La nomination de Abdelaziz Belkhadem à la tête du gouvernement le 26 mai dernier aura été la plus grosse surprise de l'année 2006 au plan politique. Non pas qu'il n'en ait pas les qualifications nécessaires, mais simplement parce que son profil d'islamiste impénitent doublé de son discours pro-FIS font de lui un homme peu consensuel. C'est du moins ce que pensaient de larges secteurs de la classe politique algérienne, qui voyaient à travers son intronisation à la chefferie du gouvernement la conclusion d'une sainte alliance entre le pouvoir et le courant islamiste. L'opinion publique en était d'autant plus choquée que cette désignation est intervenue sur fond d'une loi sur la paix et la réconciliation qui donnait la prime aux monstres terroristes de la décennie noire. Pourtant, rien n'indiquait que Bouteflika allait confier les rênes de l'Exécutif à un homme qui, jusque-là, n'était pas en odeur de sainteté aux yeux des décideurs politiques et militaires du pays. En 1999, déjà de hauts responsables ont opposé leur veto à la volonté de Bouteflika d'adouber son poulain en raison, disait-on, de ses accointances avec les chefs islamistes. C'est pourquoi la décision de nomination de Abdelaziz Belkhadem en tant chef du gouvernement est tombée le 26 mai dernier comme un couperet sur la tête de tous ceux qui pensaient que l'Algérie avait définitivement soldé ses comptes avec ceux qui étaient liés de près ou de loin à la tragédie nationale. Même si rien n'a filtré sur le comment du pourquoi de ce « coup de force » comme il a été qualifié par certains partis, il semble que l'option Belkhadem fut un choix de dernière minute. En effet, alors que le nom de Abdelmalek Sellal avait fait le tour d'Alger comme étant le virtuel successeur de Ouyahia, en tant que « candidat du consensus » pour les centres décisionnels du pouvoir, une dépêche de l'APS annonce, contre toute attente, la nomination de Belkhadem. On aurait sans doute cru à un poisson d'avril si l'on n'était pas à l'orée de la fin du mois de mai… Abdelaziz Belkhadem, « l'islamo conservateur », est bel et bien le nouveau chef du gouvernement. Le président Bouteflika venait de réussir un grand coup en prenant tout le monde à contre-pied.