Le front du boycott des législatives du 4 mai se dit réconforté par l'attitude des millions d'électeurs ayant boudé les urnes. Refusant de revendiquer entièrement ce geste politique, le groupe des boycotteurs donne toutefois son analyse de ce «phénomène politique», exprimant le rejet général du système et des politiques du pouvoir. «C'est un véritable référendum contre le système et le pouvoir ! C'est une conséquence des pratiques du régime de Bouteflika», lance d'emblée le président du parti Jil Jadid, Soufiane Djilali. Intervenant lors d'une conférence de presse, animée hier à Alger en compagnie de quatre autres membres de ce groupe, il affirme qu'avec les résultats de ce scrutin, «l'Algérie se retrouve dans une véritable impasse politique». «Les élections devaient donner de la confiance aux partis et à l'Etat. Mais c'est le contraire qui s'est produit. L'Etat est devenu handicapé», lance-t-il, précisant que sur les 15 millions qui n'ont pas voté, il y a «50% d'abstentionnistes et 50% qui ont exprimé une position politique claire». «Nous, nous étions du côté du peuple qui rejette ce système», ajoute-t-il, précisant que «le parti des boycotteurs est le plus grand parti en Algérie». Pour S. Djilali, le pouvoir «est devenu le plus grand danger pour le pays». Commentant toujours les législatives, le leader de Jil Jadid s'arrête sur l'image ayant montré le chef de l'Etat au moment où il accomplissait son droit électoral. «Nous avons vu un Président incapable de glisser son bulletin dans l'urne. Il s'est fait aider par un mineur, comme le prévoit la loi. Mais, l'image nous a confirmé que le Président est incapable d'assumer ses missions et l'article 102 de la Constitution doit être appliqué à son cas. Légalement, nous n'avons plus de président de la République», déclare S. Djilali. Prenant la parole juste après lui, Farid Mokhtari juge, de son côté, que «le résultat de ces élections est un référendum contre le programme du pouvoir en place». «Il y a deux probabilités pour expliquer ce qui se passe actuellement dans le pays : soit il y a une mauvaise appréciation de la situation, soit il existe une volonté de pousser vers le pourrissement. Dans les deux cas, la situation est alarmante», alerte-t-il. Selon F. Mokhtari, le pouvoir est «appelé désormais à rattraper la situation en ouvrant les portes pour un dialogue sérieux avec la vraie opposition». Pour sa part, l'historien et activiste politique Mohand Arezki Ferad appelle à structurer ce rejet populaire. «Nous devons, en tant qu'élite, traduire ce rejet en conscience politique. Il ne faut pas reproduire les erreurs du passé», dit-il. Intervenant lors de la même occasion, Samir Benlarbi et le journaliste Saad Bouakba ont aussi salué la réaction des citoyens, tout en appelant à la mobilisation de tous pour provoquer le changement voulu. Le groupe des boycotteurs annonce la décision de créer une nouvelle structure politique qui fédérera toutes les forces qui aspirent à un avenir démocratique. «Nous sommes en phase préparatoire. Nous allons formaliser ce travail très rapidement et nous ferons appel à tous les Algériens», précise Soufiane Djilali.