Les autorités monétaires du pays viennent d'opérer un autre tour de vis dans le processus de création des établissements financiers et bancaires à capitaux privés. Ebranlées par la banqueroute d'El Khalifa Bank, qui a viré au scandale national, dont les contrecoups se font encore ressentir aujourd'hui, les autorités ont mis au point une réglementation extrêmement sévère, censée décourager tous les faussaires. En effet, le Conseil de la monnaie et du crédit (CMC) vient d'adopter un règlement relatif aux conditions de constitution d'une banque ou d'un établissement financier ainsi qu'aux critères d'installation de succursales bancaires en Algérie. Ce que souligne un communiqué du CMC rendu public hier. Il faut noter d'emblée que c'est la deuxième fois que les autorités procèdent au durcissement de la réglementation en matière de création des établissements financiers privés. Il faut savoir que le cadre réglementaire a été fixé par l'ordonnance du 26 août 2003 relative à la monnaie et au crédit, promulguée au lendemain de l'éclatement du scandale El Khalifa. Le conseil de la monnaie et le crédit explique d'ailleurs ce nouveau dispositif par le souci de « compléter la mise en conformité du cadre réglementaire en vigueur ». L'objectif recherché étant de « l'émergence d'un système bancaire moderne qui réponde aux besoins de l'économie nationale ». Le CMC assure dans cette perspective que ce règlement « reprend à son compte les principes fondamentaux universels applicables en matière d'autorisation et d'agrément de banques et d'établissements financiers et d'installation de succursales bancaires ». Il s'agit donc d'une sorte de mise à niveau par rapport à « l'esprit des 25 principes du comité de Bâle » qui élargit le contrôle des banques en phase d'agrément, en mettant l'accent sur la qualité de l'actionnariat, ses capacités financières, son professionnalisme ainsi que la qualité du management. Le CMC vise également via ce nouveau mécanisme à créer les conditions pour « consolider la santé financière du système bancaire et assurer sa sécurité à travers le renforcement des conditions d'accès à la profession bancaire ». Bien qu'il ne soit pas dit, le scandale El Khalifa plane sur tout l'exposé des motifs avancés par le CMC. Renforcement du processus de contrôle et professionnalisation du métier de banquier sont autant de freins destinés à imposer de nouvelles règles du jeu. « Toute nouvelle demande d'agrément doit être examinée selon un cadre légal et réglementaire transparent et rigoureux et ce, afin de garantir l'installation de banques de qualité et de préserver le système bancaire. » Voilà qui confirme de façon claire les vraies motivations ayant présidé au renforcement drastique du mécanisme réglementaire régissant les banques. Au-delà de la sacro-sainte règle prudentielle que les autorités monétaires se doivent d'observer conformément aux normes internationales en la matière, le Conseil de la monnaie et du crédit a sans doute adossé son dispositif à la crainte d'un autre scandale qui achèverait la crédibilité des institutions financières algériennes et, partant, donnerait un coup d'arrêt à l'investissement étranger si frileux à ce genre d'impondérables. C'est dans cette veine également que la Banque d'Algérie impose, depuis mars 2004, aux banques un capital minimum de 2,5 milliards de dinars et 500 millions de dinars pour les établissements financiers, annulant ainsi la réglementation de 1993. Et comme pour rendre le système bancaire le plus étanche possible et éviter les scandales à répétition, les banques sont sommées de libérer totalement leur capital dès leur constitution. Mais, question : l'Algérie est-elle désormais définitivement à l'abri d'un El Khalifa bis ? Rien n'est moins sûr.