Le Maroc a connu ces derniers mois deux mouvements de contestation sociale : dans le Rif après la mort d'un marchand de poisson en octobre 2016, et dans le Sud désertique après des coupures d'eau liées à la surexploitation agricole. Jerada, pauvre localité de 43 000 habitants, située à l'est du Maroc, a vécu jeudi un nouveau drame. Un homme est encore décédé et un autre a été blessé dans un puits clandestin d'extraction de charbon. L'événement malheureux a provoqué une nouvelle manifestation de colère. Des vidéos diffusées en direct sur des pages Facebook de militants ont montré un attroupement de plusieurs centaines de personnes après la mort de cet «autre martyr».Deux délégations ministérielles se sont rendues sur place depuis début janvier et un «plan d'urgence» a été présenté sans pour l'instant donner satisfaction aux protestataires. A Jerada, des centaines de mineurs risquent quotidiennement leur vie dans la région pour extraire clandestinement du charbon que revendent des notables locaux grâce à des permis d'exploitation. La localité est en ébullition depuis le 21 décembre dernier. «Des manifestations contre la cherté des factures d'eau et d'électricité y avaient éclaté avant d'être rattrapées par un drame : deux frères, âgés de 23 et 30 ans, sont morts noyés dans une mine clandestine de charbon», rappellent les médias marocains. Environ un millier d'ouvriers travaillent toujours, de façon informelle, dans de ces petites mines artisanales non sécurisées. Depuis 1998, l'Association marocaine des droits de l'homme (AMDH) a recensé 17 morts à Jerada. «En 2005, cinq personnes sont décédées dans un accident similaire à celui du 22 décembre, mais les manifestations n'avaient pas la même ampleur. C'est l'accumulation des drames qui a déclenche la colère», explique l'ONG. Dans un entretien accordé au journal français Libération, l'historien Mustapha Bouaziz, qui constate une hausse du nombre de protestations répertoriées chaque jour par le ministère de l'Intérieur, observe que des actions sociales similaires se répètent de façon dispersée au Maroc, depuis le début des années 2000. Le Maroc a connu ces derniers mois deux autres mouvements de contestation sociale : dans le Rif après la mort d'un marchand de poissons en octobre 2016 et dans le Sud désertique après des coupures d'eau liées à la surexploitation agricole. Jusqu'à cet été, les manifestations ont grossi pour demander que soit appliqué le programme de développement de la région et ont provoqué de nombreuses arrestations. En octobre dernier, un autre Hirak avait effectivement commencé à Zagora, dans le Sud. A Jerada aussi, le Hirak a résonné lors des manifestations. Ces événements ont fini par révéler au monde que le Maroc n'est pas du tout ce pays prospère que ne cessent de décrire les médias occidentaux. Au contraire, c'est un pays dont le gros de la population souffre au quotidien le martyre.