Le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) a fait le plein, hier à la mythique salle Atlas d'Alger, pour célébrer le 27e anniversaire de sa fondation sous le mot d'ordre «Le courage de dire et la force d'agir». Une devise chère à ce parti qui traduit la fidélité aux fondateurs de ce mouvement politique et tout particulièrement à ceux qui ont été assassinés. Un écho au parcours fait de sacrifices de cette formation politique. «Vingt-sept ans de résistance, de lutte, d'action et de proposition», lance d'emblée Mohcine Belabbas, le jeune leader du RCD, sous les acclamations d'une salle pleine à craquer et sous le regard du vétéran militant des droits de l'homme Ali Yahia Abdennour, à qui les militants et sympathisants du RCD ont a réservé une standing ovation. Le président du RCD ne s'est pas trop attardé sur «la crise politique et ses conséquences», pour se consacrer essentiellement aux «issues positives et aux solutions que l'on peut donner à cette crise». Plantant un décor national rempli d'«incertitudes et de doutes qui plus que jamais pèsent lourdement sur la vie politique, économique et sociale», M. Belabbas assure que «la crise risque d'emporter la nation si nous restons spectateurs et inactifs. Nous savons aussi qu'une crise même grave et dangereuse peut être une opportunité pour se remettre en cause, agir et donner naissance à une ère nouvelle». Il estime que dans cette phase charnière dans laquelle rentre le pays, ce produit «l'effondrement d'un système construit sur la cooptation, l'accaparement de la rentre, la corruption le détournement de l'histoire, les fraudes électorales, l'opacité dans la gestion et l'exclusion du citoyen de la prise décision». A la tribune, Mohcine Belabbas était entouré des membres de la direction du parti, mais il manquait un à l'appel. Nacereddine Hadjadj, ex-maire de Berriane, qui croupit derrière les barreaux depuis juillet 2015 sans qu'il ne soit jugé. A sa place, c'est son portrait qui le «représente». Un symbole qui rappelle les risques de l'engagement politique dans un pays régenté par la répression. «Refondation nationale» C'est donc sous le thème général de la refondation nationale, que le président du RCD décline les grands chantiers pouvant contribuer avec d'autres forces politiques à l'instauration d'une «nouvelle ère politique» dans le pays. «Une issue positive à la crise ne peut venir de l'intérieur du système des clans. C'est pour cela que nous avons pris l'initiative avec d'autres partis et personnalités d'opposition de construire une alternative qui redonne au peuple algérien sa souveraineté, de construire ses institutions, de rédiger sa Constitution et d'élire librement ses représentants.» Tout un programme de transition qui bute sur le refus des tenants du statu quo. Pourtant l'alternative prônée par le RCD et ses partenaires n'est pas une rupture brutale, mais «une transition démocratique, pacifique et négociée», réaffirme M. Belabbas. Elle doit débaucher, selon le chef du RCD, sur «une réorganisation administrative qui doit redonner du sens aux territoires par la consécration des régions dotées de larges pouvoirs afin d'impliquer le citoyen et libérer les initiatives et l'innovation. Une refondation républicaine des institutions et de la société algérienne qui s'appuie sur le génie de son peuple en valorisant les régions naturelles», soutient-il. La référence à la conception issue du Congrès de la Soummam est évidente tant le RCD continue de puiser sa littérature politique de ce moment fondateur de l'Etat algérien. Autre ligne d'action développée par le leader du RCD se rapporte à la transition «économique pour sortir du modèle rentier qui a épuisé les richesses naturelles, perverti notre culture et nos habitudes alimentaire et accru notre dépendance vis-à-vis de l'étranger». Et c'est tout naturellement qu'il plaide également pour une «transition environnementale et énergétique pour garantir un développement durable par la préservation et la valorisation de nos richesses naturelles». Il n'a pas omis non plus de rappeler l'autre richesse que représente la diaspora pour mieux critiquer la nouvelle Constitution et son fameux article 51. «Le pays appartient à tous les Algériens résidant ici autant qu'il appartient à ceux résidant à l'étranger. C'est pour cela qu'il faut associer notre immigration dans cette œuvre de refondation. La diaspora est une ressource inestimable en ces temps d'affaissement de la formation», a-t-il soutenu. Deuxième génération L'esprit maghrébin a plané également sur ce 27e anniversaire du RCD. «Réhabiliter la fédération des Etats nord-africains voulue par les dirigeants des mouvements de libération c'est rapprocher les points de vue, additionner les moyens et élargir le marché pour nos usines», a défendu M. Belabbas qui n'a pas manqué de vilipender «ceux qui se braquent, chez nous ou chez nos voisins, contre ce destin» car «ils tirent bénéfice de l'isolement par la rapine et la confiscation des capacités nationales». «Ne nous trompons pas, ces deux segments qui se livrent une guerre verbale sont stratégiquement solidaires pour maintenir des pouvoirs de cooptation et d'opacité», tance-t-il encore. Favorable à l'ouverture des frontières entre l'Algérie et le Maroc, Mohcine Belabbas estime qu'elle «stimule la compétitivité et nourrit le libre débat. C'est faire du citoyen le seul arbitre de la vie publique». Il vrai que la question de la frontière fermée depuis 1994 par le palais royal est source de beaucoup de tensions. Un sujet «sensible» des deux côtés de la frontière. Le chef du RCD en est conscient, et c'est à ce titre justement qu'il affirme que «ni les invectives des rentiers ni leurs menaces ne nous ferons taire». Portée par une ambiance vive des militant(e)s heureux(ses) de se retrouver dans un meeting marquant l'anniversaire de leur parti, Mohcine Belabbas remet au goût du jour les marqueurs politiques de son parti. «Le courage de dire et la force d'agir ont gravé dans la vie algérienne les droits de l'homme, la promotion des droits des femmes, la citoyenneté, la laïcité et l'amazighité, les libertés individuelles et collectives.» Le rappel de ces valeurs qui fondent le RCD est «nécessaire pour restituer ces revendications pour mieux les partager et donner du sens et de la portée des combats qui les ont portés», estime M. Belabbas. Satisfaits du succès de leur meeting, les militant(e)s et sympathisant(e)s disent toute leur détermination à «continuer» le combat de la première génération. Assurément, pour ce nouveau départ c'est un test politique réussi pour ceux qu'on peut désormais appeler la deuxième génération du RCD.