Dans une tribune parue hier, la présidente de gauche du Brésil, Dilma Rousseff, a accusé ceux qui conduisent la procédure de destitution au Parlement de chercher à prendre le pouvoir pour échapper aux accusations de corruption qui pèsent sur eux. «Ils veulent condamner une innocente et sauver des corrompus», écrit Mme Rousseff, 68 ans, dans une longue tribune publiée par le quotidien Folha de Sao Paulo, à la veille du vote crucial au Parlement sur sa destitution. «Est-ce que ceux qui dirigent le putsch permettront que la lutte contre la corruption continue ? Quelle est leur légitimité ?» demande Mme Rousseff qui, ces derniers jours, a accusé son vice-président Michel Temer et le président de la Chambre des députés, Eduardo Cunha, d'être «le chef et le sous-chef» d'une conspiration contre elle. Dilma Rousseff, une ex-guérillera sous la dictature (1964-85) et membre du Parti des travailleurs (PT, gauche), est accusée par l'opposition de «maquillage des comptes publics» en 2014, année de sa réélection, et début 2015 mais pas de corruption. Les 513 députés du géant émergent d'Amérique latine se prononceront aujourd'hui sur sa destitution qui devra être approuvée par les deux tiers (342 voix). Elle devrait être ensuite ratifiée par le Sénat qui écarterait alors la Présidente du pouvoir. Elle serait alors remplacée par Michel Temer du PDMB (centre), parti qui a lâché la majorité fin mars. De son côté, l'ancien président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a indiqué, vendredi, qu'il s'attendait à ce que la Chambre des députés vote contre la destitution de Dilma Rousseff. «Destituer un gouvernement démocratiquement élu qui n'a pas commis de délit de responsabilité ne résoudra rien, cela ne fera qu'aggraver la crise», a-t-il déclaré. M. Lula a appelé les députés à unir leurs forces pour faire du Brésil un pays doté d'institutions fortes et à ne pas «commettre l'impensable». Il a également indiqué qu'il tirerait parti de son expérience en tant qu'ancien président pour «contribuer à la reconstruction du dialogue et de l'unité dans le pays». M. Lula a commencé, la semaine dernière, à rencontrer de nombreux dirigeants politiques de la Chambre des députés pour tenter d'obtenir un soutien suffisant pour empêcher la destitution de Mme Rousseff. «Il y a eu des manifestations extraordinaires à travers le pays pour défendre la loi. Cela montre que sans la démocratie, nous n'aurions que le chaos et l'incertitude permanente», a-t-il déclaré. Le Brésil se tient le ventre.