Aux cours des 15 dernières années, les investissements financés par le budget de l'Etat ont été majoritaires. Ils ont représenté plus des 3/4 des investissements réalisés entre 2000 et 2008, contre 25% réalisés par le secteur privé (voir graphe). Dans le programme présidentiel quinquennal 2010-2014, quelque 40% des ressources étaient réservées au développement des infrastructures de base. Pour l'année en cours, les dépenses d'équipement prévues dépassent les 3000 milliards de dinars, mais le gouvernement a prévu d'amputer de plus de 50% par rapport à 2015 les autorisations de programmes. En cette période de crise et de baisse de capacité de financement du Trésor, faire appel aux banques de la place, aux marchés financiers internationaux, au concours des gouvernements étrangers ou aux institutions financières multilatérales pour financer de gros investissements sont toutes des options à envisager en théorie mais non sans conséquences, selon les avis des économistes. Le gouvernement a déjà avoué vouloir diversifier les sources de financement des projets de développement, notamment à travers le recours au marché financier pour alléger la pression sur le budget de l'Etat. Sur le plan domestique, le marché obligataire, la privatisation des entreprises publiques par la bourse ou l'ouverture aux particuliers du marché des valeurs du Trésor permettraient à l'Etat non seulement de récolter directement des ressources supplémentaires, mais aussi de débarrasser le Trésor de la charge des créances bancaires détenues sur les entreprises publiques qui constituait au fil des années un poste de dépenses important. Les banques qui ont longtemps été en surliquidité n'ont pas permis l'émergence d'un secteur économique producteur capable de prendre le relais des hydrocarbures, et ce, en dépit de la hausse des crédits à l'économie. Aujourd'hui, cette liquidité se réduit. Selon la Banque d'Algérie, à la fin de septembre 2015, la liquidité globale des banques s'établissait à 1800 milliards de dinars contre plus de 2700 milliards de dinars à la fin de 2014. Et c'est dans cette conjoncture que le secteur bancaire est appelé à se substituer petit à petit au Trésor avec une difficulté, le financement des gros projets de type infrastructures qui entrent davantage dans le cadre des dépenses définitives que de l'investissement rentable pour les banques. Le spectre de l'endettement Sur le plan externe, l'option de l'endettement international est définitivement retenue, même si elle ne fait pas l'unanimité parmi les économistes. Certains d'entre eux estiment qu'au rythme actuel du recours au FRR et aux réserves de change, l'Algérie en a pour 18 mois avant de faire face à de très sérieuses difficultés de financement de son déficit budgétaire et à celui de sa balance des paiements, ce qui conforte l'option de l'endettement. L'Algérie s'est pourtant donné beaucoup de mal pour rembourser par anticipation sa dette extérieure grâce à l'embellie pétrolière des années 2000. La décision prise par le président Bouteflika avait été largement saluée. L'Algérie est ainsi passée de plus de 25 milliards de dettes en 2000 à un peu plus de 4 milliards de dollars actuellement. Certains économistes sont aujourd'hui sceptiques quant à la faisabilité de la démarche. Ali Benouari, ancien candidat à la présidence de la République, met au défi quiconque prétend que l'Algérie pourrait obtenir sur les marchés internationaux un crédit à long terme même d'un milliard de dollars, alors qu'il lui prédit la faillite dans 3 ans. «Les créanciers prêtent des montants raisonnables pour des projets rentables à des gens solvables, et nous, nous aurons besoin de montants faramineux pour soutenir des dépenses de consommation et aucune garantie pour assumer les échéances de cette dette», explique pour sa part l'expert en finances, Ferhat Aït Ali. En tout cas, l'Algérie devrait agir «tant que ses réserves de change lui donnent encore une apparente solvabilité», estime un banquier d'affaires. Le recours aux emprunts gouvernementaux qui est avancé comme solution offre cependant le désavantage d'être assorti de conditions commerciales. Les gouvernements «ne prêtent pas de gros montants et le font moyennant des concessions politiques ou stratégiques. En dehors du gouvernement chinois qui a les moyens et peut ne pas consulter la population, aucun gouvernement occidental ne pourra nous suivre sur une telle voie», argumente Ferhat Aït Ali. En attendant un hypothétique redressement des prix du pétrole, l'un des rares moyens de dégager des ressources supplémentaires et baisser les importations est, préviennent certaines économistes, de jouer l'arme du taux de change auquel le gouvernement aurait systématiquement recours, quitte à plomber le pouvoir d'achat. .