C'est cette nuit que le Président américain dévoilera sa nouvelle stratégie pour l'Irak. L'on saura ainsi s'il appliquera les recommandations de la Commission Baker – du nom de l'ancien secrétaire d'Etat – qu'il avait lui-même mise sur pied, et ira dans le sens du vote-sanction de novembre dernier qui avait alors permis aux démocrates de s'emparer des deux chambres du Parlement. Après avoir voté la guerre, ces derniers font désormais campagne pour qu'elle cesse et que les troupes américaines, que l'on disait initialement engagées pour quelques semaines, rentrent au pays. Les démocrates ne pensent en ce qui les concerne qu'en termes de pertes militaires et d'effort financier. George Bush et les Républicains ont donc été sanctionnés pour toutes ces erreurs ou plus particulièrement pour absence de stratégie. Et pourtant, l'opinion internationale va connaître le huitième plan depuis 2003. Celle-ci prévoit l'envoi de 20 000 militaires supplémentaires dans ce pays en dépit de la forte impopularité de cette mesure aux Etats-Unis. Ce nouveau plan de bataille devrait comprendre un volet économique et des objectifs assignés au gouvernement irakien pour qu'il accélère sa prise de responsabilités. En particulier, selon des responsables américains, il prévoit que le gouvernement irakien assume le contrôle du pays d'ici au plus tard à novembre 2007. Selon un responsable américain, l'envoi de 20 000 hommes supplémentaires en Irak ne se ferait pas en une seule fois. Près de quatre ans après l'invasion de l'Irak, plus de 3000 soldats américains sont morts et plus de 22 000 ont été blessés alors que le pays, où la violence redouble depuis le début de l'année, est au bord d'une guerre civile. L'engagement militaire américain en Irak a coûté aux Etats-Unis quelque 350 milliards de dollars depuis mars 2003 et actuellement quelque 132 000 militaires y sont déployés. George W. Bush espère que sa nouvelle stratégie changera la donne en Irak et sauvera ses deux dernières années de mandat. Quant aux démocrates, ils se sont déjà montrés opposés à toute augmentation des troupes, rappelant qu'une telle stratégie a déjà été appliquée par le passé sans succès. « Son discours va clairement montrer qu'il demande une escalade de la guerre en Irak », a notamment déclaré Harry Reid, chef de la majorité démocrate au Sénat. Mais, a-t-il ajouté, « le peuple de ce pays ne soutient pas une escalade ». L'influent sénateur démocrate Edward Kennedy a, quant à lui, estimé que l'Irak « est le Vietnam de George Bush », soulignant que « comme avec le Vietnam, la seule solution rationnelle à la crise est politique, pas militaire ». Mais les démocrates n'ont pas les moyens d'empêcher le plan du chef de l'Etat, qui est aussi chef de l'armée et qui a toute latitude à cet égard. L'opinion publique américaine est, comme les démocrates, largement opposée à une hausse du nombre de troupes comme en témoignent de récents sondages. Avant même d'annoncer son plan, le président Bush a choisi Zalmay Khalilzad, ambassadeur américain à Baghdad pour devenir ambassadeur à l'ONU, et Ryan Crocker, en poste au Pakistan, pour représenter les Etats-Unis en Irak. Avec ces deux nominations, la valse des responsables américains liés à l'Irak se poursuit, au moment où les Etats-Unis cherchent les moyens d'en finir avec le bourbier irakien, dans lequel plus de 3000 militaires américains sont morts depuis l'invasion de mars 2003. La semaine dernière, M. Bush a annoncé la nomination de John Negroponte au poste de numéro deux du département d'Etat et son remplacement à la tête des services de renseignement américains par Michael McConnell, un ancien directeur de l'agence de renseignement électronique (NSA). En outre, l'amiral William Fallon, actuellement commandant des forces armées américaines dans le Pacifique, doit prendre la succession de John Abizaid en tant que responsable du centcom au Proche-Orient et le général George Casey, actuel chef des forces américaines en Irak, doit être remplacé par le général de corps d'armée David Petraeus. Ce remaniement, entamé avec le limogeage du ministre de la Défense, Donald Rumsfeld, au lendemain de la large victoire démocrate aux élections parlementaires de novembre, prépare le terrain au discours du Président sur l'Irak. Reste maintenant à connaître l'étendue exacte de ce plan et de ses chances de succès. Mais réglera-t-il pour autant les nouveaux problèmes auxquels l'Irak est confronté depuis mars 2003, et qui font que le pays est au bord de l'éclatement ? Une vision que l'on dit la moins pessimiste, car l'on dit que l'Irak ne sera plus jamais le même L'engagement militaire américain en chiffres Les forces américaines en Irak sont dans ce pays depuis près de quatre ans et elles y ont combattu plus longtemps que lors la Seconde Guerre mondiale où 405 399 soldats américains ont trouvé la mort entre 1941 et 1945 : - Nombre total de soldats américains : 132 000 - Nombre des autres soldats de la coalition : 16 000 de 27 pays - Nombre de brigades de combat américaines : 15 - Nombre de conseillers/instructeurs militaires : 4000 à 5000 - Niveau maximum des forces américaines : 160 000 (en janvier 2005) - Nombre de soldats américains morts en Irak : plus de 3000 Soldats blessés au combat : quelque 22 800 - Coût mensuel de la guerre : 8,4 milliards de dollars. -Coût total depuis l'invasion du 20 mars 2003 : 350 milliards de dollars