Le jury international du festival de Namur (avec Yazid Khodja, représentant l'Algérie) a décerné le grand prix (Bayard d'or, environ 50 000 euros) au film libanais Falafel de Michel Kammoun. C'est un succès important pour ce jeune cinéma libanais dont le cotation à la bourse internationale du 7e art monte sans arrêt. Le cinéma fait à Beyrouth ces dernières années est d'ores et déjà une valeur sûre. A juste titre considéré par le jury comme le meilleur de tous les films montrés à Namur, Falafel a été tourné en 2004. C'est le premier long métrage de Michel Kammoun qui a déjà tourné cinq courts métrages fiction. L'action se déroule en une seule nuit à Beyrouth. Beyrouth en 2004, successivement obscure et superbe dans ses lumières. Beyrouth où il est question de Toufic, jeune homme confronté à une sorte de quête existentielle à travers la nuit. Beyrouth qui apparaît ici, aux antipodes de ce qu'elle fut hélas pendant la guerre civile, une capitale grisante, vivante, sans conflits. Le film nous convie à entrer avec Toufic dans les fêtes de la jeunesse beyrouthine, ces communautés regroupées qui font le pari de vivre ensemble, d'oublier les querelles et les passions politiques. Il y a des connivences sincères, des passions, des histoires d'amour (les filles de Beyrouth sont ravissantes et les garçons tombent vite amoureux). Falafel est le portrait d'une génération qui a voulu oublier les convulsions libanaises du passé. C'est alors que le récit balance dans la violence. Toufic, en effet, est injustement agressé au coin de la rue quand il a voulu venir en aide à un ami (l'inconnu agresseur a trouvé la tôle de sa limousine froissée, il a aussitôt sorti une arme). Alors que Beyrouth tentait avec acharnement d'oublier le passé de la guerre civile, ce banal incident (car cela pourrait se passer partout, dans le pays de Bush, il y a des meurtres dans les écoles tous les jours) va provoquer un retour en arrière. Pour se venger, Toufic va errer toute la nuit à Beyrouth à la recherche d'une arme. Et les armes qu'on croyait définitivement ensevelies réapparaissent soudain partout. Falafel est une œuvre qui pourrait soutenir la comparaison avec d'autres grands films. Michel Kammoun fait preuve d'une grande sensibilité et d'une étonnante capacité imaginative dans sa mise en scène et sa direction d'acteurs. Beyrouth est devenue au fil des ans une inépuisable source de beau cinéma. Le jury documentaire (avec Habiba Djahine) a décerné son grand prix au film Rwanda, les collines parlent, qui évoque encore une fois le génocide. Par ailleurs, l'exploration de la vie de poète et d'homme politique de Léopold Sédar Senghor, à l'occasion de son centenaire cette année, a suscité un intérêt à Namur autour de deux documentaires : Lettre à Senghor, de Samba Félix Ndiaye et Léopold Sédar Senghor, un long poème rythmé de Béatrice Soulé.