L'Algérie souhaite améliorer son très décevant classement de 116e pays mondial par l'attractivité pour les investisseurs privés. Elle n'en prend pas du tout le chemin au terme d'une semaine cacophonique et surtout désastreuse pour la qualité de la gouvernance économique. D'abord la sortie de Bouguerra Soltani sur la corruption qui toucherait les niveaux supérieurs de l'Etat. La corruption a incontestablement fait une percée vers le haut dans le listing des obstacles à l'investissement ces trois dernières années. Une raison mathématique : le volume des marchés publics a explosé avec un budget de l'équipement en hausse de plus de 200% en trois ans. Plus de transactions équivaut à plus de dessous de tables, toutes choses étant égales par ailleurs. Pourquoi la corruption toucherait-elle plus les sphères supérieures de l'Etat qu'avant ? Les procédures de passation de contrats sont-elles plus centralisées ? Leurs issues dépendent-elles plus qu'avant d'une décision politique là où la séance publique d'ouverture des plis ? Il y a matière à enquêter. Le préjudice pour l'économie est colossal. Toutes les semaines, l'Algérie manque d'accueillir un investissement étranger ou national, dans le tourisme, le ciment ou l'agroalimentaire, parce qu'un responsable national ou local aura bloqué la démarche en attendant de toucher une commission pour « la mainlevée ». Ensuite, le missile de Amar Tou contre la production nationale de médicaments. Elle ne serait pas tout à fait fiable. Un actionnaire majeur auprès de la major de l'importation des médicaments en Algérie ne se conduirait pas autrement pour élever la valeur boursière de son patrimoine. Le ministre de la Santé et de la Population a clairement annoncé la couleur à son arrivée au printemps 2005. Il a annoncé la fin des protections non écrites de la production pharmaceutique nationale par la levée du contingentement des importations. « Priorité au pouvoir d'achat des malades » était son mot d'ordre. Cela peut se défendre. Mais tout est question de mesure. L'exécution publique d'une filière industrielle qui emploie plusieurs milliers de travailleurs à fortes qualifications ne figurait pas dans les doléances des pays tiers au sein de la négociation pour l'accession à l'OMC. Car c'est bien, il ne faut pas s'en cacher, la pression du cadre OMC, qui a pesé lourdement ces dernières années sur l'ouverture maximale de la filière médicaments avec notamment la levée de la mesure contraignante aux importateurs de devenir à terme des producteurs locaux de médicaments. Or dans la même semaine – troisième sortie étourdissante – le ministre du Commerce, M. El Hachemi Djaâboub annonçait que rien ne pressait désormais pour l'accession de l'Algérie à l'OMC : « Nous n'avons plus la pression sur nous ! ». La bonne gouvernance économique – sujet d'un séminaire cette semaine à Alger — a des cas d'espèce à étudier. Pourquoi autant de concessions déjà faites dans le niveau de protection de la production manufacturière algérienne pour une contrepartie, « l'accès privilégié aux marchés des autres », différé dans le temps lointain ? Il n'y a beaucoup à comprendre au terme d'une semaine où il s'est dit que Abdelhamid Temmar prévoirait de changer à nouveau de cap en renonçant à l'essentiel des 1200 privatisations qu'il avait engagées une année plus tôt. C'est M. Lars Thunell, vice-président exécutif de la Société financière internationale (SFI), filiale de la Banque mondiale, qui a eu le mot pour résumer la situation à Alger où il était en visite : il a qualifié le système fiscal algérien de « plus complexe au monde » et déploré qu'en Algérie « tout a été fait depuis longtemps pour que l'Etat puisse contrôler tout ». Voila qui répond à la première question au sujet de la corruption et ferme la boucle algérienne.