On l'avait qualifié à l'époque de véritable «scandale philatélique». Un timbre qui avait eu l'effet d'une bombe lors de la sortie, le 16 avril 2008, d'une émission sur des hommes de culture algériens. La série consacrée à Kateb Yacine (1929-1989), Malek Bennabi (1905-1973), Ahmed-Redha Houhou (1911-1956) et Abdelhamid Benhaddouga (1925-1996) avait suscité des doutes auprès des philatélistes le jour de sa vente. Ainsi, on a vite découvert que le dessin de Benhaddouga ne collait pas avec le portrait de l'auteur du Vent du Sud. C'était en fait celui de Mohammed Dib, repris de l'une des ses photos. Ce dernier avait déjà fait l'objet d'une figurine en 2000 du même dessinateur. Qualifiée de «crime d'ignorance», par Anis Benhaddouga, fils de l'auteur, cette bourde était monumentale pour passer inaperçue. A Algérie Poste, c'était la confusion totale. On se rappelle que mis à part les excuses présentées à la famille Benhaddouga par le dessinateur du timbre, Kamareddine Krim, les responsables d'Algérie Poste et le ministère des PTIC, dirigé à l'époque par Boudjemaâ Haïchour, se sont mués dans un étrange silence. Bien que le timbre fût retiré quelques semaines après, Abdelhamid Benhaddouga ne sera finalement réhabilité qu'en 2014, par une vignette à son effigie et l'affaire a été définitivement close. Si nous avons choisi d'entamer par ce triste épisode, c'est pour rappeler aussi que le feuilleton des émissions erronées ou plagiées avait connu ses débuts en 2005 pour durer plus de dix ans. Une période exceptionnelle dans l'histoire de la philatélie algérienne depuis l'indépendance. Ce qui a mis l'Algérie en bonne place dans le catalogue mondial réservé à cette collection inédite. Une étude réalisée par Mohamed Achour Ali Ahmed, membre de l'Association internationale des journalistes philatéliques (AIJP), a révélé que pas moins de 33 timbres erronés ou plagiés sont parus entre le 9 juillet 2005 et le 1er novembre 2014, soit une moyenne de plus de trois émissions erronées par an, ce qui est déjà «fort appréciable». Dans toute cette «sélection inédite», 22 vignettes portent des erreurs d'écriture, de légende, de transcription, de millésime (année de parution), sans parler des lettres qui disparaissent lors de l'impression, des défauts de représentation, des dessins à l'envers, mais surtout et c'est le plus grave, des fautes d'orthographe et de grammaire inadmissibles. Dans tout ce bouquet, Mohamed Achour Ali Ahmed cite quelques «perles» qui enrichissent le catalogue mondial des timbres erronés. C'est l'exemple du timbre-taxe émis le 19 avril 2006, qui n'est autre qu'un scan d'une carte postale SNED. Figure aussi dans cet inventaire le premier timbre «caduc» dans l'histoire de la philatélie algérienne, émis le 18 mai 2007 pour célébrer les Jeux afro-asiatiques, un événement qui n'a jamais eu lieu, mais aussi le timbre consacré aux Jeux méditerranéens de 2009, montrant la planche à voile, un sport annulé du programme. Côté plagiat, les faits sont devenus flagrants. Le 10 février 2010, sur un timbre émis en hommage aux victimes des essais nucléaires français en Algérie, le dessinateur n'a pas hésité à «piquer» une photo de la une de la revue Historia. Une année plus tard, l'illustration du timbre sur l'usage des technologies de l'information et de la communication (TIC) a été tirée directement d'un site web tunisien. Pour fêter l'anniversaire de Benyoucef Benkhedda, le 19/11/2011, on a pris encore une fois une photo de la une du magazine Time. Désormais, le plagiat s'est installé dans les mœurs de certains dessinateurs de timbres algériens. On ne se gêne pas de tirer des photos de Google pour l'émission de la production fruitière du 3 mars 2013. On se permet aussi de «pirater» un site français, et celui de l'agence Reuters pour la vignette sur les mines antipersonnel. Le fait le plus remarquable demeure la figurine portant le logo officiel du 60e anniversaire de la Révolution. Un logo plagié sur celui adopté en 2007 par une université thaïlandaise pour fêter le 60e anniversaire de sa faculté de médecine. Dans un article intitulé «Le plagiat même dans les timbres» publié dans le journal El Watan du 6 octobre 2016, Mohamed-Achour Ali Ahmed a révélé avec des preuves irréfutables le fameux «scandale» de l'émission du 1er juin 2016 dédiée aux Jeux olympiques de Rio de Janeiro. Pour réaliser ces timbres, le dessinateur, et grâce à cette merveilleuse invention qu'est l'internet, a repris «frauduleusement» deux timbres émis en 1960 par l'ex-URSS (Union des républiques socialistes soviétiques) pour célébrer les 17es Jeux olympiques de Rome. Une autre affaire qui est passée sans aucune réaction de la part du Comité olympique algérien.