Plaidoyer pour un continent sans conflit à l'aune 2020. Les femmes africaines ont affiché leur disponibilité, à partir de Constantine, à se lancer à leur corps défendant dans la médiation pour «faire taire les armes» à travers un séminaire de haut niveau, organisé par le Réseau panafricain des sages (PanWise), les 12 et 13 décembre à l'hôtel Marriott et intitulé «Faire taire les armes : inclure les femmes dans les processus de médiation post-conflit, à la table de la paix et dans les mécanismes de cohésion sociale». Les femmes africaines refusent de se murer dans le rôle d'observatrices, quand bien même elles sont les premières victimes des conflits. Elles aspirent à devenir actrices dans l'avènement des mouvements de paix et de sécurité, d'où leur volonté à vouloir être incluses dans les processus de médiation. Ce sont les «women peace builders», pour paraphraser Bineta Diop, envoyée spéciale de l'Union africaine (UA) pour les femmes, la paix et la sécurité. Cette dynamique émergente est soutenue et confortée par les postions de personnalités dont Catherine Samba Panza, l'ex-présidente de la République centrafricaine — pays en conflit — qui a abondé dans le même sens : «Nous avons besoin de voix qui s'élèvent pour la paix et ce sont les femmes qui les portent.» Et de saluer le rôle leader de l'Algérie dans ce domaine. A rappeler que la diplomatie algérienne œuvre, ces dernières années, pour la réussite des pourparlers de paix au Mali et en Libye, pays voisins. «Il est reconnu que la prévention et la résolution des conflits exigent, en plus des efforts conjoints des organisations internationales, continentales et régionales, l'implication des acteurs nationaux et locaux, dans toute leur diversité. C'est pour cela que nous avons procédé, en 2013, à la création du Réseau pananfricain des sages ou PanWise», a déclaré Smaïl Chergui, commissaire à la paix et la sécurité à l'UA dans son allocution d'ouverture. Le Pan-African Network of the Wise (PanWise) est un réseau de coordination des acteurs non gouvernementaux dans le domaine de la médiation, dont les personnalités et les chefs traditionnels, les médiateurs communautaires, les associations religieuses et les diverses organisations de la société civile, dont celles des femmes. Ce réseau de sages a pour objectif de promouvoir une approche plus concertée et plus inclusive de la diplomatie préventive, de la médiation et de la résolution des conflits dans le contexte de l'architecture africaine de la paix et de sécurité. Pourquoi les femmes ? «Tout simplement parce qu'elles ont la légitimité requise et les connaissances des réalités locales qui sont des éléments-clés dans la consolidation de la paix et la réconciliation. Elles ont un rôle central dans la cohésion sociale et sont parmi les acteurs les plus influents en la matière», répond Smaïl Chergui. «La nature changeante des conflits, en particulier en Afrique, incite à l'adoption d'autres approches multidimensionnelles dont l'inclusion des femmes», insistent les femmes participantes. PANWISE, UN RESEAU EN MOUVEMENT Dans le programme d'action du PanWise figure la création d'une association africaine des femmes dans la médiation «dont il faut veiller à l'opérationnalisation rapide et à la mobilisation des ressources nécessaires à son lancement», s'accorde-t-on à soutenir. De ce workshop, il est attendu la mise en place d'une synergie susceptible d'élaborer des stratégies à l'effet de renforcer le rôle des femmes dans les efforts de rétablissement de la paix via notamment la création de cette association continentale de femmes dans les processus de médiation préventive. «Notre réunion se veut un moment d'échange d'expériences positives avec nos partenaires et d'enseignements à tirer ensemble pour renforcer le gisement des femmes médiatrices», a rappelé le commissaire de l'UA. Concrètement, la commission paix et sécurité de l'UA a élaboré, en 2015, un agenda d'action à visées longues pour baliser l'itinéraire de la négociation à la gent féminine. A commencer par la formation. «Grâce à l'appui de nos différents partenaires, nous avons pu former près de 100 femmes dans le domaine de la médiation en moins d'un an… cela nous rapproche de notre objectif de former au moins 1000 femmes d'ici 2020», a encore indiqué Smaïl Chergui. Statistiques à l'appui, l'engagement de la femme africaine, exposée davantage aux conflits en raison des points chauds nombreux sur le continent, est en nette progression. Depuis l'adoption de la résolution onusienne 1325 qui stipule «la pleine participation active des femmes, dans des conditions d'égalité, à la prévention et au règlement des conflits ainsi qu'à l'édification et au maintien de la paix», le nombre de médiatrices est passé depuis 2010 d'une seule, en l'occurrence l'ambassadrice Hawa Youssouf, à neuf. Ce qui a donné naissance au groupe des sages. Mais le potentiel des femmes demeure largement sous-exploité. «Renforcer les compétences des femmes pour pouvoir participer au processus de paix est crucial pour leur avancement et capacités à contribuer au développement et à la sécurité», a affirmé la ministre de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Condition de la femme, Mounia Meslem, en faisant référence à l'endurance des Algériennes pendant la décennie noire.