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Syrie : Pourquoi les négociations de paix n'avancent pas
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Publié dans El Watan le 24 - 02 - 2017

Les représentants de Damas et de l'opposition ont entamé, hier à Genève, une nouvelle série de négociations difficiles sur fond de violations du cessez-le-feu
Alors que s'ouvrent à Genève de nouvelles discussions pour la paix pour la Syrie, le médiateur de l'ONU, Staffan de Mistura, a exprimé son scepticisme sur d'éventuels progrès vers la paix. «Est-ce que j'attends une percée immédiate ? Non, je n'attends pas de percée immédiate mais le début d'une série de rounds», a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse à la veille de la reprise des discussions. Poursuite des combats sur le terrain, violations du cessez-le-feu, fragilisation de l'opposition : voilà pourquoi ce nouveau round de négociations est miné d'avance.
Parce que le cessez-le-feu n'est pas respecté
L'opposition n'a eu de cesse de dénoncer ces jours derniers les violations du cessez-le-feu en place depuis décembre, en raison notamment des bombardements de l'aviation du régime sur des positions rebelles près de Damas et dans la province de Homs. La Russie a d'ailleurs demandé au gouvernement syrien de suspendre les bombardements aériens durant les pourparlers. Mercredi, un convoi d'aide humanitaire se dirigeant vers des zones assiégées a été attaqué par des hommes armés qui ont pillé les denrées et malmené les chauffeurs des camions.
Cette semaine, deux convois devaient se rendre à Waer, ville tenue par les rebelles près de Homs où 50 000 civils n'ont reçu aucune aide depuis près de quatre mois, mais l'un d'eux a dû faire demi-tour en raison de snipers le long de la route. Le lendemain, bombardements et coups de feu ont de nouveau empêché les camions de rejoindre la ville. En début de semaine, les Nations unies ont exprimé leur inquiétude devant l'intensification des combats dans la région de Damas.
Parce que le départ de Bachar al Assad reste au cœur des désaccords
La question du départ du président Assad a été la principale pierre d'achoppement des trois précédentes sessions de négociations de Genève et sera, selon l'opposition, à nouveau au centre de Genève 4. Pour Ahmad Ramadan, porte-parole de la Coalition nationale de l'opposition, «la principale question de cette session sera la transition politique. La délégation de l'opposition va mettre l'accent sur une proposition visant à former un organe de gouvernance de transition».
Le Haut-comité des négociations (HCN), qui rassemble des groupes-clés de l'opposition, maintient ses exigences sur une «transition politique» signifiant pour elle un départ du président Bachar Al Assad, pendant que Damas, représentée par l'ambassadeur de Syrie à l'ONU, Bachar Al Jaafari, se dit prête à accepter des élections une fois la paix revenue, mais ne veut pas discuter du sort du chef de l'Etat.
Mais la situation est encore une fois plutôt favorable à Bachar Al Assad, qui se sent renforcé par les derniers événements et ne fera probablement pas de concessions importantes. Pour le gouvernement, «c'est Assad ou personne d'autre», a déploré Yehya Aridi, un des conseillers du HCN. «Cette règle du ‘‘tout ou rien'' entrave toute chance de solution politique».
Parce que l'opposition ne sait pas quoi attendre de la nouvelle administration américaine
Avec le désengagement des Etats-Unis durant les derniers mois de Barack Obama et l'absence de la nouvelle Administration du dossier des négociations, l'opposition n'a plus de véritable soutien pour obtenir des gains à Genève.
Donald Trump, qui a demandé au Pentagone de nouveaux plans pour lutter contre les djihadistes de l'EI d'ici fin février, n'a jusqu'à présent pas donné de signes sur l'implication américaine dans les efforts diplomatiques pour résoudre un conflit. «Nous serons très égoïstes concernant la protection et la promotion de nos intérêts», avait simplement prévenu à Munich l'envoyé spécial américain de la coalition antidjihadiste, Brett Mc Gurk, rappelant que la priorité n°1 de Washington était de «détruire Daech».
Même si une source diplomatique américaine a réaffirmé mercredi que «les Etats-Unis restent engagés dans la recherche d'une solution politique au conflit», «la position du président Trump sur la Syrie et le Moyen-Orient n'est pas encore claire», a souligné un porte-parole du HCN, Ahmed Ramadan.
Parce que l'opposition est aussi affaiblie par des divisions
Fin janvier, Jabhat Fatah Al Sham, autrefois connu sous le nom de Jabhat Al Nosra, a attaqué d'autres groupes qui, selon lui, «conspiraient» pour l'ébranler en fournissant au gouvernement syrien leurs coordonnées pour des frappes aériennes. Jabhat Fatah Al Sham a pris conscience que certains groupes rebelles s'opposaient activement à sa présence à Idleb, le dernier bastion du pouvoir rebelle après la chute d'Alep. La présence de groupes affiliés à Al Qaîda dans l'opposition syrienne a longtemps représenté le facteur le plus litigieux de ce conflit.
Depuis la chute d'Alep, les groupes dits «modérés» ont été très marginalisés et dépendent maintenant fortement du soutien de groupes radicaux comme Fatah Al Sham et Ahrar Al Cham. De nombreux groupes, qui voudraient voir disparaître Fatah Al Sham, comptent sur une stratégie de la communauté internationale, mais il n'existe pour l'instant aucun front uni contre lui. Mais cette guerre entre les deux blocs de l'opposition sape la crédibilité de la délégation.
Parce que la question des Kurdes syriens n'est pas réglée
Autre sujet de tension : la présence des Kurdes syriens. «Lors de prochaines étapes, on ne pourra pas se passer de la présence de tout le spectre de l'opposition, y compris, sans doute, des Kurdes syriens», a prévenu Sergueï Lavrov, le chef de la diplomatie russe. «Nous sommes une partie importante de la Syrie», a rappelé Asya Abdullah, coprésidente du Parti de l'union démocratique (PYD), avertissant que «sans Kurdes, il n'y aura pas de démocratie en Syrie». Pour la représentante du PYD, l'absence des Kurdes aux pourparlers est due à l'opposition d'Ankara, qui considère le bras armé du parti — les Unités de protection du peuple (YPG) — comme une organisation «terroriste».
Principalement installés dans le nord de la Syrie, les Kurdes, essentiellement sunnites avec des minorités non musulmanes et des formations politiques souvent laïques, représentaient au début de la guerre 15% de la population. Après avoir adopté une position de «neutralité» envers le régime et la rébellion, les Kurdes ont repris des positions gouvernementales à la mi-2012 dans le Nord et l'Est, contrôlant désormais 18% du territoire, où vivent plus de deux millions de personnes.
L'YPG est alors devenu l'une des principales forces combattant l'EI avec l'appui aérien de la coalition conduite par les Etats-Unis. «Là où participe la Turquie, il ne peut y avoir d'accord, car tous les efforts de la Turquie visent à ce que les Kurdes n'obtiennent rien», a dénoncé Asya Abdullah.


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