Le Groupe des 19-4 ne lâche pas l'affaire et maintient la pression. Les violentes attaques à la limite du lynchage dont certains de ses animateurs font l'objet ne semblent pas entamer leur détermination. Après une réunion tenue avant-hier pour faire «le point de la situation», les camarades de Zohra Drif-Bitat donneront une conférence de presse dimanche prochain pour «clarifier un certain nombre de points liés à leur démarche». Le Groupe des 19-4 estime que la lettre adressée au chef de l'Etat qui, jusque-là, est restée sans réponse a été «faussement et délibérément interprétée par certains individus qui se réclament du Président». Le Groupe des 19 devenu 15, suite à la défection de quatre signataires, persiste dans sa demande de rencontrer le chef de l'Etat près de deux mois après l'avoir saisi officiellement. «Il n'y a pas d'autre étape de notre démarche comme certains acteurs politiques veulent le faire croire. Notre démarche est claire, nous voulons rencontrer le Président et lui faire part de notre préoccupation», a précisé Khalida Toumi, une des signataires de la lettre. Comme ses camarades, elle estime que la démarche a rendu «fous ceux qui font un faux-barrage au courrier adressé au chef de l'Etat. Je ne parle pas de barrage mais bel et bien d'un faux, dès lors que le fonctionnement institutionnel n'est plus de mise». Il est certain que la sollicitation d'une audience du chef de l'Etat par le Groupe des 19-4 a mis dans l'embarras total l'entourage du Président, ce qui explique la brutalité de la réponse de Saadani et consorts. Aux attaques personnelles d'une rare violence, s'en est suivie et de manière méthodique une campagne politico-médiatique faisant croire que derrière la démarche se cache une «manipulation» qui serait «l'œuvre de l'ex-patron du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), le général Toufik». Le but recherché est de jeter le discrédit sur une démarche qui a réussi à piéger les nombreux locataires d'El Mouradia. Cependant, la campagne de persécution n'a pas pu intimider les ami(es) de Louisa Hanoune. Habituée aux combats politiques violents, cette dernière est résolue à mener bataille. Après le déluge d'attaques personnelles et touchant même sa famille, elle a fougueusement réagi en interpellant ceux qui seraient les commanditaires et mis en garde contre «des attitudes irresponsables qui peuvent provoquer la colère des Algériens». Par ailleurs, Abdelaziz Bouteflika, qui reçoit régulièrement des «invités» étrangers, n'a pas daigné répondre à la demande d'audience des Algériens dont certains sont connus pour être proches de lui et d'autres parmi les anciens combattants de la guerre de Libération nationale, alors qu'il a reçu un jeune prince saoudien prétendument président d'une association caritative. «C'est horrible que de voir le Président recevoir ce jeune prince», tance Mme Hanoune. Il est évident que son état de santé vacillante rend difficile sa capacité de tout contrôler, Bouteflika ignore-t-il ou non la demande des dix-neuf personnalités parmi lesquelles figurent ses partisans ? Il est connu que l'homme ne cède pas sous la pression. Prendra-t-il alors le temps nécessaire pour se résoudre enfin à les recevoir ? Rien n'est moins sûr. En tout cas, les signataires de la lettre estiment que tant que Bouteflika ne s'est pas exprimé de manière claire, «ceux qui parlent en son nom ne sont pas habilités à le faire». «Nous ne voulons pas d'intermédiaire», ne cessent-ils de marteler. Rupture avec Bouteflika ? Le Groupe des 19-4, qui estime que des décisions politiques et économiques lourdes sont en «contradiction avec les engagements du chef de l'Etat», refuse jusque-là d'impliquer la responsabilité directe de Bouteflika qui s'apprête à signer la très controversée loi de finances 2016. Les parlementaires, soutenus par les signataires de la lettre qui font campagne pour faire avorter cette loi, vont devoir «affronter» directement le président de la République qui apposera sa signature avant la fin de l'année sur la loi de finances, dès lors qu'il endossera officiellement la responsabilité politique. Le Groupe des 19-4 espère voir le Président «geler au moins les articles les plus controversés», mais ce n'est pas évident. Les compagnons de Zohra Drif-Bitat seront-ils alors amenés à rompre définitivement avec le Président qui n'aura pas entendu leur cri d'alerte ? «A ce moment-là, que chacun assumera sa responsabilité», émet Louisa Hanoune. l va sans dire que Bouteflika et ses partisans ouvriront un autre front «hostile» au moment même où le Président aura besoin de soutien pour faire passer le projet de révision constitutionnelle. Assurément, le nouvel an sera explosif politiquement. Entrée en vigueur d'une loi de finances aux accents d'austérité et adoption d'une nouvelle Constitution dans un contexte social tendu et un climat politique polarisé.