Une révision consensuelle de la Constitution.» C'était le vœu du président Bouteflika exprimé à l'occasion de sa prestation de serment pour un quatrième mandat, en mai 2014. Ce souhait ne se réalise visiblement pas. Et pour cause, l'avant-projet de révision de la Constitution, rendu public mardi dernier, ne fait pas l'unanimité au sein de la classe politique nationale. Le débat engagé autour de la mouture présentée par le chef de cabinet de la Présidence, Ahmed Ouyahia, confirme, on ne peut plus clair, l'absence du «consensus» autour de ce projet. Au contraire, ce texte fait l'objet, ces derniers jours, d'une salve de critiques acerbes de différents acteurs politiques. Et même des responsables des partis au pouvoir s'y mettent. C'est le cas, notamment, du secrétaire général du FLN, Amar Saadani. Revendiquant «la paternité» de la majorité des amendements proposés dans la mouture finale du texte, le chef du FLN critique, cependant, certaines de ces dispositions, dont celle contenue dans l'article 51 qui stipule que «la nationalité algérienne exclusive est requise pour l'accès aux hautes responsabilités de l'Etat et aux fonctions politiques». Cette exigence n'est pas du goût du patron du FLN qui semble avoir pris connaissance du contenu de cet avant-projet au même moment que tous les Algériens. «L'Algérie a traversé une période difficile qui a provoqué un départ massif de ses cadres et de ses compétences à l'étranger. Nous avons des cadres (binationaux) compétents dans plusieurs domaines (…) qui souhaitent participer au développement du pays. Cet article les empêche de le faire. Nous demandons son amendement», a-t-il lancé lors d'une conférence animée mercredi dernier. «Le mal de consensus» dont souffre ce projet du président Bouteflika est, surtout, illustré par les multiples réactions des principaux partis de l'opposition. Décortiquant le contenu de cet avant-projet, les formations politiques de l'opposition, dont celles ayant pris part aux dernières consultations menées par Ahmed Ouyahia, relèvent «des incohérences», des «aberrations» et «du bricolage». En effet, le texte divise la classe politique nationale. Même les dispositions considérées comme des avancées sont critiquées, à l'image de l'officialisation de la langue amazighe et le retour à la limitation des mandats présidentiels. Les dernières réactions sur le sujet sont celles du Parti des travailleurs (PT) et du FJD de Abdallah Djaballah. Ces deux partis, malgré la divergence idéologique sur la base de laquelle ils ont construit leurs critiques du projet, ont rejoint les premiers responsables politiques ayant réagi dès la révélation du contenu de la future révision constitutionnelle, notamment sur le maintien «du même régime présidentialiste». «Il faut arrêter la mascarade», soutiennent le PT et le FJD. Le président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), Abderrazak Makri, estime, pour sa part, que «cette Constitution n'est ni consensuelle ni porteuse de réformes et n'exprime que les orientations du président de la République et de ceux qui l'entourent». En tout cas, les positions des différents responsables politiques sont un prélude à l'adoption de ce texte par, seulement, des partis aux pouvoirs majoritaires au Parlement. Ainsi, au lieu de consensus espéré, le pays risque de s'embourber dans le «dissensus».