Pour Ali Benflis, les divergences sur le boycott ou la participation sont un détail de l'histoire. Deux jours après la décision du comité central de son parti de boycotter les prochaines élections législatives, Ali Benflis a animé hier une conférence de presse au siège national de Talaie El Houriyet situé à Ben Aknoun, sur les hauteurs d'Alger. L'ancien candidat à l'élection présidentielle de 2014 a tenu à apporter plus d'explications sur l'option prise par son parti. Pas seulement. En plus des éclaircissements donnés sur sa démarche, le président de Talaie El Houriyet a également tracé les perspectives de ses rapports avec les autres partis de l'opposition qui ont, eux, décidé de prendre part au prochain rendez-vous électoral. Pour lui, les divergences sur le boycott ou la participation sont un détail de l'histoire. «On sera appelé à se retrouver après les élections, comme cela a déjà été fait après la présidentielle de 2014, dit-il, parce qu'il y a un point commun qui nous rassemble et il est essentiel, c'est l'urgence d'une transition démocratique.» Si Ali Benflis a passé en revue, à l'occasion de la conférence de presse qu'il a animée, tous les problèmes du pays, l'impasse politique et ce qu'il appelle «la crise de régime», il a aussi pointé du doigt l'absence des médias publics, notamment la Télévision et la Radio nationales à ses activités. Un sujet en effet auquel le président de Talaie El Houriyet a consacré une bonne partie de sa déclaration. «Bien à l'abri de la protection aliénante que leur procure le régime politique en place, les médias publics ont mis en quarantaine tous les partis de l'opposition, en particulier le nôtre», a dénoncé Ali Benflis, ajoutant que Talaie El Houriyet fait de leur part «l'objet d'un boycott vigoureux qui n'ose pas s'assumer et qui ne dit pas son nom». «Le droit à l'information, la liberté d'opinion et la liberté d'expression ne se portent pas bien et c'est un euphémisme», souligne le conférencier qui parle du non-respect des dispositions constitutionnelles qui garantissent le droit du citoyen à l'information. «Notre conviction est que notre pays est engagé dans une véritable course contre la montre et que le temps qui passe rend chaque jour plus durs les défis politiques, économiques et sociaux qui nous sont posés et que nous nous devons de relever, parce que personne d'autre ne s'en chargera à notre place», affirme par ailleurs Ali Benflis qui souligne que «laissée telle quelle, l'impasse politique actuelle s'aggravera». Et face à cela, dit-il, «les prochaines échéances électorales apparaissent pour ce qu'elles sont : secondaires, dérisoires et très éloignées des urgences du moment». Expliquant les objectifs que se sont donnés les militants de son parti qui «veulent apporter leur contribution à la modernisation du système politique national», le président de Talaie El Houriyet regrette que «cet agenda national n'existe malheureusement pas». Selon lui, «le régime politique en place n'a qu'un seul agenda et c'est l'agenda de sa survie». «Nous avons le nôtre», a indiqué l'ancien candidat à l'élection présidentielle de 2014 qui a annoncé que son parti n'allait pas entrer en «hibernation», après avoir pris la décision de ne pas participer au prochain rendez-vous électoral. «J'irai bien, précise-t-il, expliquer à la base militante et aux Algériens le bien-fondé de ma démarche.» Ali Benflis a abordé par la suite ses rapports avec les autres partis de l'opposition qui ont fait le choix d'entrer dans la compétition électorale. «Je ne partage pas l'avis de certains qui voient dans cette problématique de la participation ou de la non-participation à la prochaine échéance législative un coup fatal porté à l'opposition nationale», soutient-il. Il explique : «Telle qu'elle existe aujourd'hui, l'opposition nationale rassemble déjà des partis se trouvant à l'intérieur de l'instance législative et d'autres à l'extérieur de cette instance. Cette réalité ne les a pourtant pas empêchés de se rassembler autour du projet de transition démocratique.» Il ajoute : «Cette problématique de participation ou de non-participation à la prochaine échéance législative est tellement secondaire et dérisoire par rapport aux véritables problèmes du pays, qu'il serait dommage que nous en fassions une ligne de démarcation à l'intérieur de l'opposition nationale qui doit impérativement demeurer rassemblée autour des solutions à apporter à ces véritables problèmes.» Ali Benflis considère en effet qu'«il ne serait pas sage et qu'il ne serait pas lucide de notre part de permettre à cette ligne de démarcation sur un sujet non essentiel de nous diviser sur un sujet plus essentiel et plus déterminant pour notre pays, celui du changement démocratique». Précisant aussi que «l'opposition nationale n'a jamais été conçue comme une alliance électorale», le conférencier estime que les «forces politiques — qui la constituent et qui participeront à la prochaine échéance législative comme celles qui n'y participeront pas — savent que cette échéance ne marque pas la fin de la crise globale à laquelle notre pays fait face ; et que même seule la persistance de cette crise commande à l'opposition nationale de rester unie et soudée pour le bien de notre pays». Ali Benflis pense que 2017 est une année décisive. «Nous n'allons pas nous croiser les bras et assister en spectateur aux lourds développements qui risquent de marquer une année qui s'annonce comme la plus déterminante pour l'avenir de notre pays», lâchera le président de Talaie El Houriyet qui dit ne pas détenir des secrets qui l'ont conduit à aboutir à une telle conclusion, mais s'appuie sur l'analyse que tout le monde fait de la situation du pays et l'impasse qui bouche ses horizons.