Comme elle l'avait annoncé la semaine dernière, Hadda Hazem, la directrice du quotidien arabophone El Fadjr, a entamé hier sa grève de la faim pour protester contre la pression dont fait l'objet son journal, notamment en matière de dotation de publicité institutionnelle. En effet, c'est à l'entrée du siège de son quotidien que Hadda Hazem, entourée de pancartes de dénonciation de la répression de la liberté d'expression, a choisi de protester, du moins durant la journée. Le soir, c'est à l'intérieur du siège qu'elle passera ses nuits. Visage blême et traits tirés, cette dame, connue pour ses positions politiques «courageuses», est déterminée : mettre à exécution sa décision d'entrer dans une grève illimitée de la faim, malgré le froid de la journée et surtout les contre-indications médicales de son médecin traitant. Diabétique et hypertendue, son médecin, selon ses propos, auquel elle a rendu visite ce dimanche, lui a formellement interdit de s'abstenir de manger vu son taux de glycémie jugé élevé, au risque de mettre sa vie en danger. «Je m'abstiens de manger pour défendre une cause : la liberté de penser et d'exprimer ses pensées sans avoir peur de représailles. Ce qui n'est pas le cas, puisqu'aujourd'hui, je suis sanctionnée par l'appareil de l'Etat pour mes déclarations jugées gênantes par certains, en privant mon journal de sa principale source de financement qu'est la publicité institutionnelle. Depuis mon intervention sur une chaîne télévisée étrangère le 9 août dernier, mon journal n'a reçu aucune insertion publicitaire. Cela se passe au moment où d'autres titres, qui ne sont même pas disponibles dans les kiosques, en bénéficient à la pelle. Même les animaux, lorsqu'on les égorge, protestent avant de rendre l'âme. Moi, on veut égorger mes pensées et ma liberté de m'exprimer en m'infligeant ce type de sanction. Cela ne marchera pas avec moi», déclare-t-elle avant de réaffirmer pour la énième fois sa détermination à se défendre et à faire entendre sa voix. Hadda Hazem ne quittera pas la maison de la presse Tahar Djaout (1er Mai) aussi longtemps que sa grève de la faim durera. Pour mémoire, Hadda Hazem dénonce, à travers cette action extrême, la privation de son journal de la publicité institutionnelle et l'influence exercée sur les annonceurs privés, plaçant son titre, qui existe depuis 17 ans, au bord de l'asphyxie financière. Le mouvement de protestation de Hadda Hazem connaît à son 1er jour une vague de solidarité via les réseaux sociaux et des amis de la presse qui ont tenu à lui témoigner leur soutien par leur présence à la Maison de la presse.