L'organisation du marché de gros pose problème en raison de l'informel, omniprésent. Le grand et florissant marché de Semmar, qui alimente la plupart des wilayas du pays est enfin dans la ligne de mire des pouvoirs publics. L'annonce a été faite par le ministre du Commerce, Bakhti Belaïb, lors d'une intervention sur les ondes de la Radio nationale. Brassant des sommes collossales, ce marché informel, qui a fait couler beaucoup d'encre, sera délocalisé, car les autorités compétentes semblent bien décidées à éradiquer l'informel pour l'intégrer dans le giron du formel. En effet, cette poche de l'économie cause un important manque à gagner au Trésor public. Dans ce faubourg est de la capitale où plus de 800 commerces informels emploient environ 20 000 travailleurs, la pratique commerciale a toujours été exercée de manière frauduleuse et a toujours échappé aux inspections des services de contrôle et du fisc. Un commerçant a même confirmé que «lorsqu'on pressent la visite d'un contrôleur du fisc, on passe rapidement le mot à des guetteurs et on ferme». Cette initiative de délocalisation revêt d'un double intérêt, à savoir les contrôles fiscaux et commerciaux, n'a pas été fortuitement décidée par les politiques. Force est de constater que ce marché n'est soumis à aucune norme. Le négoce est pratiqué en porte-à-faux avec la réglementation et les produits sont stockés dans des conditions rudimentaires dans des dépôts aux murs nus et au sol en béton, dépourvus de chambres froides et autres commodités. L'extérieur illustre une image des plus dégradantes. Les voitures qui y convergent ainsi que les camions de gros tonnage, obstruent les artères de cette commune, engendrant une pollution sonore et cela, en dépit d'un arrêté du ministère des Transports, qui interdit l'accès aux camions de gros tonnage. Quid de la délocalisation ? Toutefois, si cette décision émanant du ministère du Commerce est irrévocable, il n'en demeure pas moins que le problème de la délocalisation constitue un pari fou pour les pouvoirs publics, qui ont émis un ultimatum de deux mois pour l'éradication. Pour certains observateurs, les pouvoirs publics mettent «la charrue avant les bœufs». De l'avis du coordinateur de l'Union nationale des commerçants et artisans algériens (UNCAA), «les allégations du ministre du Commerce sont à prendre avec des pincettes». «La délocalisation ne saurat se faire, car le choix d'un autre site d'accueil dans la capitale, comme annoncé, est quasi impossible, ce qui complique cette initiative», ajoute Hadj Tahar Boulenouar. Et d'ajouter : «Selon des sources de l'APW d'Alger, aucune assiette foncière n'est disposée à accueillir la délocalisation qui exige au minimum 20 hectares.» Par ailleurs, M. Boulenouar a précisé que l'initiative subira indubitablement les aléas bureaucratiques qui entraveront la démarche. «Les commençants illégaux font pression sur l'administration. Les gens qui exercent dans l'illégalité la plus totale, épaulés par les propriétaires des locaux, ne veulent pas que l'activité soit assainie et les opérateurs délocalisés vers d'autres marchés mieux organisés, dans un circuit légal». M. Boulenouar a remis sur le tapis la question liée au sort des marchés réalisés à El Harrach et Kharrouba (Boumerdès) destinés à accueillir les commerçants de Semmar. «La décision du ministre de choisir un autre terrain dans la capitale est incompréhensible, étant donné que des projets ont été réalisés à coups de milliards de dinars. Cette décision est aux antipodes de la politique de restriction budgétaire adoptée par le gouvernement», dénonce-t-il. «Le marché réalisé à Kharrouba, dans la wilaya de Boumerdès, est terminé à 60%. Il est implanté sur une superficie de 17 hectares et compte 549 locaux pourvus de toutes les commodités. L'on se demande pourquoi n'est-il pas occupé», ajoute le coordinateur. Hakim Laribi, le représentant de l'Association des distributeurs de Kharrouba (ADK) a tenu à s'exprimer : «Nous souhaiterions convier le ministre du Commerce pour parler de la question d'intégration des commerçants de Semmar dans la structure réalisée à Boumerdès.» Et d'ajouter : «Si les commerçants du marché de Semmar sont délocalisés ici, nous, les 200 commerçants, sommes prêts à intégrer le nouveau marché dès demain.» En somme, les pouvoirs publics sont confrontés à une tâche qui n'est pas de tout repos, un tonneau des Danaïdes. Donc waït and see.