La secrétaire générale du Parti des travailleurs estime que toute intervention militaire pour un changement politique est un putsch. Elle affirme que son parti milite pour une assemblée constituante et refuse de s'inscrire dans des agendas politiques aux visées douteuses. Louisa Hanoune n'adhère pas aux démarches et initiatives politiques lancées ces derniers temps par certaines personnalités et partis pour le «changement».La secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT) refuse d'applaudir aux appels à l'intervention de l'armée dans le champ politique. Intervenant hier sur les ondes de la Chaîne 3 de la Radio nationale, la pasionaria du PT se veut claire sur la question du rôle et des missions de l'armée. «Nous sommes contre ces appels, parce que l'armée a ses missions constitutionnelles auxquelles elle doit se limiter exclusivement», souligne Louisa Hanoune. Ces missions, poursuit-elle, sont la protection de l'intégrité territoriale du pays, sa souveraineté, ses frontières, etc. Rappelant des situations similaires déjà vécues, la première responsable du PT considère ainsi que «ceux qui appellent l'armée à intervenir sont en réalité ceux qui veulent être propulsés sur le dos des chars». Louisa Hanoune souligne dans ce sillage qu'il y a aussi ceux qui appellent à une intervention étrangère, parce que, explique-t-elle, «ils savent qu'ils n'ont pas de place dans la société, qu'ils n'ont pas une dimension politique nationale et qu'ils n'ont donc aucune chance d'être élus». Très critique envers l'action gouvernementale, la secrétaire générale du PT estime qu'une intervention militaire provoquerait «l'irrémédiable». Pour elle, l'armée doit rester dans le cadre constitutionnel de ses missions. Le ministre de la Défense doit aussi, réclame-t-elle, «être une personnalité civile, parce que le militaire est une question politique d'abord». Louisa Hanoune adopte également la même position de rejet par rapport à ceux qui appellent la population à investir la rue. «C'est la même chose pour ceux qui appellent la population à sortir dans la rue. Très souvent, ce sont des personnes qui ont déjà été au pouvoir. Ejectés, ils deviennent des opposants d'une extrême violence. Pas tous, certes. Il y a ceux qui ont gardé la boussole», affirme-t-elle tout en mettant en avant les graves risques de dérapage d'une manifestation de rue non encadrée. «Quand on appelle la population à sortir dans la rue et qu'on n'est pas un dirigeant d'un parti politique, c'est-à-dire qu'on n'est pas capable d'encadrer ni de mettre des garde-fous, cela veut dire qu'on peut préparer le terrain au chaos. C'est le Printemps arabe en quelque sorte», prévient Mme Hanoune qui s'interroge sur les réelles motivations «des personnalités qui appellent la population à sortir dans la rue pour l'application de l'article 102». La première responsable du PT souligne que son parti est «légaliste» et se bat pour «le respect de la souveraineté du peuple». «On prépare le chaos» «Si le peuple veut révoquer son Président, que cela se fasse sur le terrain de la démocratie. Sinon, ça devient un putsch. En plus, on est à un peu plus d'une année de l'élection présidentielle. C'est quand même très étrange comme démarche», se demande Mme Hanoune qui critique clairement à la fois l'appel de Nourreddine Boukrouh ainsi que celui cosigné par Ali-Yahia Abdennour, Ahmed Taleb-Ibrahimi et Rachid Benyelles qui demandent à l'opposition d'unir ses forces contre le 5e mandat. «On appelle les partis politiques de l'opposition à se réunir. De quel droit ? Nous sommes un parti indépendant, souverain dans ses orientations et ses positions. Nous ne permettons à personne de nous dicter quoi que ce soit, ni dans les institutions ni à l'extérieur des institutions», avertit Louisa Hanoune qui rappelle la complexité des processus politiques, difficilement maîtrisables. «Personne ne peut appuyer sur un bouton et dire que demain il y aura une révolution en Algérie. Pour nous, la révolution comme la politique d'une manière générale, ce sont des processus. Nous militons pour une assemblée constituante. Nous avons vu les élections du 4 mai et la défiance qui s'est exprimée. Nous allons vers des élections de guerre contre le multipartisme et contre la démocratie politique. C'est extrêmement dangereux, parce que le système en place n'est plus capable de se renouveler ni de s'autoréformer», soutient la première responsable du PT pour laquelle la concrétisation de l'assemblée constituante pourrait se faire de deux manières. La première, c'est à travers le président de la République «comme cela a été le cas au Venezuela avec d'abord Hugo Chavez et maintenant le président Maduro». La deuxième, par «une dynamique populaire dans laquelle il y aura jonction entre les revendications sociales et politiques». «A ce moment-là, notre parti et d'autres formations patriotiques auront la responsabilité d'encadrer ce mouvement pour qu'il n'y ait pas de dérapage ni à la libyenne ni à la syrienne», précise-t-elle. Louisa Hanoune revient, par ailleurs, sur sa participation aux élections législatives. «Nous avons décidé de participer parce que nous ne pouvons pas rester les bras croisés, alors que notre pays traverse une situation des plus dangereuses, peut-être la plus dangereuse depuis l'indépendance», assure-t-elle. «Pratiques hideuses» La pasionaria du PT fait état des difficultés rencontrées sur le terrain à cause du système de collecte des signatures pour chaque candidat. Un système qu'elle considère comme absurde, non seulement parce qu'il favorise les partis au pouvoir, mais aussi parce qu'il met les partis dans des situations inextricables. «Nous étions concernés par les 4% dans 18 wilayas. Cette fois-ci, il s'est avéré impossible de collecter les signatures. Imaginez-vous dans une commune où il y a 1500 électeurs et que vous avez une dizaine de partis qui doivent collecter des signatures. C'est impossible. Ils ne peuvent même pas rassembler le nombre suffisant», tonne-t-elle, plaidant pour la révision de la loi électorale. Louisa Hanoune fait état dans ce sillage des «pratiques hideuses jamais vues». «Nous avons atteint le summum de la décomposition politique que maintenant ce ne sont plus les compétences, ce ne sont plus les engagements qui guident l'action politique, mais c'est l'argent», dénonce Mme Hanoune qui «doute fort» qu'il y ait un taux de participation plus élevé que lors des précédentes élections. Elle souligne que son parti mènera sa campagne électorale sous le slogan «Mobilisation et résistance». Le PT participera avec 500 listes de candidatures pour les Assemblées populaires communales (APC) et 38 pour les Assemblées populaires de wilaya (APW).