Falafel est le dernier film du réalisateur libanais Michel Kammoun. Il évoque le quotidien de la jeunesse d'aujourd'hui qui veut tourner le dos à la guerre et aux violences. C'est aussi une métaphore de l'anti-conformisme et une élégie pour la vie et l'amour… Paris : De notre bureau Pour le commun des mortels Falafel est un sandwich fait de boulettes de pois chiches et de fèves séchées. Un plat oriental populaire pouvant réunir toute la population dans sa diversité et ses divergences. En France, c'est le titre d'un film libanais sorti il y a quelques jours dans les salles. Il raconte les déambulations nocturnes de Toufik, un jeune rêveur de Beyrouth, qui cherche désespérément à tourner la page des guerres et des violences. Toufik, qui ne connaît pas grand-chose à la vie, essaye donc de la croquer à pleines dents, de s'amuser, d'aimer, car chaque seconde qui passe est vitale. Falafel met en exergue la vie nocturne de cet hurluberlu qui ne veut pas trouver le sommeil. Du coup, il passe toute sa nuit à danser, rencontrer des amis, boire, se débaucher comme si demain n'existait pas. Mais, le jeune fêtard découvre vite que vivre normalement dans le pays du Cèdre peut s'apparenter à un luxe hors de sa portée. Malgré la fin de la guerre contre Israël, il se rend à l'évidence que tout peut éclater en un clin d'œil et que la paix n'est qu'éphémère et fragile dans un pays traversé par des courants politiques et religieux contradictoires. Toufik, qui joue le rôle de l'acteur principal, est conscient qu'un volcan sommeille à chaque coin de rue, prêt à cracher sa flamme meurtrière. Falafel est une invitation à un voyage au bout de la nuit, une soirée interminable qui réunit les jeunes du Liban nouveau. Le but à travers la débauche d'une soirée est d'oublier les affres de la guerre et de ne plus éprouver ce terrible sentiment de frustration d'être obligé de vivre dans ses traces. Réalisé par Michel Kammoun, le film se résume à évoquer le présent, rien que le présent. Point d'avenir. Car dans le Liban d'aujourd'hui, parler du lendemain est presque une hérésie, une méconnaissance totale de la vie et de l'existence. C'est pour cela aussi que ce long métrage se déroule en une seule nuit. « Au Liban, explique Michel Kammoun, réalisateur, si on veut s'amuser, on le fait jusqu'à l'extrême. On fait le tour des bars, de toutes les fêtes, on vit à fond, car demain, on sera peut-être enterrés dans les abris. » Il ajoute : « J'ai voulu que le rythme du film donne cette impression de vie en accéléré, car on vit l'instant sans savoir de quoi le lendemain sera fait. » Tourné la nuit et sans budget, Falafel est l'œuvre de comédiens et de techniciens amis du réalisateur. Les acteurs sont jeunes. A l'image de Yasmine et de Lauren, dont l'âge ne dépasse pas la trentaine. Pour le réalisateur, Falafel n'est plus cette « bouffe du pauvre », mais une manière de penser et de vivre. Une comédie dramatique et décalée dans un pays aussi excentrique que le Liban. A peine sorti, il a déjà remporté le Bayard d'or au Festival international du film francophone de Namur en Belgique. Pour doubler le plaisir, comme avec les délicieux falafels de la place Sassine ou de M. Sahyoun, rue de Damas à Beyrouth, Falafel a raflé aussi la plus haute récompense pour sa bande sonore, signée de Toufik Farouk, joueur de piano, amoureux du jazz et musicien de la grande diva arabe Feyrouz. En attendant, si l'envie d'un bon Falafel vous prend, rendez-vous au cinéma parisien le plus proche. Vous allez vous régaler.