Des personnes spécialisées dans les vols de câbles électriques et téléphoniques agissaient pour le compte d'autres personnes qui se chargeaient de les vendre à des Français, Tunisiens, Libanais et Palestiniens. En fait, tout a commencé le 2 octobre dernier lorsque les gendarmes ont intercepté une Peugeot 404 chargée de 50 m de câbles électriques. Selon la Gendarmerie nationale, le chauffeur de ce véhicule a reconnu avoir cisaillé le 30 septembre dernier 400 m de câbles électriques à partir d'une ligne de basse tension située au douar Aïn El Berda, commune de Douid Thabet, wilaya de Saïda. Les investigations ont mené les services de sécurité à Chlef, où deux complices du chauffeur résident, et les véhicules saisis immatriculés à Tipaza appartiennent à des commerçants de Koléa, dont la mission est de prendre les câbles électriques et téléphoniques pour extraire le cuivre et le vendre à des étrangers. Des perquisitions opérées à Sfisef, wilaya de Sidi Bel Abbès, et à Chaïba ont permis la récupération à Ouled Ziad, wilaya de Saïda, de 120 kg de câbles téléphoniques et 220 kg de câbles électriques et, à Chaïba, de 3200 kg de câbles électriques et téléphoniques ainsi que 615 kg de cuivre. Ces quantités mises au parc communal de Chaïba ne représentent qu'une partie de tous les produits volés par la bande de malfaiteurs et récupérés par les services de sécurité. Selon une source proche de ces derniers, l'un des deux commerçants a reconnu avoir vendu le cuivre à des étrangers de nationalités française, tunisienne, libanaise et palestinienne. Sa dernière opération a été réalisée avec un Français, lequel a exporté quatre containers de cuivre. Cela lui a rapporté 12 millions de dinars. Au total, huit personnes ont été arrêtées par la Gendarmerie nationale dans le cadre de cette enquête. Une enquête qui prouve, encore une fois, le lien étroit entre certains exportateurs véreux de déchets ferreux et non ferreux et les actions criminelles de sabotage des lignes téléphoniques, électriques ainsi que des rails des chemins de fer. En l'an 2002, selon des sources douanières, 2000 tonnes de centraux téléphoniques usagés (maillechort) ont été exportées à partir des ports d'Oran, d'Alger et de Béjaïa sans que le ministère des Postes et Télécommunications lance des avis d'appels d'offres, comme le prévoit la loi, ou, dans le meilleur des cas, ces avis sont publiés dans des journaux à très faible tirage. Durant cet été, un bateau chargé de ferraille a été bloqué au port de Ténès par les services des douanes. La marchandise se composait de poteaux électriques d'éclairage public, de pipelines, de plaques de signalisation et de glissières d'autoroute neuves. Une marchandise qui, malgré la suspicion de l'agent des douanes, a fini par prendre le large. Comment ces produits ont-ils atterri chez cet opérateur et surtout pourquoi les services des douanes n'exigent-ils pas les certificats d'origine authentifiés d'autant que les entreprises qui vendent ces déchets se comptent sur les doigts d'une seule main ? Cette affaire des exportations des déchets ferreux et non ferreux a fait couler beaucoup d'encre et a même fait l'objet de deux enquêtes, l'une menée par l'Inspection générale des finances (IGF) et l'autre par une commission, dont font partie des représentants des Douanes, du commerce et des finances. Les conclusions des deux enquêtes ont été accablantes. Le préjudice causé au Trésor public a été estimé, par le directeur général des Douanes, à une somme comprise entre 120 et 150 milliards de dinars, soit 1,2 à 1,5 milliard de dollars américains en six ans. A ces chiffres effarants, il faudra ajouter le montant des préjudices causés aux services des Postes et Télécommunications ainsi qu'aux chemins de fer du fait des nombreux sabotages commis par cette mafia des exportations des déchets ferreux et non ferreux. Ces produits, faut-il le préciser, sont cotés en Bourse à l'étranger et sont actuellement très demandés. Cette semaine, le député Hacène Laribi a provoqué une véritable polémique avec le ministre chargé des Relations avec le Parlement à la suite de sa question orale adressée au ministre des Finances sur ce scandale. Le ministre a minimisé la portée de cette affaire qui, selon lui, est actuellement prise en charge par la justice. Or, sur les 3000 dossiers contentieux entre 1994 et 2000, seulement 249 plaintes sont arrivées au niveau de la justice.