Cette guerre éclair en dentelles s'inspire de la recette qui a fait le succès fulgurant de sa compatriote Zara : ouverture massive de points de vente, bouche à oreille plutôt que publicité. Le pari semble audacieux dans un secteur en pleine crise en France. Il situera Women'Secret juste derrière le leader français Etam Lingerie et ses 256 magasins. Mais Women'Secret assure avoir pris la température du marché et se dit « prête à lancer son expansion », a récemment indiqué à Paris son directeur général, Jaume Miquel Naudi. Prix modérés, lignes fréquemment renouvelées, suivi des tendances et boutiques accueillantes : Women'Secret applique déjà à la lettre en Espagne les méthodes du puissant groupe Inditex et de sa marque phare Zara. Women'Secret ne possède pour l'instant que 4 boutiques en France, 3 à Paris, 1 à Marseille. Elle projette de s'étendre sur d'autres marchés, mais couvre d'un voile pudique les détails de sa stratégie. La marque, spécialisée dans la lingerie et le « homewear », appartient au groupe Cortefiel (1200 boutiques dans 37 pays), qui voudrait bien se défaire de son image d'éternel outsider face à la réussite d'Inditex. Mais la concurrence est rude face à ce géant et ses huit marques, qui se disputent la domination du marché mondial avec le suédois H et M. Les chiffres d'affaires des deux leaders mondiaux ont atteint, en 2005, 7,4 milliards d'euros pour le groupe espagnol (3051 magasins dans le monde) contre 7,91 milliards pour le Suédois (1264 boutiques). Le très secret patron d'Inditex, Amancio Ortega, qui en 1979 possédait six boutiques en Galice (nord de l'Espagne), est aujourd'hui l'homme le plus riche d'Espagne. Le quotidien El Pais a récemment estimé sa fortune à 16,6 milliards d'euros. Les secrets de cet empereur provincial ? « Des propositions fraîches et la création d'une sensation de pénurie », explique José Luis Nueno, professeur spécialiste du sujet à l'IESE Business School de Madrid. « Le nom Zara, qui a aujourd'hui un véritable pouvoir d'attraction, a forgé sa réputation avec seulement 0,3% de dépenses en publicité médiatique, contre 3 à 4% chez la concurrence », souligne-t-il. Comme son président, la marque « a peur d'être surexposée ». Elle préfère « le bouche à oreille », explique ce professeur. « Le principal vecteur de l'image de la marque sont ses vitrines, situées dans de grandes zones commerçantes, comme Oxford et Regent Street à Londres ou la Cinquième avenue de New York », explique de son côté Inditex. « Renouvelées tous les quinze jours, les vitrines ont un rôle fondamental pour présenter les collections, et Inditex soigne tout particulièrement leur design », précise le groupe. Si Women'Secret se tourne pour l'instant vers l'Europe, Inditex regarde désormais vers l'Asie, sa « deuxième priorité de croissance ». Le groupe, dont 56,9% des ventes ont été réalisées à l'étranger en 2005, a ouvert un premier magasin à Shanghai en février. Il souhaite y en ouvrir un deuxième, puis un autre à Pékin. Il prévoit aussi de s'implanter en Corée du Sud, à Singapour, en Indonésie, aux Philippines, en Thaïlande et en Malaisie.