Le secrétaire général du RND, Ahmed Ouyahia, s'est prêté hier au jeu des questions-réponses en usant, en bon orateur, de son talent de dribbleur. Lors d'une conférence de presse animée au siège de son parti, le patron de la deuxième formation politique au pouvoir s'est illustré par ses capacités à éluder les questions sensibles et celles qui fâchent. Il a refusé, au début, de commenter les graves accusations formulées par le secrétaire général du FLN, Amar Saadani, contre le général à la retraite Toufik, l'ancien chef de gouvernement Abdelaziz Belkhadem et une «constellation» de figures historiques ayant appelé à sauver l'ex-parti unique. «Vous me demandez de commenter une déclaration, je ne commente pas les déclarations, mais plutôt les événements», tranche Ouyahia. Seulement, plus loin et sur insistance des journalistes, le directeur de cabinet de la présidence de la République a fini par donner son point de vue sur le dernier discours de Saadani. Pour lui, un homme politique doit mesurer les conséquences de ses propos avant de les prononcer. «Lorsque l'on s'attaque à un ancien responsable militaire, il faut d'abord penser à l'institution et aussi aux officiers qui font partie de cette institution et tous ceux qui ont servi en son sein. La personne accusée d'être derrière les événements de Ghardaïa avait sous ses ordres des officiers, des sous-officiers et des soldats de l'armée nationale», observe Ouyahia qui a rappelé les propos qu'il a tenus à ce sujet en 2015 : les événements de Ghardaïa sont le résultat d'une «manipulation concoctée de l'intérieur» et d'une «conspiration des puissances étrangères». Bouteflika et les ex-officiers de la France L'autre question évoquée par Saadani et effleurée par Ouyahia a trait aux anciens officiers déserteurs de l'armée française, le patron du RND rappelle que «Bouteflika était un officier de l'Armée de libération nationale et il a collaboré avec d'anciens officiers de la France. Idem pour le défunt Houari Boumediène, le Moustachu, qui a eu lui aussi à travailler avec eux. Et c'est avec ces ex-officiers que le président Boumediène avait construit une armée algérienne forte au lendemain de l'indépendance». S'agissant de Belkhadem, le secrétaire général du RND n'a pas dit un mot, il s'est contenté d'exprimer son respect et son admiration pour l'ancien chef de gouvernement avec lequel il a eu à travailler. «Je respecte cet homme et mes positions ne changent pas en fonction des saisons», lance Ouyahia pour qui le FLN, en tant qu'entité, reste l'allié stratégique du RND. Interrogé sur les déclarations contradictoires entre les membres du gouvernement et plus particulièrement le démenti adressé par le ministre de l'Industrie à celui du Commerce sur la question de l'importation des véhicules de moins de trois ans, à ce propos Ouyahia précise qu'il n'exerce aucune tutelle sur ces ministres qui sont du RND. Il qualifie, en outre, de tout à fait normal les déclarations contradictoires de ministres qui ne sont pas propres, dit-il, à l'Algérie. «J'ai vécu moi-même de telles situations, lorsque j'étais à la tête du gouvernement. Ce n'est donc pas propre au gouvernement Sellal, ni en relation avec l'activité du Président», a-t-il assuré. Bouchouareb conforté Ouyahia conforte M. Bouchouareb, dès lors qu'il précise que le RND a été dès le départ contre l'importation des voitures de moins de trois ans, et pour l'option du développement et la multiplication des usines de montage de voitures. Questionné sur ses relations avec Ali Haddad, patron du FCE, Ouyahia n'a pas nié leur amitié : «Ali Haddad est un ami, je l'ai même encouragé pour devenir le patron du FCE. Mais je vous confirme que le RND n'a conclu aucune alliance secrète avec cette organisation.» Concernant un éventuel changement du gouvernement, le secrétaire général du RND doute de cette option, mais précise que cette question est du strict ressort du chef de l'Etat. Sur le chapitre économique, Ouyahia estime que si l'on réhabilite la valeur du travail, la crise ne peut être qu'une bénédiction pour nous. En décortiquant la loi de finances 2017, Ouyahia exprime son soutien aux choix économiques du gouvernement et réplique à ceux qui ont qualifié ce projet «d'une punition contre le peuple» et «d'un code pénal bis» de présenter des alternatives. A ce propos, Ouyahia a souligné que le gouvernement avait deux options : «Soit on réduit les dépenses, soit on recourt à l'endettement extérieur.» Le gouvernement a opté pour la première option, un choix salué par le chef du RND. «A la lumière du déficit prévu dans le projet de loi de finances, il faudrait emprunter 10 milliards de dollars. Ce qui étoufferait le pays», selon lui. Pour Ouyahia, l'équilibre financier sera atteint, lorsque le prix du baril du pétrole atteindra les 80 dollars ! Il a défendu le choix de 50 dollars comme prix de référence du baril pour l'élaboration de la loi de finances. «C'est vrai que c'est un grand changement. Mais si c'était 37 dollars, le déficit budgétaire serait un gouffre. Il est déjà à 8%», a expliqué Ouyahia.