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Feuilles de tabac
Roman «comment j'ai fumé tous mes livres»
Publié dans El Watan le 23 - 01 - 2016

Fatma-Zohra Zamoum est née le 19 janvier 1967 à Bordj Menaïel. Elle a plusieurs cordes à son arc, car elle est cinéaste, écrivaine, productrice et scénariste. Mais les gens la connaissent surtout pour ses films.
Et sa formation de base comme réalisatrice, elle l'a acquise à l'université de la Sorbonne. Elle a commencé par faire des courts-métrages qui ont été remarqués lors de grands festivals comme Un peu de cœur dans la pierre, à Carthage en 2001.
Elle passe après au documentaire, comme celui consacré à l'écrivain sénégalais Sembène Ousmane, Le docker noir, en 2005. Puis, elle réalise son premier long métrage en 2011, Kedach tehbni (Combien tu m'aimes), un film très émouvant sur l'enfance et la transmission. Dans toutes ses œuvres cinématographiques, on sent un désir de parler de la vie des gens avec générosité.
Et dans sa deuxième vocation, qui est l'écriture de romans, on retrouve cette propension à raconter la vie des autres ou sa vie, mais sous toute réserve. En effet, chaque auteur essaie d'innover à sa manière dans la façon de fictionnaliser un parcours ou les fragments d'une vie. L'angle d'attaque est toujours surprenant et c'est ce qui rend le roman attirant et renouvelle le genre. Il permet aussi au roman de se singulariser par sa trame et son imaginaire comme on le voit chez Fatma-Zohra Zamoum à travers son roman Comment j'ai fumé tous mes livres.
Dès l'entame, on constate que la narratrice ne se prend pas au sérieux par son côté nonchalant, insouciant et une écriture jubilatoire. Elle donne l'impression d'évoluer dans un univers absurde, ne présentant aucun intérêt malgré qu'il soit peuplé de livres. L'écrit et le papier adoucissent les choses et toutes les tensions. La narratrice n'entretient aucun mystère sur son métier, elle ne veut pas faire durer le plaisir du suspense.
Elle cherche l'efficacité comme toutes les femmes modernes. On découvre que c'est une ancienne attachée de presse ayant exercé dans le monde l'édition, métier qui consiste à être dans la quête permanente d'un papier dithyrambique sur un écrivain capricieux au talent incertain. Et comme elle a un regard critique et corrosif sur son métier, un beau jour elle décide de claquer la porte sans crier gare et donne une nouvelle orientation à sa vie professionnelle.
Elle a été usée par tous ces auteurs narcissiques et insupportables, sans oublier le monde impitoyable de la promotion à courir après des chroniqueurs toujours insatisfaits et grincheux. Sans grande conviction, elle atterrit dans l'univers des télé-démarcheurs qui doivent convaincre des clients à distance pour souscrire à des assurances et/ou acheter différents produits dont ils n'ont vraiment pas besoin. Cet énorme marché de dupes sur réseaux, complètement déshumanisé, aggrave les situations d'exploitation et de servitude.
Ce secteur spécial des centres d'appels favorise et accélère par ailleurs l'effacement de l'identité qui se perd et se dilue dans l'anonymat général. Elle laisse place à une sorte de robot-humain prescripteur et tentateur qui doit être performant coûte que coûte.
C'est à partir de là qu'elle constate que ses revenus ont baissé et ses loisirs aussi. Mais elle fait tout pour satisfaire son addiction au tabac, un produit très onéreux pour son maigre budget. Rapidement, elle trouve l'astuce en décidant de vendre ses livres : d'où l'expression «fumer des livres». Mais ce n'est pas de gaieté de cœur qu'elle le fait, car chaque livre à une âme et une histoire.
Ainsi, cela lui donne l'occasion de faire partager avec les lecteurs ses coups de cœur, comme cette passion qu'elle voue à Sir Conan Doyle et le polar en général. L'auteur qui a créé Sherlock Holmes lui permet de rêver de Londres, d'avoir des détails très caractéristiques sur les vêtements, les objets, les mœurs et la construction des personnages. Et elle regrette amèrement que tout cela parte en fumée.
Cette démarche un peu bizarre donne lieu à une réflexion très pertinente sur le consumérisme dans la société moderne. L'auteure réactive l'idée du troc qui fait rencontrer des gens et échanger autour des objets les plus insolites. Avec cette interrogation lancinante : peut-on tout échanger ? Quelle est la valeur des choses que l'on possède ? Est-ce que tout est éphémère ? C'est aussi une manière de dire que le sacré tend à disparaître au profit des choses les plus banales.
Le roman traite aussi des relations humaines et de leur caractère instable, car elles aussi se consument avec le temps comme les cigarettes. La narratrice est consciente qu'il est difficile pour elle d'inscrire une relation amoureuse dans la durée, conséquence d'un fonctionnement atypique en rapport à la possession. Mais sa rencontre avec le bouquiniste qui lui achète ses livres la bouleverse dans le sens où elle commence à envisager une complicité durable. Comme si elle voulait retrouver à travers lui un peu de ses livres perdus et consumés.
La narratrice montre tout au long du roman qu'elle attache beaucoup d'importance à sa liberté et à sa solitude. Fatma- Zohra Zamoum banalise l'idée qu'on peut fumer ses livres, mais les souvenirs qu'on en garde sont à jamais gravés dans nos âmes. Ce roman est un vibrant hommage aux livres et un éloge de l'écrit dans une ère qui veut le dématérialiser pour l'anéantir dans l'essence de sa poésie.

Fatma-Zohra Zamoum, Comment j'ai fumé tous mes livres. Ed. Chihab, Alger, 2015.


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