La présence d'un ministre des Sports dans la délégation allemande conduite par le ministre de l'Intérieur, Thomas de Maizière, qui s'est rendue en Algérie lundi pour finaliser l'accord d'expulsion des ressortissants algériens illégaux se trouvant en Allemagne, est intrigante à plus d'un titre. Les responsables allemands ne sont certainement pas venus en Algérie pour négocier avec les autorités sportives algériennes un match retour avec notre sélection nationale de football qui leur avait donné du fil à retordre lors de la dernière Coupe du monde au Brésil. C'est sur un autre terrain – politique, celui de la circulation des personnes – que s'est jouée la confrontation-retour à Alger entre les deux parties, algérienne et allemande, après la première manche qui s'était déroulée à Berlin le 12 janvier dernier. Là aussi, on s'en souvient, la visite du Premier ministre Abdelmalek Sellal, qui avait conduit la délégation algérienne, avait été placée – pour faire passer la pilule amère du contentieux opposant les deux parties – sous le signe du resserrement des liens de coopération bilatérale. Mais l'objet principal de ce déplacement non programmé, fait sous le sceau de l'urgence, n'aura échappé à personne. La décision de Berlin d'expulser les migrants illégaux algériens dans le sillage du scandale des agressions sexuelles de Cologne avait été au centre des discussions entre le Premier ministre algérien et la chancelière allemande Angela Merkel. Cette dernière – dont la cote de popularité s'est sérieusement écornée suite à sa gestion jugée populiste par ses adversaires politiques concernant le dossier des réfugiés syriens – a fait de ce sujet son cheval de bataille pour se faire pardonner son erreur d'appréciation par rapport à ce débat controversé qui a divisé les Allemands. Quelques jours plus tard, après la rencontre au sommet de Berlin, la chancelière allemande revient à la charge en appelant au téléphone le Premier ministre Abdelmalek Sellal. Et pour couronner les négociations au pas de charge menées autour de l'examen de ce dossier apparemment stratégique entre tous, pour Berlin, le ministre de l'Intérieur allemand débarque à Alger pour signer l'accord final de «reddition». La procédure quelque peu cavalière empruntée par les Allemands pour renvoyer les migrants algériens clandestins sous le couvert d'un accord bilatéral sur la réadmission liant les deux pays prend tous les contours juridiques et opérationnels du Patriote Act américain qui se moque des lois nationales et de la dignité humaine. On n'a pas vu un tel forcing ni en Allemagne ni dans aucun autre pays européen, même dans des affaires de terrorisme et de sécurité nationale de première urgence ! Au point où – miracle ! – l'Algérie, que l'on pointait du doigt il y a à peine quelques jours comme étant un pays à risque, est considérée subitement par ces Etats comme une destination sûre. Les Allemands sont souverains pour décider qui accueillir sur leur sol. Mais la question se pose de savoir pourquoi cette justice expéditive pour débouter du droit d'asile de manière ciblée les Algériens et les Maghrébins ? Tous des terroristes potentiels ? L'amalgame est dangereux. Pour sauver les apparences, l'Algérie, nous rassure-t-on, a exigé et obtenu toutes les garanties pour ne recevoir que les ressortissants algériens dont la nationalité algérienne est dûment prouvée. La dignité de l'Algérien aura-t-elle été pour autant sauve dans la gestion de ce dossier ?