Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a défendu, mardi, devant ses partenaires politiques qu'il a reçus au Palais du gouvernement, les choix économiques et politiques décidés par le pouvoir et inclus dans le plan d'action du gouvernement. Ce faisant, le chef de l'Exécutif a dit tout haut ce que tout le monde savait. Pour faire face à la crise qui s'est installée dans la durée, notamment avec l'amenuisement des ressources de l'Etat, il fallait, selon lui, trouver des solutions pour répondre à une urgence. Il a révélé que l'amendement de la loi sur la monnaie et le crédit pour introduire le financement non conventionnel au profit du Trésor public est plus qu'une nécessité. C'est pour lui une alternative pour faire face aux problèmes financiers que risque de connaître le pays dans un futur proche. En invitant autour d'une table les secrétaires généraux des formations politiques qui soutiennent le programme du président Bouteflika ainsi que les chefs des groupes des partis majoritaires à l'Assemblée (FLN, RND, MPA, TAJ), Ouyahia voulait — intérêt national oblige — s'assurer de leur total soutien et pour parler d'une seule voix afin que la feuille de route de l'Exécutif ne souffre d'aucune «entrave». Cette rencontre n'est que le début, dira Ouyahia à ses hôtes, d'un long processus de concertation autour des questions nationales. Il a incité à la pérennisation de la coordination entre les partis qui soutiennent le chef de l'Etat. Le Premier ministre s'est attardé lors de ce conclave sur les objectifs assignés au plan d'action du gouvernement. Il a insisté sur la nécessité de s'unir autour d'une même cause, celle d'œuvrer pour une meilleure prise en charge des besoins de l'heure. Il évoquera la crise financière qui frappe le pays, ce qui exige, selon lui, «davantage d'efforts». Ouyahia, selon Nouassa du parti TAJ, a insisté sur la protection de la souveraineté économique et financière du pays : «Le chef de l'Exécutif a insisté sur le recours au produit national et au respect du code des marchés publics qui donne la priorité justement à la production nationale dans les différentes commandes passées par l'Etat». Chihab Seddik du RND, présent à cette rencontre, explique que le chef de l'Exécutif est revenu sur les grands axes de la feuille de route du gouvernement, qui comporte des solutions appropriées susceptibles de faire sortir le pays de la crise et de répondre aux attentes des citoyens. Avant même sa nomination à la tête de l'Exécutif, Ahmed Ouyahia n'a cessé d'établir des constats amers quant à la situation qui prévaut dans le pays. Il a même proposé des «réformes chocs» en préconisant la privatisation des entreprises publiques dont la situation financière se détériore afin de renflouer les caisses de l'Etat. Néanmoins, pour certains observateurs, le discours alarmiste développé aujourd'hui par Ahmed Ouyahia, notamment à la veille de la présentation du plan d'action du gouvernement et la loi de finances 2018, est une manière de préparer l'opinion publique à de nouvelles mesures drastiques. Le pouvoir doit contenir le mécontentement de la population qui refuse de payer les frais de la crise et de mettre une fois de plus la main à la poche. D'autres observateurs estiment que les craintes d'Ouyahia sont fondées. «Ouyahia est alarmiste parce que les caisses de l'Etat se sont amenuisées, parce que le gouvernement n'arrive pas à récupérer ses biens via l'impôt et l'informel. La situation est préoccupante parce que notre économie était basée uniquement sur la rente pétrolière et aujourd'hui le pouvoir tente de justifier son échec en matière de gouvernance», déplore un économiste qui pense que la réaction d'Ouyahia est l'expression d'une réalité politique manifeste. Pour Ouyahia, c'est la rupture avec la politique fondée sur la rente.