Le projet Maison frontières, une production théâtrale algéro-française, lancée concrètement en janvier 2016, continue de prendre forme au fur et à mesure que se tiennent les résidences. L'équipe se prépare pour se rencontrer une nouvelle fois, en septembre prochain, dans la région de Poitiers, en France, pour une quatrième résidence de création. Toute l'équipe devra répondre présent, avec les deux metteurs en scène algérien et français, Aziz Hammachi et Stéphane David, les trois comédiens algériens de la Compagnie des cigognes, Belkacem Kaouane, Mohamed Lefkir et Boualem Zeblah et les deux comédiennes françaises, Marie-Claire Vilard et Charlotte Michalak. Le sixième personnage de la pièce sera complété par Stéphane David. Ce prochain regroupement engagera le projet dans une nouvelle phase qui est celle de la mise en scène. Elle verra les comédiens investir les planches pour un travail de plateau avec le découpage scénique et autres aspects pratiques. Ce rendez-vous de septembre sera une suite de la troisième résidence qui s'est tenue en avril dernier dans la région de Poitiers et consacrée à la lecture des textes et à leur analyse. Un mois avant, l'équipe, qui n'a rien perdu de son engagement, s'est retrouvée en entier dans la même région, à la maison des Trois-Quartiers, à Poitiers, pour une autre résidence. «Nous allons adopter nos enfants parce que ce serait un crime d'ignorer tous les orphelins de ce monde», lance un des comédiens. «Les bâtards ! Ce que tu es en train de me dire c'est que des bâtards vont porter le nom de notre famille, le sang. L'autorité compétente a décidé que la frontière […] passera là !» lui réplique son vis-à-vis, mêlant absurde et humour. Les mots sont forts, la symbolique aussi. La pièce est, pour rappel, adaptée de l'œuvre radiophonique du Polono-Français Slawomir Mrozek. Elle est une adaptation libre qui «frôle l'inspiration», nous dit Aziz Hammachi. L'adaptation, faite par Smaïl Soufit, opère des changements dans les personnages de la pièce d'origine : un jeune homme prend la place d'un l'enfant, une invitée (jouée par C. Michalak) est introduite dans l'histoire alors que l'on s'est départi du grand-père et de la grand-mère. La pièce repose sur un discours intergénérationnel et interculturel. L'on verra que l'interculturalité se traduira dans le mélange des langues, où des mots kabyles s'incrusteront dans un dialogue en français et où l'on trouvera volontiers place pour une chanson de Abdelkader Bouhi. Maison frontières représentera une situation de conflit qui impose des frontières sous le toit d'une maison qui peut être celui du monde d'aujourd'hui. Depuis la toute première résidence d'écriture, de deux semaines, en janvier 2016, dans la ville de Tichy, à Béjaïa, l'équipe du projet, dont fait partie Laurence Moinard, qui porte le projet au nom de l'association Café blanc, doit affronter certaines contraintes, comme le manque d'argent, qui a imposé des résidences qui ne dépassent pas les 15 jours. «Nous sommes obligés de couper nos rendez-vous en deux», nous confie A. Hammachi. Si le soutien du Collectif Or Normes et du Théâtre du Trèfle ont rendu possible la rencontre de Poitiers, pour la troisième résidence, l'équipe bougiote n'a pas pu se déplacer en entier.