Des députés pour Ouargla. La tendance s'affiche clairement de l'avis du Pr Bouhania Goui, expert en sciences politiques à l'université Kasdi Merbah de Ouargla, qui fait remarquer que « le législateur est intervenu positivement en vue d'élargir la présence féminine dans les assemblées élues pour contrecarrer une tendance masochiste chez la classe politique, parce que la femme avait un rôle marginal dans le paysage politique, malgré une présence remarquée dans les autres secteurs». A Ouargla, où elles ont bénéficié d'un stage de quatre jours en février dernier, une quarantaine d'élues des Assemblées populaires communales et de wilaya briguent de nouveaux mandats. Un engouement faisant écho à la volonté affichée par les pouvoirs publics de donner à la femme une place de choix dans la vie publique. Pour la première fois, une liste présidée par une femme est sortie des entrailles de la capitale du pétrole algérien, Hassi Messaoud, pour le compte du parti El Moustakbal. Avec une trentaine de ses concitoyennes de la wilaya de Ouargla, Fatima Sendid, promotrice immobilière reconnue de la place, incarne une nouvelle tendance au sein de la société locale, favorisant l'émergence d'une élite féminine, tant dans le monde des affaires qu'en politique. Une maire pour Ouargla ? Pour Wafia Abazi, chef du bureau du mouvement pour la réforme nationale, Islah, au-delà des législatives de mai prochain, c'est un ancrage populaire dans les différents quartiers de la wilaya qui est au cœur de la stratégie de déploiement lancée à l'occasion des ces élections. Seconde de la liste qu'elle a elle-même constituée et choisie en concertation avec sa base, Mme Abazi axe son plan de bataille sur les franges les plus déshéritées de la population, à savoir les femmes au foyer, les chômeurs et les seniors. L'idée défendue est de placer une personnalité ayant une crédibilité populaire grâce à son background d'activiste sociétal au service des catégories indigentes victimes de l'exclusion sociale et lancer d'ores et déjà une campagne de positionnement local. «Mon mandat d'élue dans la commune de Ouargla en tant que chargée de l'économie m'a ouvert les yeux sur la nécessité d'un recentrage sur les questions sociales, je ciblerais donc ceux qui n'on pas voix au chapitre, les exclus du processus électoral». Estimant pour sa part que la femme devrait profiter des cinq prochaines années pour s'imposer dans le paysage politique local à travers les assemblées communales et de wilaya, Mme Abazi reconnaît que même si l'idée d'une tête de liste féminine fait son chemin, la société locale, à Ouargla, n'a pas encore intégré cette donnée. Notre interlocutrice explique : «Pour ma part, je vise la tête de l'Assemblée communale de Ouargla, voilà mon ambition, devenir la première femme maire de ma ville.» Rendez-vous est pris pour les élections locales de novembre prochain, après un parcours dédié à convaincre l'électorat de voter pour l'homme qu'elle a plébiscité, à savoir Lamine El Hella, comme député lors des prochaines législatives. Représenter la marge C'est dans sa quête d'une centralité nouvelle des quartiers périphériques qu'à 34 ans, Souad, chargée de communication dans la municipalité de Ouargla, brigue elle aussi un mandat de député au Parlement. Bien qu'elle ne soit pas tête de liste, elle pense avoir toutes ses chances pour accéder à ce poste en surfant sur la nouvelle vague du renforcement du leadership féminin, tout en gardant son ancrage traditionnel en tant que jeune représentante des Ouled Naïel, la plus grande tribu d'Algérie. Avec plus de 60 000 habitants, ils constituent une liste d'élite jeune et dynamique sous la houlette du parti de l'Union nationale pour le développement, afin de répondre aux aspirations d'émancipation des quartiers El Mostakbal et Sokra, respectivement banlieues des grandes villes de Touggourt et Ouargla. C'est dans une nouvelle mouvance politique, qui regroupe les transfuges des grands partis ayant déçu la jeune génération autant que les femmes, que Souad pense avoir ses chances, même si ses yeux voient plus loin que le 4 mai. «Je suis la première femme sur cette liste et si nous arrivons à avoir un nombre de voix suffisant, deux sièges, c'est jouable». Simple raisonnement arithmétique pour cette journaliste de carrière qui croit à présent au pouvoir de la politique «pour changer les choses». Mais le rêve de Souad n'est pas de remporter les suffrages des législatives, qui n'offre que sept sièges pour l'ensemble de la wilaya. A force de côtoyer des jeunes oisifs de son quartier et de voir que les enveloppes budgétaires ne mettent pas dans leurs priorités l'implantation d'aires de jeu, de bassins de natation et de stades de proximité dans les quartiers défavorisés, c'est en fait un mandat d'élue municipale que Souad veut tenter sa chance, «peut-être pas en tant que maire de Rouissat, mais faire partie d'une équipe ambitieuse qui n'usera plus du deux poids, deux mesures dans l'aménagement urbain de la commune de Rouissat». Voilà, le mot est lâché, permettre une meilleure visibilité d'une importante frange de la population qui s'estime sous-représentée dans les assemblées élues, femmes y compris. Elles veulent investir l'arène politique par les portes du Parlement, pour Souad Lekhdari, seconde sur la liste du Front de libération nationale, et Fatima Sendid, tête de liste d'El Mostakbel, tandis que Wafia Abazi et Souad Zahia tiennent à entretenir des liens de sociabilité locale et estiment que le changement commence dans les quartiers.