Le projet de loi de finances 2017 annonce une année encore plus difficile et critique pour les ménages. Les députés de la majorité FLN-RND voteront aujourd'hui la plus impopulaire des lois de finances. Ces députés endosseront devant l'histoire la responsabilité de donner le coup de grâce au pouvoir d'achat des Algériens. Les partis-Etat lèveront, comme à leur habitude, la main de l'allégeance à un gouvernement qui a échoué à préserver les biens de la collectivité, un gouvernement qui n'a trouvé pour seule solution afin de sortir le pays de la crise financière — dont sa gestion est responsable — que de faire payer les citoyens dont les bourses sont déjà lourdement impactées par les hausses des prix et la détérioration de la valeur du dinar. Le projet de loi de finances pour l'année 2017 (PLF-2017) annonce une année encore plus difficile et critique pour les ménages. Des ménages appelés à combler un déficit budgétaire de l'Etat en payant davantage de taxes et en faisant face aux répercussions des hausses sur les différents produits de consommation. Pis, la loi qui sera votée aujourd'hui, va au-delà, pour la première fois, de la seule année 2017 et élabore ses prévisions pour les exercices 2018 et 2019. Faisant dans la spéculation et toujours en ne prenant en compte que les données du marché pétrolier, le gouvernement fonce tête baissée en annonçant des mesures restrictives sur la base de supputations et de craintes de baisse des cours du pétrole. Ainsi, il prévoit un baril à 50 dollars en 2017, 55 en 2018 et 60 en 2019. La valeur du dinar est établie à 108 DA pour un dollar pour une inflation de 4% et un taux de croissance de 3,9%. Certains diront que c'est de la prospective, d'autres qualifieront cela de légèreté. Sans présenter une politique économique capable de déverrouiller les obstacles au développement hors hydrocarbures, l'Exécutif fait dans l'économie de bouts de chandelle et vise à combler le déficit de la fiscalité pétrolière par les taxes ordinaires. Hausse de la TVA, des carburants, de la taxe douanière sur les produits importés, de même que la création de taxe sur la production nationale, le PLF-2017 est une véritable messe à l'austérité pour les petites bourses. Les transferts sociaux connaîtront une baisse de 11,4% et les dépenses de fonctionnement se limiteront à 4591,8 milliards de dinars, assortis d'un déficit de la balance de paiement et d'une baisse de la masse salariale de l'ordre de 60 milliards de dinars. Des avantages fiscaux et facilités sont par contre octroyés aux entrepreneurs, alors que la dette fiscale atteint des sommets. Les salariés continueront ainsi à payer leurs impôts, alors que les grandes fortunes échapperont au contrôle fiscal. La majorité soumise à la volonté du prince Telle est la copie du gouvernement, lourde de ses mesures fiscales pour les simples citoyens et très légère en termes de propositions de sortie réelle de crise. Mais les députés FLN et RND ne dérogeront pas au pacte de soumission à la volonté du prince en justifiant «l'inévitabilité des mesures prises par le gouvernement». Alors que les experts alertent sur les graves conséquences sociales de cette loi, les parlementaires de la coalition gouvernementale issus de la majorité affirment chichement que «c'est la seule solution» à présenter aux citoyens. Comme les années précédentes, les députés de l'opposition se retrouvent seuls dans l'hémicycle face aux relais de l'Exécutif que sont leurs collègues de la majorité. Les parlementaires de l'opposition n'ont cessé de dénoncer la «hogra» consacrée par le PLF-2017 et le recours facile du gouvernement à l'austérité pour parer à la crise financière. «Ce projet porte en lui le visage du libéralisme sauvage… Ces mesures sont une atteinte aux droits des citoyens de vivre dans la dignité et une atteinte à la souveraineté nationale», estime le groupe parlementaire FFS, en notant que le gouvernement a décidé de faire payer aux citoyens le prix fort et d'amnistier les barons dont l'influence sur l'Exécutif n'est plus à démontrer. Le FFS s'insurge contre un projet qualifié d'antisocial et antinational et affirme que «l'Algérie n'est pas la propriété des oligarques». Tout en fustigeant «une honteuse atteinte au pouvoir d'achat des citoyens», le FFS, par la voix de son chef du groupe parlementaire, dénonce le refus du gouvernement de recouvrer plusieurs milliards de dinars d'évasion fiscale. Accusant l'Exécutif de ne pas avoir le courage nécessaire d'aller vers de vraies réformes, le FFS avertit : «Le gouvernement joue avec le feu et place le pays face au risque d'un scénario à la libyenne.» Et d'ajouter : «Les oligarques ne sont pas l'avenir de l'Algérie mais une réelle menace.» Le Parti des travailleurs adopte le même ton et qualifie le projet de loi de finances de «déclaration de guerre contre les Algériens». Louisa Hanoune alerte sur les risques et conséquences dramatiques d'une telle loi décrétant la misère à la majorité des Algériens et le confort à une minorité maffieuse. «Aucun peuple n'acceptera de mourir pour une minorité de privilégiés», affirme Mme Hanoune, qui ajoute que recouvrer les dettes fiscales aurait suffi à combler le déficit budgétaire de l'Etat au lieu de recourir à une hausse de la TVA. De même, pour les députés de l'Alliance de l'Algérie verte, cette loi de finances fait porter la responsabilité de l'échec économique aux citoyens. Les partis de l'opposition sont donc unanimes à dénoncer le PLF-2017 dont l'adoption sera endossée, aujourd'hui, par une majorité trop occupée à servir le système.