et d'aborder les politiques économiques «avec de nouveaux outils». Et pour cela, le ministre a insisté sur «l'efficience, le travail et la productivité», en affirmant qu'aucun pays au monde ne compte sur un secteur économique public. Des questions qui rassemblent d'ailleurs le consensus. Maintien des subventions, mais… C'est de la même manière que le ministre des Finances abordera la question de l'article 71 de la LF 2016, qui permet au gouvernement de prendre des décrets d'ajustement pour l'annulation de crédits préalablement votés dans le cadre d'une loi de finances lorsque les équilibres budgétaires sont compromis. Il expliquera, dans ce sens, que les plafonds votés par le Parlement seront respectés et qu'ils s'agit, au final, de faire en sorte de collecter les ressources au profit de projets prioritaires et nécessaires. Le ministre expliquera aussi que le gouvernement a rendu compte de l'exécution du budget chaque année dans le cadre de la loi de règlement budgétaire. Il faut cependant préciser que celle-ci présentée en n-3, soit trois après la clôture de l'exercice concerné. Le ministre s'empressera de dire aussi que le gouvernement a déjà eu recours au gel de certains projets non prioritaires. Une affirmation qui jette d'ailleurs le discrédit sur l'opportunité de l'article 71… Abordant enfin le sujet des subventions, le ministre a insisté sur leur maintien. Il explique une nouvelle fois que les subventions seront maintenues et qu'«il n'y aura aucune baisse des subventions». M. Benkhalfa a affirmé que dans le cadre de la loi de finances 2016, près de 19 milliards de dollars seront consacrés aux subventions. Il en profitera pour dire que par l'enveloppe consacrée aux transferts sociaux, l'Etat ne prend donc pas de virage libéral. Le ministre estime, cependant, que les subventions devront être mieux ciblées. Dans ce sens, M. Benkhalfa a affirmé que dans le cadre de la LF 2016, les subventions aux produits alimentaires de base, à la santé, à l'éducation et à l'eau entre autres profiteront aux couches sociales les plus défavorisées. Reste le cas de l'énergie et des carburants, qui connaîtront des augmentations graduelles des prix, justifiées, selon le ministre, par la nécessité de mettre fin au gaspillage et à la contrebande. Il ne s'attardera toutefois pas sur les compensations financières à accorder aux ménages défavorisés et aux secteurs de l'agriculture et des transports, comme préalablement annoncé au Parlement.